A400M : discours discordants entre EADS et Airbus

Par latribune.fr  |   |  562  mots
Le président de l'avionneur, Thomas Enders n'exclut plus un arrêt pur et simple du programme de l'avion militaire A400M. Mais de son côté, sa maison-mère EADS se dit toujours "pleinement engagé" dans le programme d'avion militaire.

Regain de tension dans les instances dirigeantes d'EADS. Hier, dimanche, le patron d'Airbus, la principale filiale du groupe européen d'aéronautique et de défense, a reconnu que le programme pourrait être un échec. Dans un entretien à la presse allemande, le patron averti que, "dans les conditions actuelles", son entreprise ne peut pas construire les avions de transport de troupes A400M, dont le retard de livraison est déjà estimé à au moins quatre ans.

Mais ce lundi matin, la maison-mère du groupe a donné une toute autre version de la situation. EADS a confirmé dans un communiqué rester "pleinement engagé à la construction de l'A400M". Le groupe européen a toutefois précisé que "le contrat signé en 2003 ne fournit pas les conditions nécessaires pour un développement réussi du programme, d'abord en raison d'un calendrier irréaliste, et deuxièmement parce que la nature commerciale du contrat n'est pas adaptée à la réalité d'un programme militaire".

La rupture entre Tom Enders, le patron d'Airbus, et Louis Gallois, le président d'EADS pourrait être réelle. Le président d'Airbus s'est même déclaré prêt à mettre un terme pur et simple au programme A400M, préférant "une fin qui provoque des cris d'orfraie, que des cris d'orfraie sans fin".

Déjà les très nombreux retards du programme ont provoqué de vives critiques. Sept pays - l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, le Luxembourg et la Turquie - ont passé commande pour un total de 180 A400M et nombre d'ont eux ont exprimé leur mécontentement.

Il y a dix jours, le secrétaire d'Etat allemand à la Défense Rüdiger Wolf jugeait ainsi que la résiliation des commandes de l'A400M devait être considérée comme une "option sérieuse" et qu'il n'allait pas "laisser EADS nous faire tourner en bourrique", dans une interview au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung. De son côté, la France, deuxième plus gros commanditaire (50 appareils), avait laissé entendre, deux jours plus tôt, qu'elle pourrait réduire le nombre d'exemplaires achetés.

Outre ces critiques, les retards de l'A400M ont aussi coûté très cher au constructeur. Début mars, la maison-mère EADS a prévenu que de nouvelles "provisions A400M" étaient susceptibles d'affecter son résultat opérationnel au cours des prochains mois alors que les dépassements des coûts du programme atteignent déjà deux milliards d'euros. Selon certains analystes, les surcoûts pourraient totaliser trois milliards d'euros en 2009.

Avec l'arrêt du programme, EADS a évalué que l'annulation du contrat, lancé en 2003 pour un montant de 20 milliards d'euros au total, se traduirait par 5,7 milliards d'euros de remboursements d'avances.

Selon Thomas Enders, pour que son groupe puisse encore mener le programme à bien, il faudrait que les gouvernements "prennent une part de la responsabilité concernant les moteurs" et un assouplissement du cahier des charges, qui ne serait "entièrement rempli qu'après une période de transition". Le dirigeant ajoute toutefois qu'il ne fera pas de "pèlerinage à Berlin ou à Paris pour implorer une poursuite du programme dans des conditions qui ne sont pas acceptables" pour Airbus.

La France a réagi par la voix de son ministre de la défense Hervé Morin qui a souligné que Paris voulait que le programme continue.