L'Etat va apporter entre 2,5 et 5 milliards d'euros au nouvel ensemble Caisses d'Epargne-Banques populaires

Par latribune.fr  |   |  1004  mots
L'Etat va injecter "entre 2,5 et 5 milliards d'euros" sous la forme de prêts subordonnés dans le nouvel ensemble issu de la fusion entre les Caisses d'Epargne et les Banques populaires qui doit être annoncée cette semaine, selon la ministre de l'Economie Christine Lagarde.

La naissance du deuxième groupe bancaire français derrière le Crédit Agricole-LCL est en voie de finalisation. Les états-majors des Caisses d'Epargne et des Banques populaires ont planché tout le week-end pour mener à bien leur projet de fusion qui devrait être annoncé d'ici au 26 février, date de la publication des comptes des deux entités. Depuis Berlin , où il se trouvait pour le sommet des Etats européens membres du G20, Nicolas Sarkozy a déclaré:  "Le processus de fusion progresse, la décision, ce sera pour cette semaine".

Invité ce lundi matin de la radio Europe 1, Christine Lagarde, ministre de l'Economie a apporté quelques précisions. L'Etat va injecter "entre 2,5 et 5 milliards d'euros" sous la forme de prêts subordonnés dans le nouvel ensemble issu de la fusion entre les Caisses d'Epargne et les Banques populaires. "Ces deux établissements ensemble vont devenir le deuxième groupe bancaire français", a-t-elle rappelé, soulignant que ce mariage est "intelligent entre deux types d'établissements qui ont en commun une culture mutualiste". Il s'agit de donner "une taille stratégique" au groupe, a encore indique Christine Lagarde. Selon elle, la part de l'Etat dans le processus de commande du nouvel ensemble "sera en proportion de ce que sera sa participation dans l'établissement".

Quant au Premier ministre français, François fillon, il a affirmé ce lundi également qu'il y avait "urgence" à réaliser la fusion entre la Caisse d'Epargne et la Banque Populaire, en marge d'une visite au salon de l'Agriculture. Il a ajouté : "Quand une banque a besoin d'une intervention forte de l'Etat, l'Etat entre au capital ou au conseil d'administration pour s'assurer que la stratégie suivie par la banque est bien conforme à l'intérêt général". "On l'a fait pour Dexia, la question se pose aujourd'hui pour les Banques Populaires et la Caisse d'Epargne".
 

Samedi aura été une journée déterminante: Nicolas Sarkozy a en effet reçu, à la suite de sa visite au Salon de l'agriculture, Bernard Comolet, patron de la Caisse nationale des Caisses d'Epargne, Philippe Dupont, son homologue à la tête des Banques populaires et François Pérol, secrétaire général adjoint de l'Elysée et homme orchestre de cette fusion. Ils se sont entretenus avec le chef de l'Etat du projet de fusion qui aurait donné son feu vert à la naissance donc du deuxième groupe bancaire français fort de 95.000 salariés, de 17 milliards d'euros de chiffre d'affaires, de 40 milliards de fonds propres, de 8.000 agences et de 35 millions de clients. 

Ce  mariage a été hâtée par le gouvernement soucieux de mettre un terme à des négociations tendues entre les deux banques. Le projet de rapprochement remonte à 2006, date de la création de leur filiale commune Natixis. Il a été réactivé cet automne après l'aggravation de la crise financière et l'annonce de la reprise du belgo-néerlandais Fortis par BNP Paribas, opération aujourd'hui en péril.

Depuis, la tempête financière a rattrapé les deux groupes mutualistes, qui s'apprêtent à publier jeudi des pertes historiques au titre de 2008, en partie plombées par Natixis, qui pourrait perdre plus de 2,5 milliards d'euros. Entamées en octobre, les négociations ont été retardées par les départs du patron emblématique de la Caisse d'Epargne, Charles Milhaud et de son successeur désigné, Nicolas Mérindol. Les deux hommes ont en effet été poussés à la démission après l'annonce, mi-octobre, d'une perte de 751 millions d'euros attribuée aux opérations hasardeuses d'un trader de la banque.

Un coup sévère, qui a compliqué encore davantage les pourparlers entre deux banques contraintes à un mariage de raison. En quatre mois, les dirigeants ne sont d'ailleurs parvenus à s'entendre ni sur le périmètre du nouvel ensemble ni sur sa gouvernance, avant que l'Etat ne tape du poing sur la table. Début février, le chef de file de banque populaire, Philippe Dupont, parlait encore de "redéfinir précisément" le projet, "compte tenu des incertitudes et des risques liés au contexte inédit". Début février, la ministre de l'Economie Christine Lagarde leur a finalement demandé publiquement d'"accélérer la manoeuvre", alors que les deux parties avaient initialement prévu de n'annoncer les détails de la fusion qu'au printemps.
 

Le dossier a pris un tour résolument politique, l'Etat envisageant dès lors de s'inviter au capital du nouvel ensemble et de lui imposer une direction renouvelée. C'est François Pérol, secrétaire adjoint de l'Élysée et ancien de Rothschild et Compagnie, qui devrait prendre la direction de la banque issue de la fusion entre les Banques populaires et les Caisses d'Epargne. Le comité d'éthique de l'administration va par ailleurs être consulté en vue de l'éventuelle nomination à la direction du nouvel ensemble de François Pérol. Pour le moment, l'Elysée n'a pas confirmé cette nomination. Ce lundi, Christine Lagarde n'a pas non plus voulu confirmer la nomination. Elle a tenté de faire descendre d'un cran la polémique qui est en train de monter autour de la nomination de François Pérol en déclarant que "personne ne conteste les qualités de François Pérol".
 
Autre grand coup de ce dossier:  l'Etat devrait devenir actionnaire significatif de l'entité fusionnée. Certains évoquent une participation pouvant aller jusqu'à 20% sous forme de titres hybrides (actions de préférence, sans droit de vote). Le Journal du Dimanche indique, pour sa part,  que l'Etat injecterait en tout 6,5 milliards d'euros, ce qui lui permettrait de détenir 16,5% du capital du nouvel ensemble. Le périmètre de la fusion intégrerait Natixis mais exclurait les filiales immobilières des deux groupes. Crédit Foncier, Nexity et Foncia seraient logés dans des holdings détenues par leurs réseaux respectifs. Selon le calendrier de l'Elysée, le nouveau géant bancaire aurait six mois pour émerger.