Fruits et légumes : baisse des prix et colère des agriculteurs

Par latribune.fr  |   |  693  mots
D'après une étude de Familles Rurales, les prix ont diminué de près de 19% pour les fruits et légumes. Si cette baisse réjouit les consommateurs, elle met en difficulté les producteurs, obligés de vendre à perte certains produits.

Le bonheur des uns fait le malheur des autres. Les Français apprennent donc avec plaisir que le prix des fruits a chuté de 19% en un an et celui des légumes de 18%, d'après l'étude menée par l'association de consommateur Familles rurales, publiée ce vendredi. Mais cette nouvelle provoque le désespoir des agriculteurs qui dénoncent la pression des prix exercée par les centrales d'achats, des distributeurs notamment, et la concurrence déloyale des pays voisins.

Pour les agriculteurs, la baisse significative des prix se traduit par des ventes à perte. Selon certains producteurs, le prix de revient des pêches et nectarines, fruits préférés des français en été, s'élève a 1,35 euro le kilo alors qu'ils sont vendus 1,05 euro dans la grande distribution. De même, les tomates produites pour 80 centimes le kilo sont souvent rachetées 30 centimes.

Cette contraction explique la chute des prix dans les marchés et supermarchés. D'après Familles rurales, le prix au kilo des pêches et des nectarines a baissé de 20,2% et 27,9%. Celui des melons de 33%, l'abricot de 41%, et la courgette de 23%.

Ces chutes vertigineuses plongent le secteur dans une crise profonde. Pour témoigner de leur colère, les producteurs de la filière ont mis en place un barrage filtrant ce jeudi au péage de Poulou (Pyrénées Orientales) sur l'autoroute A9, bloquant ainsi l'accès aux camions de fruits espagnoles. Selon eux, la principale raison de la baisse des prix vient des importations massives de fruits produits à bas coûts en Allemagne, Espagne, Maroc ou Brésil. Les gouvernements de ces pays donnent en effet des avantages à leur producteurs qui se traduisent par des coûts salariaux plus bas et donc un prix de revient plus faible.

En Espagne par exemple, il existe un CDD journalier exonéré de charges. En Allemagne, il n'y a pas de salaire minimum dans le secteur agricole et les heures supplémentaires sont comptabilisées dès 60h. Ces pays ont aussi une plus grande facilité d'accès à la main d'œuvre étrangère. Difficile alors pour les français de faire face à cette concurrence. Résultat : les importations bondissent. En 2008, elles représentaient 4,6 millions de tonnes contre 2,2 millions exportés.

Pour se sortir de l'impasse, les agriculteurs attendent un geste fort du gouvernement. Plusieurs idées sont avancées par les syndicats agricoles, de l'octroi d'un crédit de 3 euros par heure travaillée, à une diminution des charges patronales, en passant par la mise en place d'une TVA sociale pour les fruits et légumes. Tous ces sujets seront débattu lors de la table ronde du 22 septembre qui aura lieu au ministère de l'agriculture.

Les producteurs profiteront aussi de l'occasion pour attirer l'attention sur les marges des grands distributeurs. Dans son enquête, Familles rurales parle d' "opacité" sur le mécanisme de formation des prix, notamment dans les phases de transport et de distribution. "Nous attendons une véritable transparence", a déclaré Thierry Damien, président de Familles rurales lors d'une conférence de presse.

La question des marges a déjà largement été abordée par les agriculteurs lors des ventes de fruits et légumes qui ont eu lieu ce jeudi dans plusieurs villes. Les producteurs ont directement vendu aux clients des produits frais, à un prix qui n'incluait ni les marges des distributeurs ni les distorsions dues à la concurrence. Une vingtaine de tonnes de fruits et légumes étaient ainsi proposés en région parisienne à des prix avantageux. Le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) avait choisi Yvry-sur-Seine (Val-de-Marne) plutôt que Paris comme les annnées précédentes pour sa vente annuelle. Cinq tonnes de produits étaient disponibles. Le kilo de tomates, par exemple, était a 1,5 euros contre 2,5 euros en magasin.

D'autres actions, moins pacifiques, pourraient voir le jour. La demande de remboursement de 500 millions d'euros de la part de Bruxelles, dossier encore en suspens, avait déjà fait monter la tension. Les 15 millions d'euros d'aide proposés par le gouvernement début août n'ont pas suffit à apaiser les esprits.