Agriculture : la demande de remboursement suscite la polémique

Par latribune.fr  |   |  701  mots
Plusieurs personnalités du monde agricole et politique ont réagi pour dénoncer la demande de remboursement de 500 millions d'euros, exigée par Bruxelles aux producteurs de fruits et légumes français.

Compte tenu de la sensibilité du sujet, il fallait s'attendre à la vague de polémique qu'il suscite. Le remboursement de 500 millions d'euros, demandé par Bruxelles aux agriculteurs français, a entraîné des réactions en chaîne.

Le premier à monter au créneau parmi les politiques est Daniel Cohn-Bendit. Le leader d'Europe-Ecologie (Verts) a jugé ce lundi, sur Europe 1, qu'il n'était "pas normal" que de "petits producteurs" français soient contraints de rembourser des aides publiques reçues. Selon lui, il est important de faire la différence entre ceux qui peuvent assumer le remboursement et les autres. "Si ce sont de grands agriculteurs comme les gros céréaliers qui auraient reçu trop de subventions à l'exportation, c'est normal qu'ils remboursent, si c'est des petits producteurs, ce n'est pas normal. Il y a des différences entre les petits agriculteurs français, qui ont des difficultés et ceux qui vivent très bien et exportent", explique-t-il.

L'eurodéputé profite de l'occasion pour réclamer une reforme de la Politique agricole commune (PAC), jugée "injuste" : "les petits et les moyens producteurs y perdent : il y a une disproportion entre l'aide aux grands agriculteurs, aux céréaliers par exemple, et l'aide nécessaire aux petits agriculteurs ".

Interrogé par France Info, Jean-Michel Lemétayer, président du grand syndical agricole la FNSEA (Fédération nationale des sociétés d'exploitants agricoles) a pour sa part estimé que "ce n'est pas le moment d'exiger un tel remboursement.". "Dans un contexte difficile pour les producteurs, il est dangereux de jouer la provocation", a poursuivi Jean-Bernard Bayard, secrétaire-adjoint du syndicat agricole interrogé par l'AFP (Agence France Presse). "Les agriculteurs ne peuvent pas rembourser dans l'immédiat", explique-t-il, en précisant que la FNSEA allait "expertiser la situation" avant de décider d'organiser des actions.

Pour Bruno Dupont, président de la Fédération nationale des producteurs de fruits, interrogé par lepoint.fr, "les producteurs n'ont pas à payer les frais d'une politique qui n'est pas la leur."

Même réaction du côté du Modef, la Confédération nationale des syndicats d'exploitants familiaux, qui annonce son refus de payer. "Le Modef est ulcéré tant par l'ultra-libéralisme de la Commission européenne que par la complicité des gouvernements français qui se sont succédé depuis 15 ans", se justifie le secrétaire général, Raymond Girardi qui "somme le gouvernement français et son ministre de l'Agriculture de renvoyer la Commission à ses chères études".

Dans une interview au Parisien, qui révèle l'affaire ce lundi, François Lafitte, représentant des producteurs de fruits et légumes, avait lui aussi déjà tranché. "Personne ne remboursera ces subventions. Premièrement, parce que les montants avancés par Bruxelles sont infondés, deuxièmement, parce que ce serait la ruine de la profession", expliquait-il, avant de promettre un "été brûlant" si le gouvernement passait à l'action.

Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, a justement joué la carte de l'apaisement en annonçant que les agriculteurs devront rembourser moins de 500 millions d'euros. "Nous contestons une partie de cette somme. J'estime qu'il y a là-dedans des aides qui ne sont pas illégales". Il a tenu à rassurer les agriculteurs en précisant qu'"aucun producteur dans une situation économique fragile, voire désespérée, n'aura à rembourser".

Sans évoquer de calendrier, il précise qu' "il n'y aura pas de mesure de recouvrement effectif avant plusieurs mois". Bruno Le Maire se dit "conscient de la situation difficile" traversée par les producteurs de fruits et légumes et annonce une réunion ce mardi pour régler les modalités d'une aide financière destinée à "soutenir leur trésoreries".

La Commission européenne avait donné jusqu'au 29 juillet aux autorités françaises pour lui donenr une réponse. Bruno Le Maire s'est donc chargé d'envoyer un courrier précisant que la France rembourserait les subventions qu'elle avait versées à ses agriculteurs entre 1992 et 2002. Des aides accusées aujourd'hui d'avoir faussé la concurrence. Face à la polémique, la France, devra jouer sur les délais, quitte à s'exposer à une astreinte de plusieurs millions d'euros par trimestre.