L'Ukraine nationalise sa plus grande banque

Par latribune.fr  |   |  438  mots
Olexandre Danyliouk (à gauche), ministre des Finances ukrainien, et Valeriia Gontareva, gouverneure de la banque centrale, ont expliqué les raisons de la nationalisation de PrivatBank lundi 19 décembre.
Selon le ministre des Finances ukrainien, l'opération permettrait de sauver les dépôts de "près de 20 millions de clients".

Dans la nuit de dimanche à lundi, l'Ukraine a décidé de "devenir propriétaire de 100% des actions de PrivatBank", autrement dit de nationaliser un établissement qui regroupe le tiers des dépôts du pays. Depuis des mois, les rumeurs concernant la santé de PrivatBank se multipliaient, et faisaient peser un risque sur la stabilité financière d'un pays déjà ébranlé par le conflit avec la Russie. Le coût du renflouement est estimé à près de 4 milliards d'euros.

Selon un communiqué publié par le gouvernement, cette décision garantira "le fonctionnement ininterrompu de cette institution et la sauvegarde de l'argent de ses clients". Dans une allocution télévisée, le président ukrainien Petro Porochenko rappelait que la banque comptait comme clients "environ la moitié de la population adulte et plus de la moitié des entreprises". Il a promis que les dépôts des épargnants seraient intégralement préservés.

"Prophétie auto-réalisatrice"

Avant cette nationalisation, le principal actionnaire de PrivatBank était l'influent milliardaire Igor Kolomoïski, qui a été un temps gouverneur de la région de Dnipropetrovsk et est devenu une cible du président ukrainien Petro Porochenko dans sa lutte contre la corruption. La banque se trouvait au cœur de multiples spéculations ces derniers temps, les médias locaux affirmant qu'elle avait multiplié les prêts de mauvaise qualité, c'est-à-dire présentant peu d'espoir de remboursement au risque de la rendre incapable d'assurer les opérations de ses clients.

Ces rumeurs elles-mêmes inquiétaient le marché, fragilisant encore l'établissement, au risque d'un effet domino dramatique au moment où l'économie du pays se reprend timidement des couleurs après plusieurs années d'effondrement aggravé par la guerre avec les séparatistes prorusses dans l'Est industriel. L'un des membres de la direction de PrivatBank, Dmytro Doubilet, a ainsi qualifié ces difficultés de "prophétie auto-réalisatrice" résultant d'"attaques médiatiques".

Exigence du FMI

L'assainissement du secteur bancaire fait partie des conditions clés des alliés occidentaux de Kiev, menés par le FMI, pour maintenir leur perfusion financière, qui a déjà pris du retard ces dernières années à cause de la persistance de la corruption.

L'Ukraine espérait du FMI le feu vert au versement d'une tranche de 1,3 milliard de dollars en novembre, dans le cadre du plan de sauvetage financier de 17,5 milliards de dollars accordé en 2015. Mais à l'issue de sa dernière mission à Kiev, en novembre, le Fonds a estimé que le pays avait besoin de plus de temps pour remplir les conditions nécessaires.

(Avec AFP)