L'Europe du sud, destination privilégiée des "hedge funds"

Si les pays du sud de la zone euro ont mené une politique d'assainissement de leurs économies depuis 2008, les prix des actifs qu'ils abritent sont toujours très attractifs, estiment les gestionnaires de fonds alternatifs. Le secteur de l'industrie offre des opportunités, mais celui de la finance reste le grand favori.
Les actions de la zone sud de l'Europe offrent de belles perspectives, notamment pour les investisseurs américains en recherche de risque.

Espagne, Portugal, Grèce, Italie… Maintenant que les actifs en Amérique du Nord et au Japon sont devenus relativement chers, que les marchés émergents sont pris dans la tourmente, et que la crise de l'euro s'est quelque peu apaisée, les investisseurs alternatifs ("hedge funds") se laissent à nouveau séduire par l'Europe, et notamment par sa périphérie sud qui recèle de bonnes affaires, surtout dans le secteur financier encore largement sous-valorisé.

Déjà manifesté par certains fonds avant-gardistes en 2012 et 2013, cet appétit pour les actions de la région sud du Vieux continent ne fait que s'aiguiser. Une tendance confortée par la perspective d'un retour à la croissance dans les pays de la région (sauf Grèce) d'une part, et par les discours voulus rassurants de la Banque centrale européenne (BCE) d'autre part.

En première ligne, sans surprise : les hedge funds américains qui, leurs portefeuilles regonflés grâce au dopage organisé des indices nationaux par la Fed, sont désormais en recherche de risque, donc de rendement, hors de leurs frontières.

Les bonnes affaires du rayon ré-industrialisation ?

Signe de cet engouement, certains n'hésitent plus à créer des fonds entièrement dédiés à l'Europe du Sud. C'est le cas de l'Américain Amber Capital. Confiant en une lente ré-industrialisation de l'ensemble de la région, cet hedge fund, qui gère 1,5 milliard de dollars a lancé, en décembre, un nouveau fonds d'un montant de 350 millions de dollars dédié des entreprises en croissance, notamment espagnoles. "Nous ne nous attendons pas à une très forte croissance mais nous pensons dur comme fer que les réformes structurelles commencent à produire leur effet", confiait en janvier le gérant de ce fonds, Jose de la Rosa, au Wall Street Journal.

Ce redémarrage industriel embryonnaire s'appuie notamment sur la désinflation salariale, obtenue au prix d'efforts drastiques et d'un certain appauvrissement (à l'exception de l'Italie, seul pays de la zone à voir son salaire unitaire augmenter). En Espagne, par exemple, les investisseurs reviennent vers les secteurs du BTP et de l'industrie automobile. Le groupe ACS, leader historique des travaux publics dans le pays, a signé son grand retour dans le vert en 2013.

"Les entreprises des secteurs automobile et de construction ont pu rebondir grâce à une stratégie de diversification", note Philippe Ferreira, responsable de la recherche de la plateforme de comptes gérés chez Lyxor. "Elles tirent l'essentiel de leurs revenus non plus de la demande intérieure, mais de leurs exportations, notamment vers l'Afrique du Nord." Grâce aux clients étrangers, la production de voitures devrait bondir de 9% en Espagne en 2014, selon l'Association de fabricants Anfac.

Malgré tout, l'euphorie n'est pas de mise. "La démarche des investisseurs reste celle du « stock picking » [sélection des actions]", nuance Philippe Ferreira. "Il y a peu d'opportunités, les entreprises sont choisies au cas par cas, après stricte analyse du bilan. On n'achète pas un indice entier."

La chasse aux banques sous-cotées

Un point de vue que rejoint Hugues Le Maire, directeur général de Diamant Bleu Gestion, société de gestion qui pratique, entre autres, des stratégies "alternatives". "Les bonnes affaires en industrie sont trop rares. Le bon secteur sur lequel parier, c'est celui des financières, qui présente à l'inverse un grand nombre d'opportunités en termes de valorisation".

Malgré leur progression en 2013, les banques du sud de l'Europe conservent en effet un bon potentiel boursier. Des titres comme Banco Espirito Santo au Portugal ou Intesa San Paolo en Italie sont encore sous-cotés par rapport à leur valeur comptable, avec un price to book ratio (valeur boursière sur actif net réévalué) respectif de 0,9 et 0,8 dans un secteur où il tourne habituellement autour de 3, d'après les données Reuters. "Et je suis convaincu que, dans les mois à venir, on va se rendre compte que la valeur comptable elle-même doit être revue à la hausse", estime Hugues Le Maire.

La chasse aux financières grecques s'avère plus pointue. Car la prise de position dans les principales banques helléniques est déjà devenue un quasi-classique dans le portefeuille de certains hedge funds, comme l'Américain Paulson & Co, depuis 2012. Désormais, les principales banques, à l'instar de Piraeus Bank, Alpha Bank ou la National Bank of Greece (NBG), sont à nouveaux surcotées.

"Mais il y a beaucoup de plus petits acteurs très intéressants qui affichent encore une bonne décote, comme la holding grecque Marfin Investment", souligne Hugues Le Maire. Hasard ? Un rapport, publié le 10 mars par l'Observatoire de l'Europe industrielle (CEO) et intitulé "Profiter de la crise", révèle que Marfin Investment a engagé des poursuites judiciaires contre Chypre, à qui elle réclame 823 millions d'euros en dédommagement des pertes liées à la nationalisation de la banque Laiki en 2013. De quoi faire s'envoler le cours de Bourse en cas de réussite.

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Commentaire 1
à écrit le 26/03/2014 à 16:55
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pendant qu'une grande partie de la population crève la dalle, les hedges funds font leurs courses à des prix cassés, ne me dites pas que la crise organisée et les sacrifices imposés par le FMI ont permi de faire profiter ces fonds rapaces, surtout le...

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