L'anniversaire mégalo et kitsch d'une banque en Malaisie

Par Julien Bonnet  |   |  528  mots
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La vidéo de la fête organisée le 23 juillet en Malaisie pour célébrer les 45 ans de la Public Bank Bhd circule depuis quelques jours sur le web. Elle suscite déjà indignations et moqueries de la part des internautes. On y voit son président fondateur âgé de 81 ans accueilli avec des honneurs d'habitude réservés aux dictateurs.

Son entrée se voulait triomphale. Le 23 juillet dernier, Tan Sri Teh, cinquième fortune de Malaisie et président de la Public Bank Bhd, pénètre dans la salle réservée pour célébrer le quarante-cinquième anniversaire de l'établissement qu'il a lui-même fondé.

L'homme de 81 ans, debout à l'arrière d'un pick-up, tel un empereur romain juché sur son char, salue les nombreux invités qui l'acclament. A l'arrivée du véhicule, encadré par des motards déguisés en policiers, la foule de danseurs, chanteurs et employés de la banque agite des petits drapeaux. Les organisateurs n'ont également pas hésité à créer une chanson sur l'air de l'hymne officiel de la dernière coupe du monde de football, WavinFlag, du rappeur somalien K'naan. Les paroles sont sans équivoque : « Bienvenue Tan Sri Teh, [...], homme d'honneur, légende vivante, levons-nous à présent et chantons bien fort [...] Il est notre champion, il nous rend fier. Il nous confie une mission, il nous donne le feu [...] Il nous rend plus fort, nous donne la gloire, nous somme ici ensemble pour accueillir Tan Sri Teh ».

Une fois cette reprise de très bon goût terminée, un gâteau d'anniversaire descend du plafond sur un plateau en forme de soucoupe volante. Puis, Tan Sri Teh descend du pick-up, pendant qu'une partie de la foule lui adresse le salut réservé aux divinités, à genou les deux mains en avant. On est donc bien en présence d'un flagrant délit de culte de la personnalité.

Malheureusement pour Tan Sri Teh, qui dispose selon le magazine Forbes d'un patrimoine de 4,7 milliards de dollars, la vidéo de cette fête a récemment fuité sur internet. En quelques jours, elle a déjà déclenché une avalanche de réactions, oscillant entre moqueries et indignations. « Et voici le dernier culte religieux de Malaisie : la Public Bank. Kim Jong-Il serait jaloux », a par exemple écrit sur son compte tweeter, le leader des jeunes membres du parti au pouvoir, l'Organisation nationale de l'unité malaisienne. Un blogueur insiste lui sur le gâchis que représente un tel évènement : « On se souviendrait de lui de manière plus favorable s'il dépensait pour aider la communauté ».

Mais tous ne condamnent pas le faste de cette cérémonie en l'honneur du président de la Public Bank Bhd. « En étant responsable de plus de 12 000 employés et en prenant soin d'eux avec des bonus énormes, Tan Sri Teh a tant fait pour son personnel, qu'il n'y a rien de mal à le vénérer et à lui montrer le respect qu'il mérite vraiment. », commente un internaute sur le site du Malaysan Insider. « [Cet anniversaire] était si original. Quel honneur pour un homme qui a travaillé toute sa vie pour en arriver là... Combien d'entre vous peuvent en dire autant ? Réussir aussi bien et atteindre un tel âge ! », témoigne un autre. Une chose est sûre, si Tan Sri Teh risque de subir les railleries des internautes pendant encore un certain temps, il pourra toujours compter sur la fidélité de ses employés.