Procès d'un "faucheur de chaises" dénonçant l'évasion fiscale des banques

Par latribune.fr  |   |  714  mots
Depuis le 2 novembre, une soixantaine d'actions de ce type ont eu lieu dans toute la France devant ou à l'intérieur d'agences de la BNP Paribas, soit environ une par jour.
Le militant altermondialiste Jon Palais est jugé lundi à Dax (Landes) pour le vol de 14 chaises dans une agence parisienne de BNP Paribas en octobre 2015, un procès que le militant landais et ses amis veulent transformer en tribunal de l'évasion fiscale avec une journée "festive et revendicative".

Lundi se tient à Dax le procès du militant d'Attac, Jon Palais, militant du collectif "Faucheurs de chaises". Le 19 octobre 2015, avec une quarantaine d'autres militants, il avait "réquisitionné" 14 chaises d'une agence BNP à Paris.

Identifié comme un des leaders du mouvement, Jon Palais risque 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende pour vol en réunion. Il est le premier à être poursuivi. Le président des Amis de la Terre, Florent Compain, a annoncé qu'il serait lui aussi jugé pour des faits similaires le 11 avril à Bar-le-Duc, sur plainte de la BNP également.

"On est dans une démarche de désobéissance civile avec des actions à visage découvert. Les réquisitions ont permis à des gens de transformer leur colère en action non violente constructive pour créer du débat", a dit Jon Palais.

De son côté, BNP Paribas assure n'être présente "dans aucun paradis fiscal de la liste de l'OCDE, la seule reconnue mondialement". Un porte-parole du groupe a expliqué à l'AFP que ce n'était "pas le vol de chaises en soi qui l'avait conduit à porter plainte, mais l'intrusion à caractère offensant et violent à l'encontre des clients et collaborateurs de l'agence". Se constituant partie civile, mais sans demander a priori de dommages et intérêts, BNP espère une condamnation symbolique afin que "ces actions cessent au plus vite pour un dialogue serein".

Pour les militants d'Attac, "ce ne sont pas les faucheurs qu'il faut juger, c'est l'évasion fiscale en bande organisée".

De nombreux soutiens pendant le procès

Le militant de 37 ans sera défendu par Eva Joly, l'ex-juge anti-corruption devenue avocate, et sa fille Caroline Joly. De nombreuses interventions sont programmées, comme celle du philosophe Edgar Morin (en vidéo) qui a participé à ces actions ou de José Bové. Plusieurs candidats à la présidentielle - Benoît Hamon (PS), Yannick Jadot (EELV) et Philippe Poutou (NPA) - sont aussi annoncés sur place pour parler lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, évaluées entre 60 et 80 milliards d'euros en France, et 1.000 milliards en Europe chaque année.

De 600 à 1.000 personnes sont attendues par les organisateurs dès la matinée dans la sous-préfecture des Landes, entre réalisation de fresque géante et défilé en musique dans les rues.

Des actions symboliques avant le procès

Une trentaine de militants d'Attac ont mené une opération symbolique vendredi matin devant une agence de la BNP à Paris pour "désigner les vrais coupables de l'évasion fiscale" et apporter leur soutien à Jon Palais. Les membres d'Attac n'ont pas pu pénétrer à l'intérieur de l'agence d'Opéra, comme projeté. A la place, ils ont mis en scène le "procès de l'évasion fiscale" dans le hall de l'immeuble.

Quatre militants étaient grimés en Ronald McDonald, en banquier de la BNP, en Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne et ancien Premier ministre luxembourgeois accusé d'avoir bloqué les réformes pour lutter contre l'évasion fiscale, et en Patrick Balkany, maire de Levallois-Perret mis en examen pour fraude fiscale.

"L'évasion fiscale représente entre 60 et 80 milliards d'euros de manque à gagner pour la France chaque année", a dit Thomas Coutrot, ancien porte-parole de l'organisation. "On nous dit qu'il n'y a pas d'argent, qu'il faut réduire la fonction publique, qu'il est impossible de rénover les hôpitaux et les écoles. Mais de l'argent, il y en a", a complété Aurélie Trouvé, porte-parole d'Attac.

La BNP est la "première banque française à profiter de l'évasion fiscale" avec ses "200 filiales dans les paradis fiscaux", a affirmé Mme Trouvé.

Un porte-parole de BNP Paribas a démenti cette affirmation auprès de l'AFP. La banque n'est "absolument pas présente dans les paradis fiscaux", a-t-il dit.

"Les ONG établissent des listes selon leurs propres critères", mais BNP Paribas n'est présente "dans aucun paradis fiscal de la liste de l'OCDE, la seule reconnue mondialement".

Les militants ont été évacués par la police en milieu de journée, ont-ils indiqué à l'AFP. Depuis le 2 novembre, une soixantaine d'actions de ce type ont eu lieu dans toute la France devant ou à l'intérieur d'agences de la BNP Paribas, soit environ une par jour.

(avec l'AFP)