Paiement différé : le champion suédois Klarna multiplie par quatre ses pertes

La hausse des coûts, notamment la charge du risque, explique cette contre-performance. L’effondrement de la valorisation de la fintech souligne également la dégradation du marché du paiement différé (« achetez maintenant, payez plus tard ») et la plus grande prudence des investisseurs.
Le modèle du groupe Klarna, dirigé par Sebastian Siemiatkowski, dépasse les seules frontières du paiement différé.

La fin de l'abondance ? Dans une lettre aux actionnaires, publiée à l'occasion des résultats semestriels, le PDG et cofondateur de Klarna, Sebastian Siemiatkowski ne cache pas que le marché du paiement différé (achetez maintenant, payez plus tard) traverse une sérieuse crise. « Klarna a évolué au premier semestre dans un environnement radicalement différent (par rapport à l'automne 2021, NDLR) », écrit-il. « Nous assistons à une guerre tragique et inutile en Ukraine, à un énorme changement de perception des investisseurs, à une forte augmentation de l'inflation, à un marché boursier très volatil et à une probable récession », énumère ainsi le dirigeant.

Les chiffres semestriels du groupe suédois illustrent les difficultés du secteur. Si l'activité reste soutenue, avec un chiffre d'affaires en progression de 24 % à 950 millions de dollars - et ce pour un volume de transactions de 41 milliards de dollars (+21%), les pertes ont en revanche été multipliées par quatre à 581 millions de dollars.

Hausse des coûts

Ces pertes s'expliquent, selon la société, par une forte hausse des coûts, liée à l'intégration de la plateforme de comparaison des prix PriceRunner, mais aussi par la progression des pertes sur crédit. Les frais de personnel ont également joué, le plan de réduction de 10 % des effectifs n'ayant pas encore produit ses effets sur le premier semestre. Le groupe avait déjà annoncé un train de mesures pour réduire ses coûts et viser la rentabilité. Comme le souligne Sebastian Siemiatkowsk, le temps de la croissance est terminé, place à la rentabilité. C'est une demande très claire des investisseurs.

Ces derniers ont accepté, après plusieurs tentatives avortées, de boucler un nouveau tour de table en juillet dernier de 800 millions de dollars pour une valorisation « post money » de 6,7 milliards de dollars. Soit une évaluation divisée par 7 par rapport aux 45,6 milliards de dollars atteints lors d'un précédent tour de table en juin 2021.

Le cofondateur avait rappelé en juillet que la nouvelle base de valorisation restait trois fois plus élevée qu'en 2018 et que les valorisations des groupes comparables, comme Affirm aux Etats-Unis, avaient également chuté de 80 à 90% par rapport à leurs sommets.

Modèle sous tension

Au-delà de ces chiffres, c'est bien le modèle lui-même qui est testé en ces périodes de consommation nettement moins fastes. L'augmentation des provisions montre la difficulté de recruter de nouveaux clients avec de bons profils de risque, alors que les marges faibles ne peuvent couvrir une brusque augmentation du coût du risque. L'analyse du risque reste le nerf de la guerre, ce dont les banques (et leurs filiales spécialisées) entendent profiter pour reprendre une partie du terrain perdu sur ce segment de marché du crédit. L'arrivée d'Apple sur ce marché constitue également une sérieuse menace.

D'autant que ces facilités de paiement en plusieurs fois, très prisées par les jeunes et les adeptes du commerce en ligne, font l'objet d'une surveillance accrue des régulateurs, surtout en période de forte inflation et de dégradation de la conjoncture économique.

Le régulateur britannique Financial Conduct Authority a d'ailleurs mis en garde cet été les sociétés de « buy now, pay later » (« achetez maintenant, payez plus tard ») contre les publicités trompeuses et les frais cachés. Klarna avait déjà eu des problèmes avec l'agence de contrôle des publicités en décembre dernier au motif que la société suédoise encourageait une utilisation « irresponsable » du crédit. Depuis, la société a modifié sa politique de communication, notamment sur les réseaux sociaux, et a développé des outils de gestion budgétaire.

En attendant, Klarna a sans doute resserré la vis dans l'acceptation des dossiers de paiement en plusieurs fois. Le groupe insiste surtout sur son virage stratégique qui entend dépasser les seules frontières du paiement différé pour s'imposer comme un portail de l'e-commerce. Pas certain que ses partenaires marchands le suivent dans cette voie.

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Commentaires 2
à écrit le 31/08/2022 à 22:05
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Son dépôt de bilan est differe.....

à écrit le 31/08/2022 à 19:13
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Moi je vote un super impôt négatif sur les superpertes !!! On financera cette taxe négative avec un impôt juste sur les rentiers de la république vu qu'ils gagnent 10% de plus que dans le privé. Et en plus donc ça reduira les inégalités injustes dan...

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