Les cinq chantiers d'Air France-KLM

Après deux années de pertes, le groupe renoue avec les profits. Les défis à relever sont nombreux pour rester parmi les leaders. Ce sera la tâche du directeur général Pierre-Henri Gourgeon lors de son second mandat.
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Après deux ans de pertes opérationnelles, Air France-KLM renoue avec les bénéfices. Le groupe français publie ce jeudi un résultat d'exploitation positif pour son exercice 2010-2011 clos fin mars, mais qui sera largement inférieur aux plus de 300 millions d'euros espérés à l'automne. La succession d'événements exceptionnels (grèves des contrôleurs aériens, intempéries, secousses politiques dans le Maghreb ou en Afrique, effondrement du marché japonais après l'accident nucléaire, une zone qui pèse beaucoup plus chez Air France que chez ses concurrents européens) ou encore l'envolée du prix du baril de pétrole ont poussé la direction à revoir à la baisse ses ambitions.

Si la perte annuelle abyssale de 1,3 milliard d'euros affichée l'an dernier semble bien loin, la performance présentée aujourd'hui reste encore modeste. Et en retrait par rapport à ses deux concurrents directs, Lufthansa et IAG (la structure qui coiffe British Airways et Iberia). Elle rappelle que la route est encore longue avant qu'Air France-KLM ne retrouve sa superbe d'autrefois. D'évidence, le groupe sort de la crise moins solide qu'avant. Sa dette s'est notamment fortement creusée.

Transformer l'essai

Beaucoup d'efforts ont été faits pour sortir de la crise (nouveau modèle dans le fret, adaptation du moyen-courrier, diminution des effectifs...), qui, combinés à une demande de transport aérien solide, devraient permettre d'augmenter fortement les profits en 2011. Pour autant, les défis à relever sont nombreux pour rester dans le peloton de tête. Ce sera la tâche de Pierre-Henri Gourgeon. À 65 ans, le directeur général d'Air France-KLM et d'Air France, dont le mandat au conseil d'administration va être renouvelé pour quatre ans, doit transformer l'essai. Il a les cartes en main pour mettre en oeuvre les chantiers en cours : réussir la transformation du moyen-courrier pour regagner du terrain contre les compagnies à bas coûts. Réussir sa stratégie d'alliances à l'international pour lutter contre la montée en puissance des compagnies des pays émergents, du Golfe en particulier. Réussir à améliorer le bilan du groupe pour pouvoir dégainer si une opportunité de rachat se présente. Réussir enfin sa succession. Ce dernier mandat constituera la dernière étape du duo Spinetta-Gourgeon aux manettes depuis 1997.


1/ Développer des joint-ventures à l'international

Pour résister face aux compagnies aux coûts inférieurs sur le long-courrier comme les transporteurs asiatiques ou du golfe Persique, Air France cherche à créer des joint-ventures avec des compagnies alliées sur tous les grands marchés. Ce système de partage de coûts et de recettes sur des plans de vols harmonisés est le meilleur moyen de compenser les écarts de coûts avec un partenaire. Ce type de coopération débute à peine en Chine où l'objectif est d'avoir une puissance de feu égale à celle en vigueur avec Delta sur l'Atlantique Nord (120 avions). Le groupe a l'ambition de dupliquer ce modèle en Inde et au Brésil. Reste à trouver les bons partenaires et à les convaincre. Pour mener à bien cette stratégie, le groupe français devra convaincre ses pilotes. Un nouvel accord « périmètre » qui définit la partie du programme d'Air France pouvant être effectuée par une autre compagnie doit en effet être négocié d'ici à décembre.

2/ Préparer l'arrivée du futur patron

Deux ans après avoir pris les commandes exécutives d'Air France et d'Air France-KLM, quand Jean-Cyril Spinetta conservait la présidence, Pierre-Henri Gourgeon, 65 ans, va rempiler. Le directeur général, dont le mandat expire en juillet, sera reconduit. Ce mercredi, le conseil d'administration a présenté une résolution proposant à l'assemblée générale son renouvellement pour quatre ans. « Sa mission sera de préparer l'avenir », indique un proche. Pour cela, un dauphin sera désigné. Bruno Matheu (48 ans), l'un des directeurs généraux, est le grand favori. Dans les faits, il est déjà le numéro deux. Florence Parly, en charge du cargo, est également citée en interne. Mais une autre rumeur circule. Celle de Thierry Antinori (49 ans), un ancien d'Air France qui est parti chez Lufthansa en 1997 pour en devenir le numéro trois. À la surprise générale, il a quitté le groupe allemand à la fin mars alors qu'il s'était vu confier la présidence de la filiale Austrian Airlines. Pierre-Henri Gourgeon devra également modifier l'organisation du groupe afin d'intégrer de nouvelles compagnies.

3/ Organiser la riposte aux low-cost

C'est le projet stratégique le plus ambitieux depuis plus de dix ans à Air France. Il vise à reconquérir le marché court et moyen-courrier face à l'hégémonie des transporteurs low-cost. Ce projet dit « bases province » consiste, par le biais d'une baisse de coûts de 15 %, à augmenter l'offre de vols au départ de Marseille, Nice, Toulouse et Bordeaux, à des prix bon marché. Plus de 50 nouvelles routes sont prévues. La production d'heures de vols de la flotte basée sur ces aéroports (40 avions) doit augmenter de 40 %. La direction doit convaincre le personnel navigant d'augmenter la productivité de 25 % en contrepartie d'un gain de rémunération et plus de jours de repos. Pour autant, la partie n'est pas encore gagnée. Le syndicat Spaf (minoritaire) a déposé un préavis de grève. Le SNPL, l'organisation majoritaire, parmi laquelle beaucoup sont favorables au projet, se réunira le 9 juin. Un référendum suivra. Les personnels de cabine ne semblent pas enthousiastes, mais la direction espère signer des accords en juin. La première base pourrait être lancée en septembre. Après les quatre premiers aéroports, le concept pourrait être dupliqué à Orly.

4/ Renforcer le bilan financier

Pour certains analystes, Air France-KLM doit renforcer son bilan pour être en mesure d'agir si une nouvelle vague de consolidation devait s'ouvrir. « La santé financière du groupe est plus faible que celle de Lufthansa ou de IAG. L'endettement est trop élevé. En 2012, le "gearing" d'Air France-KLM devrait être de 122 % (en tenant compte de l'opération Amadeus) quand celui de Lufthansa s'inscrirait à 35 % et celui d'International Airlines Group (IAG) à 110 %. Si une opportunité se présente et qu'elle nécessite un apport de cash, ce sera tendu. Surtout si le prix du baril augmente », explique Yan Derocles, analyste chez Oddo. Ne voyant pas trop de possibilités sur la partie obligations et bancaires, ne resterait qu'une augmentation de capital. Encore faudrait-il la vendre aux marchés.

5/ Achever la réforme de la sécurité

Après la mise en route de la modernisation de la sécurité aérienne en 2010, Air France continue sa réforme. « Il reste à mettre en oeuvre la totalité des mesures préconisées par la commission externe », explique un pilote. De nombreuses réformes ont été lancées ou sont en cours (au niveau du management, des procédures, de la préparation des vols...). Demandées par les pilotes, elles avaient été décidées après l'accident du Rio-Paris le 1er juin 2009. Sans pour autant que les choses soient liées car les causes de l'accident restent inconnues. La première lecture des boîtes noires ne montre pas de « dysfonctionnement majeur » de l'avion selon le BEA, ce qui ne signifie pas que des dysfonctionnements moins importants n'ont pas eu lieu. Jusqu'ici, seule la défaillance des sondes Pitot qui mesurent la vitesse de l'appareil a été établie. Mais elle ne peut expliquer à elle seule l'accident

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Commentaire 1
à écrit le 19/07/2011 à 11:59
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La compétence n'est plus un critère de management, il doit y avoir autre chose...: les chiffres le prouvent, allez voir Luft ...Volcan inclus! Beaucoup de bruit pour rien ... Maintenance/PNC/PNT/Suivi planning,etc... en bisbille, et on se goberge dan...

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