Le "j'accuse" d'un ancien de Lehman Brothers

Par Eric Chalmet  |   |  415  mots
Qui est Lawrence McDonald ? Portrait.

Lawrence McDonald est un rescapé. Licencié de Lehman Brothers au début 2008 lors des purges massives auxquelles procédaient les banques américaines, ce courtier obligataire senior ("trading vice president") a retrouvé du travail. Chez Lehman, où il est resté quatre ans, McDonald était spécialisé dans la dette d'entreprises en difficultés ou ayant déposé leur bilan telles Enron, Adelphia et Parmalat. L'ancien courtier est désormais l'un des directeurs du "hedge fund" Pangea Capital. Mais à Wall Street, c'est à l'ouvrage qu'il vient de publier sur la chute de la maison Lehman ("A Colossal Failure of Common Sense", Crown) qu'il doit sa renommée.

L'auteur y dénonce tout haut ce que des milliers d'employés anonymes de la vénérable institution ruminent depuis un an : la chute de Lehman Brothers est liée à l'irresponsabilité d'une poignée de dirigeants, au premier chef son PDG Richard Fuld, mais aussi à la volonté délibérée des autorités américaines de laisser sombrer l'une des plus grandes banques d'affaires de la planète du fait de sa taille et au nom de "l'aléa moral". Des raisons irrecevables pour McDonald alors que la Réserve fédérale et le Trésor ont secouru tant d'établissements en péril avant et après avoir lâché Lehman Brothers.

La presse américaine a encensé le travail de "Larry" McDonald. Le Wall Street Journal" estime que lorsque les historiens se pencheront sur les origines de la crise des crédits "subprime", son ouvrage fera autorité. Basé sur des dizaines interviews d'anciens de Lehman et de personnalités de Wall Street, il est riche en révélations sur le combat mené par les responsables des marchés de taux fixes et certains de leurs lieutenants - dont Larry McDonald - pour tenter de débarquer Dick Fuld, ainsi que l'attitude des autorités américaines pendant la crise.

Malgré tout, dans son livre comme dans vie, McDonald évoque toujours Lehman Brothers avec respect et affection. "Je n'ai jamais vu des gens travailler aussi dur", se souvient l'ancien courtier. A la fin août, c'est avec émotion qu'il a "fait un tour dans la salle des marchés" de la banque, dont les activités américaines ont été reprises par Barclays Capital.  "J'y ai reçu un chaleureux accueil", de la part de ses ex-collègues, comme lui rassurés d'avoir survécu au tsunami financier mais qui pleurent toujours leur ancienne maison.