Qui sont ces Français qui font aimer saucisson et rillettes aux Coréens ?

Par Frédéric Ojardias, à Séoul  |   |  586  mots
France Gourmet, « Le coeur de notre activité reste la fabrication de charcuterie fine de pure tradition française, au plus près des recettes. Tout est fait à la main. » / DR
France Gourmet est une PME fondée par trois jeunes entrepreneurs français en Corée du Sud. Ils démontrent que l'innovation peut se trouver jusque dans les saucisses...

Des saucisses de fabrication française, mais au goût coréen : c'est l'étonnante charcuterie que concocte France Gourmet, une PME installée à Séoul. De son atelier de la banlieue de la capitale sud-coréenne sortent des saucisses au ginseng, aux feuilles de sésame, au kimchi (chou fermenté à la saveur volcanique et plat national coréen), ou encore au piment rouge, autre composante essentielle de la cuisine du pays du Matin calme.

Eh oui, avant d'initier les Coréens aux bonheurs de la charcuterie française, France Gourmet a dû innover et s'adapter aux goûts locaux. Malin, le concept a fait mouche.

« C'est encore un essai, mais ça marche très bien, hôtels et restaurants adorent », se félicite Romuald Pieters, le très enthousiaste PDG de l'entreprise, qui tient tout de suite à préciser : « Le coeur de notre activité reste la fabrication de charcuterie fine de pure tradition française, au plus près des recettes. Tout est fait à la main. »

Cet ingénieur agronome féru de bonne chère s'est associé avec Jean-Paul Baurez, un chef international, et à Roland Pignol, un charcutier, tous deux expatriés à Séoul pour fonder France Gourmet. Un an après sa création, la PME est parvenue à l'équilibre financier et emploie trois salariés. Elle est la seule société artisanale à produire en Corée de la charcuterie française - jambon, pâté au cognac, rillettes, etc. - avec des produits locaux et pour le marché local.

« Les gens veulent de l'authentique »

Le défi était de taille dans un pays où la plupart des habitants sont encore très peu familiers avec de tels produits : un saucisson offert à des amis coréens mal informés peut très vite se retrouver cuit au barbecue... Mais l'intérêt pour la gastronomie étrangère ne cesse de croître.

« Les goûts sont en train d'évoluer. Les gens veulent de l'authentique, et il y a un attrait naissant pour la charcuterie, explique Romuald Pieters. Les grands groupes industriels locaux commencent d'ailleurs à investir à leur tour dans la charcuterie. »

Produire en local permet de fabriquer des aliments frais et d'éviter les (nombreuses) tracasseries douanières en matière d'importation de salaisons.

« Ils ont un excellent rapport qualité-prix. Leur jambon coûte la moitié du prix des autres produits importés. Et c'est de la vraie viande, pas de la farine », confirme un hôtelier qui travaille pour un établissement cinq étoiles à Séoul.

Lors de sa création, France Gourmet visait le marché des expatriés et des Coréens qui ont voyagé à l'étranger et appris à aimer des saveurs différentes. Mais la PME ambitionne désormais de toucher une clientèle beaucoup plus large. Pour cela, toute une éducation reste à faire :

« Nous participons à des événements de goût et de démonstration, ou des foires. Les gens sont très curieux, ils me demandent comment nos produits se mangent. »

Après avoir constaté que des boulangeries françaises en Corée se faisaient copier leurs recettes par des employés qui allaient ensuite ouvrir leur propre magasin, Romuald Pieters se montre intraitable : le coeur de l'atelier est réservé à son artisan charcutier.

« C'est top secret ! Pas de visite, et appareils photos interdits. En Corée, dès qu'une activité a du succès, tout le monde veut faire pareil... »

Ici, les secrets de la chipolata et du saucisson sont mieux gardés que ceux de Samsung.