Dexia : La Belgique efface progressivement la France

La Belgique profite de la période de passation de pouvoir en France pour tenter de prendre le contrôle de Dexia. Elle espère renégocier les garanties d'Etat accordées à la banque franco-belge pour être moins exposée. La mission principale de la nouvelle direction sera ensuite de gérer en mode extinction le portefeuille obligataire de 90 milliards d'euros du groupe. En France, Dexia risque de disparaître rapidement, et les salariés s'inquiètent.
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La Belgique profite de la période de passation de pouvoir en France pour avancer ses pions sur le dossier Dexia. Ainsi, poussé par les autorités belges, Karel De Boeck a été nommé lundi administrateur de la banque. Il est pressenti pour prendre la place du Français Pierre Mariani, l'actuel numéro un du groupe sur le départ, fin juin. Cette éventuelle cooptation n'a pour l'instant pas suscité de réaction du côté du gouvernement français. La Belgique souhaite, en nommant Karel de Boeck, renforcer sa position au cas où les garanties de financement européennes accordées à Dexia seraient renégociées. Elles s'élèvent à 90 milliards d'euros. Si elles étaient actionnées dans l'état actuel des choses, 60.5% seraient apportées par la Belgique, 36.5% par la France et 3% par le Luxembourg. La Belgique souhaite équilibrer sa position de couverture avec la France, même si les garanties ont fait l'objet d'un arrêté royal le 18 octobre 2011 en Belgique, et d'une loi de finance rectificative en France le 25 octobre 2011.

Bruxelles examine le plan de restructuration de la banque

Mais pour qu'elles soient complètement validées, les différentes parties prenantes doivent encore attendre l'aval de la Commission européenne qui examine le plan de restructuration que lui a présenté la direction de la banque. Si un point stratégique pour la France était amené à être renégocié, les belges pourraient alors jouer chèrement leur peau et mettre dans la balance un rééquilibrage de la répartition des garanties. La France et la Belgique s'entendent en tout cas sur un point : éviter que la banque s'écroule. Ils ont ainsi demandé à la Commission européenne de prolonger les 45 milliards d'euros de garanties provisoires, selon les Echos, que la banque franco-belge Dexia avait obtenues fin 2011 pour pouvoir poursuivre ses activités. Et ce, en attendant la garantie de 90 milliards d'euros.

Eviter le "risque systémique"

Reste qu'une prise de pouvoir de la banque par les belges aboutirait à une situation assez cocasse. En effet, la quasi-totalité des activités du groupe ayant été cédées ou étant en cours de cession, seule la filiale anciennement spécialisée dans le financement des collectivités locales, Dexia Crédit Local, subsistera dans le groupe Dexia SA.
Ce sera donc "une société de droit belge, dirigée par des belges, avec des capitaux détenus principalement par des belges", mais qui n'exercera pas d'activité en Belgique, indique une source proche du dossier. La principale mission de la future direction consistera à éviter le "risque systémique", en gérant en extinction le portefeuille obligataire du groupe de 90 milliards d'euros. Ce dernier est de qualité acceptable mais il est long (13,4 ans en moyenne).

La France n'entendra plus parler de Dexia

En ce qui concerne la France, le nom Dexia ne sera plus qu'un lointain souvenir dans quelques mois. Les activités de financement des collectivités locales vont en effet être cédées à la Banque Postale, à la Caisse des dépôts et à l'Etat français. Les 1 350 salariés de Dexia Crédit Local en France espèrent être conservés dans les nouvelles entités, mais peu d'informations leur sont pour l'instant communiquées, ce qui les inquiète. Ils savent pour l'instant que les nouveaux crédits long terme aux collectivités locales seront, à partir de l'automne, consentis sous l'égide de la coentreprise détenue par la Banque Postale majoritairement, et par la Caisse des dépôts. Cette coentreprise compte se refinancer auprès de Dexia Municipal Agency, filiale à 100% d'un nouvel établissement de crédit (NEC), dont Dexia Crédit Local conservera environ 32% dans un premier temps, une part qui ira en diminuant avec le temps.
Mais les salariés français ne connaissent ni le calibrage en terme d'effectifs, ni le périmètre opérationnel de chaque société, que ce soit la coentreprise, le NEC ou Dexia Municipal Agency.
En tout cas, une chose est sûre, l'activité de la coentreprise n'aura pas la même ampleur que celle de Dexia des grandes années. Selon une source en interne, l'activité risque d'y être cantonnée à 1 milliard d'euros de nouveaux prêts à moyen et long terme aux collectivités locales en 2012, 3 milliards en 2013 et 4 milliards en 2014. En outre, toujours selon la même source, « la Banque Postale sélectionnera minutieusement les collectivités auxquelles elle prêtera », et ce, en s'appuyant sur les bases de données de Dexia Municipal Agency. Les collectivités ayant contracté des prêts toxiques notamment, pourraient alors en souffrir, ainsi que les hôpitaux.
 

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