Fiable et durable, voici le moteur solaire Saurea

Imaginé par un ingénieur-inventeur, ce moteur solaire d’un nouveau genre cherchait son marché. Quelques rencontres plus tard, Saurea s’apprête à fournir des ONG œuvrant en Afrique. Explications avec Grégory Deren, DGA de la start-up Normande.

Cleantech Republic : Quel est le principe de ce nouveau moteur ?

Grégory Deren : L'idée a germé en 2008 dans la tête d'Alain Coty, ingénieur en électrotechnique, que j'ai rejoint en 2014 pour participer à l'industrialisation du moteur. Techniquement, il s'agit d'un moteur sans aimant - communément appelé machine à réluctance variable - dont le champ tournant (nécessaire au fonctionnement) est créé par une couronne de cellules photovoltaïques surmontées d'un disque obturateur solidaire de l'arbre/rotor. Les cellules sont ainsi utilisées comme des transistors de puissance.

C'est assez technique !

Oui ! Le plus simple est encore d'en lister les avantages. D'abord, le moteur est directement alimenté par des panneaux solaires classiques dont les cellules PV fournissent du courant continu. Ces panneaux de puissance - placés donc aux abords du moteur - délivrent leur courant aux bornes de la couronne de cellules (intégrée au moteur) qui délivre à son tour le courant aux bobines en créant un champ tournant (avec l'obturateur). L'ensemble « panneaux et couronne » reçoit par définition la même intensité lumineuse : le moteur est donc autorégulé, sans qu'il soit nécessaire d'ajouter de l'électronique. Plus il y a de soleil, plus il tourne vite. Aussi simple que cela.

Vous mettez également en avant la fiabilité de ce système...

Effectivement, l'absence d'aimants offre un axe de rotation totalement libre : il ne présente ainsi aucune résistance en cas d'entrainement de la pompe par une autre source d'énergie, notamment la motricité humaine (là où les moteurs à aimants doivent être découplés). Au final, la conception même du moteur donne à l'ensemble une fiabilité et une durabilité sans égal : 30 ans, soit la durée de vie des panneaux photovoltaïques. Quant aux deux seuls roulements à billes, incontournables, ils ont été dimensionnés pour durer 60 ans !

Quelles sont les applications ?

La plus évidente est le pompage d'eau dans des zones ensoleillées et sans réseau électrique. Cela concerne bien entendu l'Afrique, mais aussi l'Australie, ou encore l'Amérique Latine. On peut aussi l'utiliser pour le brassage de l'eau, la ventilation (plus il y a de soleil, plus il fait chaud, plus le moteur tourne vite...), ou encore pour la mécanisation agricole (broyage, tamisage...). Nous avons également découvert lors de nos travaux scientifiques et diverses présentations publiques, que le monde de l'éducation était très intéressé. En effet, notre moteur présente des spécificités électromécaniques très propices à l'enseignement technique. Et ce depuis les filières STIDD des lycées techniques jusqu'aux doctorants des universités. Cette immersion dans le monde de l'éducation est d'ailleurs un excellent moyen pour nous d'identifier des évolutions techniques et de nouvelles applications. Elle permet aussi de nous faire connaître de futurs ingénieurs et décideurs....

Quel modèle économique avez-vous choisi ?

Pour l'éducatif, nous allons vendre en France, puis probablement à l'étranger via des distributeurs spécialisés. Pour l'activité principale, nous n'avons pas vraiment vocation à commercialiser le moteur directement dans les pays utilisateurs. Nous allons plutôt nous appuyer sur des intégrateurs, pour lesquels nous serons de « simples » équipementiers. Mais dans un premier temps, nous allons fournir  des solutions complètes aux ONG qui accueillent les premières stations pilotes avec des projets de pompage en Afrique.

Déjà des pistes commerciales ?

Tout à fait. Nous sommes déjà très avancés avec plusieurs ONG dont le Geres. A leurs côtés, nous allons implanter plusieurs pilotes cette année : au Mali, au Sénégal, et au Togo. Nos premiers clients sur le marché « éducation » sont quant à eux déjà en attente des premiers modèles. Nous sommes actuellement en train d'assembler les premiers moteurs dans notre atelier près de Rouen - une dizaine de moteurs 100 % Made In France - et prévoyons les premières livraisons en juin 2016.

Comment allez-vous financer tout cela ?

Nous avons réussi à démarrer notre activité sur fonds propres en attendant de passer à la vitesse supérieure grâce à une levée de fonds d'environ 300 000 € dès cette année. Nous avons déjà initié des contacts auprès d'investisseurs. Une seconde levée plus importante - de l'ordre de 700 000 € - est visée pour l'an prochain. Au moment de ce second stade de financement, nous aurons déjà validé les performances technico-économiques de notre moteur grâce à nos pilotes et signé les premiers partenariats pour approvisionner des intégrateurs de solutions dédiées au pompage ou au brassage de l'eau. Nous bénéficierons également d'un chiffre d'affaires sur notre offre pour l'enseignement.

Saurea en bref...

  • 1er brevet : 2008
  • Création : 2016
  • Effectifs : 4 (en croissance)
  • Puissance max du moteur : 270 w mécaniques (en sortie d'arbre)
  • Levée de fonds : en cours 300 000 €, au total 1 million d'euros à deux ans

Cleantech Republic

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