Actualisation de l'article le 20 janvier à 17H00 (vœux d'Emmanuel Macron)
2021, une année importante pour la France et, particulièrement, pour Naval Group dans la région Indo-Pacifique dans le domaine des sous-marins. Trois pays majeurs de cette région - Inde, Indonésie et Philippines - pourraient lancer cette année des RFP (Request for proposal ou appel à propositions) ou des appels d'offres. Avec les contrats obtenus en Malaisie (deux sous-marins en 2002), en Inde (six en 2006) et australien (douze en 2016), la France pourrait renforcer son influence dans une région où elle a décidé de revenir en force. Les projets d'acquisition de sous-marins aux Philippines (trois), en Indonésie (cinq) et, en enfin, en Inde (six) pourraient ainsi consolider cette tendance.
Faut-il rappeler que la France est complètement légitime dans cette région avec sept départements, régions et collectivités d'outre-mer disséminés entre l'océan Indien et le Pacifique Sud. Ils abritent 1,6 million de ressortissants français et confèrent à la France neuf des onze millions de km² de sa zone économique exclusive. D'ailleurs, le ministère des Armées est en train de réarmer dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) l'Outre-Mer dans le naval et l'aérien (trois patrouilleurs guyanais, six patrouilleurs outre-mer, trois Bâtiments de soutien et d'assistance outre-mer ainsi que des avions de surveillance et d'intervention maritime Albatros...). Des territoires qui sont de véritables "porte-avions" de l'influence française dans toute cette région clé. La France participe également à sa façon à la surveillance de la Chine dans la région Indo-Pacifique.
"Et parlant de l'océan Indien, je veux ici redire combien la stratégie Indopacifique, définie dès 2018, structurant tout à la fois notre présence ultramarine, l'implication de nos forces armées dans la région et des partenariats d'exception avec l'Australie, l'Inde, les Émirats arabes unis et tant d'autres, est la marque d'un réengagement et d'une affirmation de la France comme puissance maritime, mais aussi comme puissance stabilisatrice dans toute cette région du globe", a rappelé mardi le président de la République Emmanuel Macron lors de ses vœux aux armées.
Trois campagnes où Paris garde toutes ses chances
Aux Philippines, Naval Group, qui aura comme principal adversaire les Coréens de DSME, est en piste pour la vente de trois sous-marins Scorpène. Les concurrents sont actuellement au tout début du processus du dialogue compétitif. Puis, l'appel d'offre pourrait être lancé fin 2021. Dans la zone Indo-Pacifique, les Philippines, pays chrétien dans une région musulmane (Indonésie, Malaisie, Bruneï) ou communiste (Chine, Vietnam), sont un pays-clé en raison de sa situation de sentinelle face à la Chine et face au Vietnam, autre sentinelle anti-chinoise (base de sous-marins lance-missiles, d'origine russe à Cam Ranh Bay).
En Indonésie, qui n'a pas encore lancé d'appel d'offres, Naval Group propose au moins quatre sous-marins avec un transfert de technologies en faveur du chantier naval indonésien PT PAL. A l'état-major des armées (EMA), auditionné à l'Assemblée nationale au mois de janvier, on a rappelé que ce pays est à "la charnière entre le Pacifique et l'océan Indien", "un pays archipélagique qui comporte des détroits tels que ceux de Malacca, de Lombok et de la Sonde. Il y a donc un enjeu essentiel en matière de trafic maritime". Des détroits qui contrôlent le trafic mondial.
Enfin, en Inde, la compétition P75i portant sur la construction de six sous-marins, va opposer cinq constructeurs : le russe Rubin (sous-marin Amur 1650), l'allemand ThyssenKrupp Marine Systems (Type 214), le coréen DSME (KS-III), l'espagnol Navantia (S80) et, enfin, Naval Group (Scorpène). Le ministère de la Défense indien pourrait lancer un RFP en 2021. Les concurrents doivent s'allier avec un chantier naval indien : soit Mazagon Docks Ltd (MDL), qui est en train de construire à Bombay les six sous-marins Kalvari (Scorpène) de Naval Group, soit Larsen & Toubro (L&T).
L'excellence française dans les sous-marins
La France n'a encore rien gagné en Indonésie et aux Philippines. Tout comme l'Inde, ces pays peuvent toutefois s'inspirer du choix stratégique de l'Australie, qui a sélectionné le Barracuda à propulsion conventionnelle. Avec ce sous-marin, la marine australienne pourra être indépendante à la fois sur le plan industriel et diplomatique. Le Barracuda à propulsion conventionnelle s'est imposé face à des bateaux concurrents japonais et allemand, qui n'apportaient pas une valeur ajoutée globale. Pour autant, Naval Group va trouver sur son chemin son rival préféré, TKMS. Le constructeur allemand a déjà vendu 16 sous-marins depuis 30 ans (contre 20 pour Naval Group depuis 20 ans) : Corée du sud (trois sous-marins Type 209 en 1993, puis trois Type 214 en 2000, et enfin, six Type en 2014) et à Singapour (deux Type 2018, puis deux Type 2018).
Bénéficiant des savoir-faire sur les programmes de sous-marins nucléaires français, les Scorpène et Barracuda à propulsion conventionnelle possèdent en outre une excellente discrétion acoustique. "Les progrès réalisés dans la réduction de la susceptibilité aux sonars actifs, l'index de cible, et la maîtrise des autres signatures permettent également de leur assurer une grande furtivité, explique le directeur du développement international à la Direction générale de l'armement Thierry Carlier dans le magazine des ingénieurs de l'armement. Le module AIP de seconde génération, aujourd'hui mature, permet d'offrir des temps de plongée de plusieurs semaines tout en utilisant le même carburant que celui des moteurs diesels".
"Conjointement avec la discrétion acoustique, le module de détection acoustique, avec ses sonars ultra-sensibles sur une large plage de fréquences et ses traitements performants, permet d'obtenir l'avantage acoustique, c'est-à-dire la capacité à détecter l'adversaire avant de l'être soi-même, rappelle-t-il.
Sujets les + commentés