Aviva : le départ du directeur général sanctionne sa stratégie

Andrew Moss, le directeur général de l'assureur britannique Aviva n'est pas seulement victime du mouvement de révolte des actionnaires contre les rémunérations excessives des dirigeants. Il est aussi sanctionné pour ses choix d'organisation et de stratégie.
Andrew Moss, directeur général sortant du groupe Aviva.

Andrew Moss, le patron d'Aviva est victime de la fronde des actionnaires sur la politique de rémunération des dirigeants. Entamé aux Etats-Unis lors de l'Assemblée générale de Citigroup, ce mouvement s'est amplifié en Europe et surtout au Royaume-Uni ces dernières semaines. Andrew Moss a incontestablement fait les frais de ce « printemps des actionnaires » même si ce n'est certainement pas la seule explication de son départ.

Lors de l'assemblée générale la semaine dernière, plus de la moitié (54%) des actionnaires d'Aviva ont refusé d'adopter la résolution relative aux rémunérations des dirigeants du groupe. Andrew Moss avait pourtant renoncé à l'augmentation prévue de son salaire de 4,8% au titre de l'année 2011, ce qui aurait porté sa rémunération de base à un peu plus d'un million de livres (1,2 million d'euros) mais cette concession n'a pas suffi. Il a dû mardi 8 mai annoncer qu'il quitterait la compagnie fin mai. Sa rémunération de départ comportera une prime de 300.000 livres, couvrant toute réclamation qu'il pourrait formuler concernant les dispositions contractuelles de sa rémunération.


Le printemps des actionnaires


Le cas d'Aviva n'est pas isolé. Les dirigeants de la banque UBS ont fait aussi l'expérience de la révolte de leurs actionnaires quasiment au même moment  : plus d'un tiers se sont prononcés le 3 mai contre le plan de rémunérations des dirigeants. Sans parler la semaine précédente, du rejet des les plans de rémunérations de près d'un tiers des actionnaires du Crédit Suisse et de Barclays. D'autres groupes ont été frappés par des mouvements critiques similaires comme le groupe minier Xstrata, le fonds d'investissement Man Group ou le groupe de presse Trinity Mirror, dont la directrice générale vient aussi de présenter sa démission.


La sanction de l'échec d'une organisation et d'une stratégie


Pour autant, le départ d'Andrew Moss ne s'inscrit pas seulement dans ce mouvement qui touche les principales sociétés cotées outre-manche. Il ne saurait être séparé de l'échec de ses choix d'organisation et de stratégie depuis 2009. D'ailleurs, il l'a lui-même reconnu le 19 avril dernier en déclarant : « j'annonce aujourd'hui une organisation plus simple et plus efficace qui permettra d'accélérer la mise en ?uvre de notre stratégie, de réaliser de nouveaux bénéfices opérationnels et de créer des opportunités de croissance rentable ». Une manière d'avouer que le plan de transformation baptisé "quantum leap" (saut quantique) lancé en octobre 2009 a raté sa cible. Andrew Moss avait alors expliqué qu'il voulait intégrer les 12 activités séparées des 12 pays en Europe dans une organisation transnationale afin de "créer une distribution paneuropéenne".

Deux ans et demi plus tard en avril 2012, nouveau saut quantique chez Aviva... mais dans l'autre sens. L'échelon régional est supprimé, non seulement en Europe mais dans le reste du monde aussi. Entre-temps Andréa Moneta, ancien directeur général de Aviva Europe a quitté le groupe en janvier 2011 pour être remplacé par Igal Mayer, ancien patron de l'Amérique du Nord, dont le départ est également annoncé ce jeudi 19 avril 2012 ainsi que celui de plusieurs autres dirigeants majeurs du groupe.


Unifier le groupe et doubler sa valeur

Arrivé à la tête d' Aviva à l'été 2006, Andrew Moss devait être l'homme de la consolidation après une période intense de fusions-acquisitions conduite par son prédécesseur. Après un parcours très financier (directeur financier chez HSBC, au Lloyd's puis chez Aviva à partir de 2004). Il a effectivement imposé la marque unique à l'ensemble des entités du groupe et lancé le projet d'entreprise « One Aviva , twice the value » qui visait à doubler le bénéfice par action d'ici à 2012. La compagnie estimait le 19 avril en présentant sa nouvelle organisation par marchés dans un communiqué, avoir "atteint l'ensemble de ses objectifs opérationnels dont notamment une forte croissance de la performance" et ce malgré la crise. Cela s'est cependant fait au prix de plusieurs milliers de suppressions d'emplois entre 2008 et 2011, dont environ deux cents annoncés fin 2011 concernant les personnels dédiés à la structure régionale européenne basée en Irlande.

Le groupe se disait prêt dans ce même communiqué publié il y a trois semaines, à passer à "une nouvelle étape". Elle sera franchie sans Andrew Moss, celui-ci ayant considéré que son retrait était bénéfique pour la société. Il faut dire que pour ce qui concerne la valeur boursière, elle a perdu plus de 33% sur un an ce que n'ont pas manqué de souligner les investisseurs institutionnels de la compagnie d'assurance.


Regagner la confiance des actionnaires


Le nouveau président du groupe, John McFarlane, qui exercera provisoirement les fonctions de directeur général, a souhaité mardi que la démission d'Andrew Moss permette de "regagner le respect des actionnaires". Il a d'ailleurs promis de s'atteler  "en priorité" au redressement du cours de Bourse. Le président a annoncé dans la foulée qu'il allait rencontrer "tous les principaux actionnaires dans les jours ou les semaines qui viennent". Parmi eux figurera l'Association des assureurs britanniques (ABI), dont les membres représentent environ 20% de la capitalisation de la Bourse de Londres, et qui a largement initié la fronde des actionnaires en cours. Les investisseurs ont manifestement apprécié la démarche : le titre Aviva prenait mardi 8 plus de 3% en milieu de séance, à 312,3 pence mais cloturait en baisse. Et mercredi 9 mai, la tendance s'est confirmée avec une baisse du titre de plus de 2,5% en fin d'après midi. Sur une semaine la perte de valeur de l'action atteint plus de 7%.
 

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Commentaire 1
à écrit le 10/05/2012 à 13:57
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Le départ est volontaire donc pas une condamnation; Les actionnaires qui en veulent toujours plus veulent contrôler les salaires "indécents" comme dirait un président éjecté qui songeait à prendre des mesures!

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