Renseignement spatial : la France se dote de très grandes oreilles

Le programme CERES a pour objectif d'équiper les forces armées d'une capacité de renseignement d'origine électromagnétique (ROEM) spatiale. Trois satellites localiseront et identifieront les signaux émis par les systèmes des forces ennemies (radars, télécoms...)
Michel Cabirol
Grâce aux satellites CERES, la France pourra envoyer en toute indépendance ses avions qui pourront entrer en premier sur un théâtre d'opérations extérieures

Le conseil d'administration du CNES a formalisé lundi le démarrage du programme CERES (Capacité de Renseignement Electromagnétique Spatiale), qui a pour objectif de doter les forces armées, notamment la direction du renseignement militaire (DRM), d'une capacité de renseignement d'origine électromagnétique (ROEM) spatiale. Le système complet sera livré en 2020 par les deux industriels Airbus Defence & Space et Thales Alenia Space, qui ont été notifié d'un contrat en 2013. "L'engagement du projet est maintenant acté avec comme objectif la conception détaillée et la réalisation du système CERES, la mise à poste des satellites et la recette en vol à la fin de cette décennie", a expliqué le CNES dans un communiqué. Selon le magazine "Air&Cosmos", le budget estimé pour ce programme de trois satellites s'élèverait à 400 millions d'euros.

L'objectif du programme CERES est d'acquérir un système spatial interarmées de collecte de données de renseignements d'origine électromagnétique couvrant des besoins stratégiques et de théâtre (localisé sur un opération extérieure). Pour la France, cette capacité opérationnelle de ce type est une grande première. Le système CERES est constitué de trois satellites volant en formation, d'un segment sol de contrôle des satellites, d'un segment sol utilisateur qui permet de programmer la mission et de réaliser un premier niveau de prétraitement des données.

Une aide précieuse pour l'armée de l'air

Les satellites CERES localiseront et identifieront les signaux émis par les systèmes adverses. Ce qui permettra de cartographier les centres de télécommunications et les radars dans les zones de conflit, et d'évaluer leur niveau d'activité. Ce programme permettra par exemple de préciser le danger que représentent les radars ennemis afin de garantir la suprématie des avions français, ou encore de déterminer l'architecture des réseaux de communication adverses. En d'autres termes, la France pourra envoyer en toute indépendance ses avions qui pourront entrer en premier sur un théâtre d'opérations extérieures, contrairement à la Libye où l'aide des États-Unis avait été précieuse.

Mieux connaître pour mieux frapper avec le maximum de sécurité. Concrètement, le fait de connaître les caractéristiques et les performances d'un radar adverse permet à un aéronef de le brouiller, par exemple. Ce qui protègera les pilotes. À l'inverse, l'armée de l'air pourra également empêcher les radars ennemis de repérer l'un de ses aéronefs ou missiles, en les faisant évoluer hors des couvertures radar adverses. Enfin, il aide à la mise en place de contre-mesures pour les forces aériennes, notamment pour l'alimentation des bases de données du module Spectra du Rafale.

Trois satellites qui chassent en meute

C'est l'utilisation simultanée des trois satellites positionnés en triangle qui permet de localiser l'émission. "Quand un radar émet un signal, chacun des satellites reçoit ce signal à un instant légèrement différent, explique un spécialiste. C'est en croisant les informations recueillies par chacun et comparant l'heure de réception d'un même signal que l'on peut situer l'emplacement de l'émetteur. En faisant l'exercice pour chaque paire de satellites (satellite 1/satellite 2 - satellite 1/satellite 3 - satellite 2/satellite 3), on aboutit à une localisation très précise. D'où la nécessité de disposer de trois satellites travaillant conjointement".

Les satellites CERES ont naturellement une capacité de surveillance étendue à toutes les zones du monde observables par satellite sans contraintes d'accès. Au-delà des applications purement militaires, le programme, conçu pour pouvoir analyser les différents types d'émissions, permettra, en plus de déterminer l'architecture de systèmes en réseaux, tel des réseaux de communication, de suivre, en fonction des caractéristiques des signaux, l'évolution du niveau des performances des matériels des forces adverses. "Il pourra donc détecter la prolifération de matériels sophistiqués dans une zone d'intérêt, si besoin est", souligne un spécialiste.

CERES n'écoute pas les conversations privées

Le programme CERES n'écoute pas le contenu des communications mais détecte seulement les signaux. "Si l'on veut intercepter le contenu de l'émission, il faut disposer d'un capteur qui reste longtemps sur la zone d'intérêt, et ce n'est pas le cas avec CERES », précise un bon connaisseur du programme.

La maîtrise d'ouvrage d'ensemble du programme est assurée par la direction générale de l'armement (DGA), le CNES ayant une délégation de maîtrise d'ouvrage sur le segment sol de contrôle. Les trois satellites contribueront directement à la fonction "connaissance et anticipation" du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. La France sera le seul pays européen présent sur ce domaine, rejoignant ainsi le club, très fermé, des pays les plus avancés dans le renseignement d'origine électromagnétique, avec principalement les États-Unis et la Russie.

Michel Cabirol

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Commentaires 8
à écrit le 02/04/2014 à 5:15
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Toute façon, la dette, on s'en tape, on va rien rembourser vu qu'on pourra pas.

à écrit le 01/04/2014 à 16:45
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Tien ils ont pris Bayrou ???

à écrit le 01/04/2014 à 9:23
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On a les moyens, on dépense tel des pays 10 fois plus gros que nous. Pourtant il y eu quelques échos que les caisses étaient vide en France avec des déficits catastrophiques. Étrange ....

le 01/04/2014 à 10:12
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N'oubliez pas que cela fait travailler des ingénieurs en France, qui consomment, payent des impôts etc.... C'est de la bonne dépense publique.

le 01/04/2014 à 10:33
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c'est vrai délaissons nos capacité militaires après tout, déjà qu'on est des pantin des USA on a qu'a leur dissoudre l'armée Française comme ça le jour ou la Russie, l’Allemagne ou même les US eux même arriveront on pourra toujours leurs lancer des p...

le 01/04/2014 à 11:15
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C'est vrai que depuis Napoléon, rien de très glorieux en terme de défense Française, des débâcles et des défaites .....

le 01/04/2014 à 13:02
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La protection des intérêts de la France et de son industrie (et donc de nos emploies) imposent à notre pays d'être libre des USA et de pouvoir se défendre contre tous types d'attaques. Enfin moi je pense que vous n'est pas français ... +1 pour Totof...

à écrit le 01/04/2014 à 9:18
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.... Ils ne sont déjà pas capable de retrouver un avion de 300 tonnes volant à 800kmh (cf Malaysian Airlines) ...

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