Airbus a-t-il vraiment besoin du « Made in America » pour séduire les compagnies américaines ?

Airbus a débuté ce lundi la construction d'une usine d'assemblage final d'A320 à Mobile aux Etats-Unis. Le moyen, selon l'avionneur, de séduire les compagnies américaines, plus enclines à acheter des Boeing. Un argument qui fait débat. En revanche, cette usine permettra de présenter un visage américain si Airbus ou EADS devait postuler à des contrats de défense américains.
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Ce lundi, à l'occasion du début de la construction d'une usine d'assemblage final d'A320 à Mobile, dans l'Alabama aux Etats-Unis, Airbus n'a cessé de le marteler : cette chaîne de production, qui doit assurer ses premières livraisons d'avions en 2016, doit lui permettre de passer pour une « entreprise américaine » et vaincre ainsi le (soi-disant) patriotisme des compagnies aériennes américaines, plus enclines à se fournir chez Boeing. Une sorte de « green-card » dont l'absence aujourd'hui expliquerait la faiblesse des parts de marché d'Airbus outre-Atlantique (20 %) alors qu'il fait jeu égal, au global, avec son rival américain. Un investissement présenté comme crucial dans la mesure où les transporteurs américains vont être amenés à prendre livraison d'environ 5.000 avions au cours des prochaines années, essentiellement pour le renouvellement des flottes moyen-courriers.

Les compagnies achètent en fonction de leurs besoins

L'argument en laisse sceptique plus d'un, y compris au sein d'Airbus (lire ici pourquoi les compagnies américaines ont-elles plus de Boeing que d'Airbus). Contrairement à la Chine, où les commandes d'Airbus étaient l'une des contreparties à l'installation d'une chaîne d'assemblage à Tianjin (Pékin valide les achats des compagnies aériennes), les compagnies américaines sont libres dans leur choix de flotte. Entreprises privées, aux mains d'actionnaires qui ne regardent que la rentabilité et le cours de Bourse, les compagnies américaines achètent les avions qui correspondent le mieux à leurs besoins. Une usine Airbus ne devrait pas changer la donne. « Cela ne sert à rien, explique un analyste. J'imagine mal Delta ou Southwest acheter des Airbus parce qu'il y a une usine sur le sol américain ». En outre, plusieurs compagnies yankee ont déjà acheté des Airbus en grand nombre. US Airways, United, Northwest (rachetée en 2008 par Delta), et plus récemment Jetblue, Virgin America et plus American Airlines. «Si cela ne servait à rien, on aurait fait une campagne de publicité », se défend Airbus.

Certes ? Néanmoins, si demain l'avionneur européen devait percer aux Etats-Unis, il le devra certainement plus à la qualité de ses avions qu'à son usine américaine. Et les chances de succès sont réelles grâce aux performances de la famille d'avions A320 remotorisés (Neo). Si l'A321 fait réfléchir les compagnies américaines, c'est parce qu'il est aujourd'hui la meilleure solution de remplacement des vieux Boeing 757, très présents dans les flottes des compagnies américaines. Leurs coûts d'exploitation sont en effet 30 % inférieurs. Une performance qui parle plus aux directeurs de flotte que la localisation de l'usine d'assemblage.

Production en zone dollars

Pour autant, l'installation de cette chaîne d'assemblage final à Mobile est stratégique à plus d'un titre. Déjà, elle permettra de monter en cadences et de répondre à la forte demande pour les A320 Neo. A partir de fin 2017, elle sera en mesure de produire 48 avions par an. En outre, l'usine de Mobile permettra à Airbus de produire en zone dollars, et de réduire ainsi son exposition nette face au billet vert, dont la faiblesse par rapport à l'euro pénalise une entreprise européenne dont une grande partie de ses coûts sont en euro quand les recettes sont exclusivement libellées en dollars comme c'est le cas dans l'aéronautique. Un paramètre à ne pas surestimer néanmoins, la valeur ajoutée de l'assemblage final représentant moins de 5 % d'un avion. « Tous les sous-ensembles sont fabriqués en Europe. Un emploi à Mobile fournit du travail à quatre personnes chez Airbus en Europe », explique-t-on chez Airbus.

Surtout, pour plusieurs observateurs, cette présence industrielle aux Etats-Unis est le bon moyen de lutter contre tout patriotisme économique si Airbus ou EADS devaient postuler à des appels d'offres dans la défense-sécurité américaine ou s'ils comptaient acheter, toujours dans ces secteurs, des entreprises américaines. En effet, EADS a perdu le lucratif marché des ravitailleurs de l'armée de l'air américaine pour cause de patriotisme économique des parlementaires américains qui protestaient contre l'attribution d'un tel marché à une entreprise européenne (même si EADS était partenaire de Northrop Grumann). Pouvoir justifier d'un site de production avec plus de 1.000 emplois indirects sur le sol américain constitue en effet un atout supplémentaire. 

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Commentaires 14
à écrit le 09/04/2013 à 14:51
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Il y a quelques jours changement des statuts d'EADS et fin de tout pouvoir de l'Etat français sur le consortium. A présent, construction d'une usine Airbus aux USA... http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/2013032...

le 10/04/2013 à 10:48
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Et donc?

à écrit le 09/04/2013 à 14:46
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1 ) Avant de s'attaquer à la forteresse des Etats-Unis, Airbus ferait bien de s'occuper de son propre marché européen où Boeing lui prend des parts de marché. 2 ) Ré-investir dans un appareil de production compétitif au lieu de distribuer de planture...

le 10/04/2013 à 10:48
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commentaire surprenant dans la mesure où justement Airbus prend des parts de marchés à Boeing, et les problèmes du 787 risquent d'accentuer cela (surtout si le programme A350 est une réussite). Bref, votre commentaire est tout à fait mal-venu...

le 13/04/2013 à 16:56
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C'est inévitable de comparer Airbus à Boeing, et l'un et l'autre se disputent à tour de rôle la pole position. Je ne sais pas si Airbus a raison de séduire les compagnies américaines comme il le fait, mais une chose est sûre : qui ne tente rien n'a r...

à écrit le 09/04/2013 à 11:39
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http://stallwarning.wordpress.com/

à écrit le 09/04/2013 à 11:12
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oui oui pour le confort des sièges économiques !! Car il y a jour et nuit entre passer 11 heures sur un siège de B747400 et celui d'un A340!! je modifie mes horaires pour ne pas voler sur un airbus en eco!! (suis pas gros client 3 long courriers /an...

le 09/04/2013 à 12:20
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Pas bien saisi le rapport avec l'article... Pour le reste, n'hésitez pas à privilégier Boeing si cela vous fait plaisir ! Si en plus vous nous épargnez ce type de dénigrement gratuit ce serait parfait ...

le 09/04/2013 à 14:42
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L'aménagement des places dans les avions (nombre, volume, etc.) dépend des demandes de configuration effectuées par les compagnies et non pas des avionneurs ou des modèles d'avions.

le 13/04/2013 à 6:29
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Encore un(e) qui parle pour ne rien dire, ou ne sait pas de quoi il (elle) parle ! D'abord, la largeur des sièges dépend des compagnies aériennes, ça a été dit. Ensuite, pour exemple, sachez que sur Air France, la largeur des sièges (en éco) sur le...

à écrit le 09/04/2013 à 10:44
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Même sans lire l'article, la réponse est clairement oui !! Un Airbus coûte trop chère aux américains à cause de l'Euro, et les américains aiment le Made in USA...

à écrit le 09/04/2013 à 10:44
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réponse : non. une usine aux us est un bon moyen pour perdre del'argent et la qualité. les travailleurs us n'en ont rien à battre de faire perdre du fric à des entreprises francaises...

à écrit le 09/04/2013 à 8:38
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pragmatique: on peut tout dire des allemandes mais qu'ils sont masochistes no.Avec l'euro fort on achète à meilleur prix(c'est que les français n'ont jamais compris).Vendre c'est une autre histoire.Les allemandes avec une monnaie fort ou faible sont ...

à écrit le 08/04/2013 à 21:01
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Le problème c'est l'Euro fort voulu par les allemands. 0,1? de hausse par rapport au dollar ça coûte 1 milliards d'euro à Airbus! Moralité la monnaie forte incite à délocaliser et pas que dans l'aéronautique!

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