Assurance des téléphones portables : une utilité difficile à capter

Est-il vraiment nécessaire de souscrire une assurance adossée à son téléphone portable ? Il est permis d'en douter, au vu du nombre d'exclusions de garanties ou du défaut de couverture, rapporté au prix de la cotisation et à la fréquence des sinistres.
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Il y a de la friture sur la ligne. Les assurances de téléphones portables "brouillent les ondes", selon le président de l'UFC Que Choisir, Alain Bazot. L'association de consommateurs n'est pas la première à pointer du doigt ces assurances "accessoires" : elle s'ajoute aux mises en garde du médiateur de la Fédération française des sociétés d'assurance, de l'Autorité de contrôle prudentiel, ou encore du récent documentaire de Canal Plus (voir ci-dessous), qui soulève les difficultés liés à la vente et à la résiliation de ces "petites" assurances.
Pour Alain Bazot, "c'est une véritable imposture. L'utilité de ces offres est parfaitement douteuse". L'association de consommateurs a publiée ce mois-ci une étude sur le contenu des contrats d'assurance proposés pour couvrir les téléphones portables.

Peu d'informations à la souscription

Le constat est accablant : tant à la souscription, qu'à la résiliation, en passant par la gestion des sinistres, le processus est complexe.
Les professionnels estiment qu'environ 10% des téléphones sont assurés. Le comparateur Hyperassur recense 6 millions d'assurés, avec une prime moyenne de 72 euros par an.
Lors de la souscription, il est difficile pour le consommateur d'avoir une idée précise de ce qu'il contracte, et surtout, dans quels cas précis son assurance pourra jouer.
La caméra cachée réalisée par l'UFC Que Choisir (voir ci-dessous) est sur ce point éloquente : aucun vendeur n'a accepté de livrer les conditions générales du contrat d'assurance demandées par le client, et la description des couvertures et de l'exercice des garanties est parcellaire.

Perte de valeur du téléphone, stabilité de la cotisation

Pour les contrats étudiés, l'UFC relève une prime comprise entre 35 et 220 euros selon les garanties souscrites.
"Même les assurances les moins chères (30 euros par an) semblent, au vu de la valeur du bien assuré (360 euros environ pour un téléphone neuf), onéreuses", explique l'UFC. Sachant que l'association remarque que la valeur d'un téléphone décroît très rapidement : "malgré cette perte de valeur, la cotisation payée par le consommateur reste identique... Il est donc aisé de voir à partir de quel moment le consommateur devient « perdant » d'avoir souscrit une assurance. Ainsi, schématiquement, quel que soit le risque réel de sinistre sur son téléphone portable, le consommateur aura déboursé une somme plus importante que la valeur réelle de son téléphone", ajoute l'UFC dans son étude.

Des garanties minimalistes

L'association a réalisé l'exercice de comparer les garanties incluses dans les contrats d'assurance proposés par huit acteurs du marché (Orange, SFR, Bouygues telecom, Fnac, Phone House, Carrefour, La Poste Mobile, LCL). Et les avantages sont loin d'être évidents, au vu des garanties qui peuvent effectivement s'exercer.
Seul le vol "caractérisé" (avec agression ou effraction) est couvert par tous les contrats.
Le contrat de base souscrit chez SFR ne couvre d'ailleurs que le vol caractérisé, et, dans la majorité des cas, les enseignes proposent de couvrir la perte et les autres types de vols (vol à la tire ou vol à la sauvette) dans une formule plus chère.
De plus, hormis les formules les plus onéreuses de Bouygues Telecom et Phone House, seule l'offre d'assurance de Carrefour prend en compte la panne.
Concernant les franchises, le contrat de LCL intervient à hauteur de 25 euros par sinistre, celui de Phone House jusqu'à 50 euros. Et la perte du téléphone n'est incluse qu'aux contrats le plus cher d'Orange (108 euros par an) et aux contrats supérieurs à 96 euros par an de Phone House.

Remplir les bonnes conditions

Gare aussi aux exclusions et aux interprétations possibles de la compagnie d'assurance. "Trop fréquemment, lorsque le sinistre survient, les circonstances font que les conditions strictes de la garantie ne sont pas remplies", constate le médiateur de l'assurance. L'assureur peut ainsi invoquer "la non immédiateté de la prise de conscience du vol" pour ne pas indemniser un vol à la tire ou requalifier un vol par effraction en vol par défaut de surveillance, non couvert par l'assurance.
En ce qui concerne les accidents, l'UFC rappelle qu'ils doivent résulter d'un phénomène "extérieur" pour être pris en charge. Faire tomber son portable par inadvertance sur le sol ou dans l'eau ne rentre donc pas dans le cadre de la garantie accidents.
Du coup, les exclusions de garanties peuvent conduire à de faux dépôts de plainte : "la préfecture de police de Paris considère ainsi que 30% des déclarations de vols de téléphones portables sont mensongères, et ont pour but de permettre le remboursement par l'assureur", précise l'UFC.

Une faible sinistralité

"Les sinistres sont plus rares qu'on ne le croit", constate Alain Bazot. L'assureur américain Squaretrade observe ainsi en 2010 un taux de panne de 3.9% au bout d'un an de détention du téléphone, et un taux de casse compris entre 6.7% et 13.8%.
Quant aux vols, l'INSEE et l'Observatoire de la délinquance relèvent qu'entre 2006 et 2010, le taux de vols de portables a diminué de 33%.
"Que ce soit pour la panne, la casse ou le vol, les risques de sinistres ne sont en réalité pas si élevés. Et quand ils le sont, l'ampleur des exclusions rend très aléatoire, voire même incertain, le remboursement du téléphone par l'assureur", déclare l'UFC.
Au sujet du remplacement du téléphone, il est précisé dans les contrats que celui-ci doit être changé pour "un téléphone identique ou équivalent". L'association de consommateurs précise : "par exemple, si vous perdez un téléphone acheté il y a deux ans, l'assureur ne vous fournira qu'un modèle datant de deux ans (neuf ou reconditionné), ou en tous cas présentant les caractéristiques d'un modèle sorti il y a deux ans".

Litiges : le parcours du combattant

Ces contrats sont par ailleurs des contrats groupe, c'est-à-dire qu'ils sont souscrits par les distributeurs auprès de courtiers d'assurance, qui ne doivent pas être confondus avec les assureurs du contrat. Or ce type de contrats ne bénéficie pas de la loi Chatel, qui permet aux assurés d'être informés de l'échéance de leur contrat.
En cas de demande de résiliation ou de litige, c'est donc un véritable parcours du combattant qui commence. "Le client ignore, lorsqu'il conteste, à qui s'adresser, du vendeur, du courtier d'assurances - généralement initiateur de ces garanties collectives spécifiques et souvent gestionnaire du contrat - ou de la société d'assurances, difficilement identifiable de prime abord il est vrai", remarque le médiateur.
Ce dernier conclut : "On aura créé par ces offres spécifiques un besoin assorti d'une attente très forte chez un consommateur, acheteur occasionnel d'un bien et devenu de manière circonstancielle un assuré tout aussi occasionnel. Signe des temps".

 

La caméra cachée de l'UFC Que Choisir

 

Le documentaire de Canal Plus: "Assurances : jamais là pour moi!"

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Commentaires 6
à écrit le 30/07/2013 à 16:17
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Je ne vois pas mon article sur ma déception avec l'ASSURANCE CARMA du GROUPE CARREFOUR HYPERMARCHES ? Est-il si dérangeant comme test de vérité ?

à écrit le 30/07/2013 à 16:09
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En cas de litiges prouvés avec le groupe CARREFOUR HYPERMARCHES et sa structure annexe CARMA ASSURANCES ( DIRIGEE JURIDIQUEMENT PAR LE GROUPE CARREFOUR HYPERMARCHES ET DONT LE GROUPE CARREFOUR HYPERMARCHES EST RESPONSABLE ) lorsqu'il fait signé des c...

à écrit le 27/12/2012 à 1:13
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J'en ai aussi fait les frais. Un conseil ne rien lâcher surtout si vous êtes une entreprise. Pour ma part, 6 mois de démarches pour au bout du compte être remboursé à 50% et là on vous dit : Mais oui monsieur ceci est bien noté dans nos conditions gé...

le 30/07/2013 à 16:27
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Surtout méfiance envers le groupe CARREFOUR HYPERMARCHES et son second couteau, CARMA ASSURANCES, le bras armé du groupe CARREFOUR. La seule possibilité reste le dépôt de plainte auprès du TRIBUNAL D'INSTANCE de la ville d'EVRY, lieu ou se trouve do...

à écrit le 18/12/2012 à 18:34
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Et oui j'en ai fait les frais : 6 ? par mois pour couvrir le vol ou la détérioration de mon mobile. Au bout de 12 mois j'ai tenté de la faire fonctionner suite à une chute du téléphone. L'opérateur n'a jamais voulu couvrir les frais car la personne a...

le 18/12/2012 à 20:29
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@kara: les anciens savent que l'assurance, c'est pas de problème tant que tu paies. Les difficultés commencent quand c'est toi qui veut faire valoir des droits :-)

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