Bienvenue dans ces "laboratoires" qui testent la désintégration de l'euro

Par Isabelle Croizard  |   |  456  mots
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Malgré la résistance de l'euro sur le marché des changes, les stratèges des principales banques planchent sur des scénarios avec clap de fin.

La monnaie unique sortira-t-elle indemne de la crise la plus grave qui ait secoué la zone euro au cours de ses treize ans d'histoire ? Si l'on s'en tient à son cours de change face au dollar, l'euro n'a pour l'instant fait l'objet que d'attaques très modérées depuis que la crise de la dette est entrée dans la phase aiguë que l'on connaît actuellement, cédant 7 % de sa valeur depuis le point haut atteint fin octobre à près de 1,4250. Et au niveau actuel, de près de 1,34 lundi après un net rebond, il reste cher. Bien au-delà de son cours moyen depuis 1999 qui se situe à 1,18. Quant à son indice pondéré par rapport au panier des monnaies des principaux partenaires de la zone, il est quasiment inchangé depuis l'accélération de la crise, oscillant autour de 104.

Et pourtant, dans les salles de marché des grandes banques, l'impensable est en train de se produire: les stratèges planchent d'arrache-pied sur des scénarios post-euro. Non pas qu'ils jugent son éclatement inévitable, mais parce qu'ils estiment que l'hypothèse de la mort de la monnaie unique n'est plus un simple fantasme. Le premier pavé dans la mare est venu d'où on ne l'attendait pas.

Cataclysme potentiel

C'est le régulateur britannique, la FSA, qui a le premier évoqué la semaine dernière des « plans » pour faire face à un démantèlement de la zone euro et enjoint les banques d'outre-Manche de se tenir prêtes à affronter tous les scénarios, y compris les pires. Même si les mesures envisagées pour faire face à ce cataclysme potentiel sont quasiment inexistantes. Mais l'euroscepticisme dépasse largement les frontières d'Albion.

ICAP, la première plate-forme électronique mondiale de transactions de change et d'obligations d'État, est en train de tester un système prenant en compte la désintégration de l'euro et le retour aux monnaies nationales des Dix-Sept de la zone, à commencer par la drachme grecque, calcul des taux de change de référence à l'appui. Face à ce qui est déjà une réalité - l'implosion du marché obligataire de la zone euro - toutes les grandes institutions financières sont en train de peaufiner leurs scénarios. Les plus prestigieuses d'entre elles ont déjà rédigé des rapports dans l'hypothèse d'un échec du énième sommet des chefs d'État de la zone euro du 9 décembre. On compte dans leurs rangs Morgan Stanley, UBC, Nomura International, Bank of America Merrill Lynch ou Barclays Capital. Cette dernière a même annoncé que sur les 1.000 investisseurs qu'elle a interrogés, la moitié prédit qu'au moins un des dix-sept pays membres de la zone euro mis fin à l'aventure en 2012.