ESSAI AUTO Renault Fluence ZE : une routière électrique... pour la ville

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1224  mots
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Techniquement, la première voiture électrique de Renault est une réussite. Mais l'autonomie est limitée à 100 kilomètres. Et il faut huit heures pour recharger ! Cette familiale sera donc cantonnée aux parcours citadins. Paradoxal.

La Fluence Z.E. est la première voiture électrique de Renault. Depuis le temps qu'on en parlait... Les premières livraisons auront lieu en novembre. Extérieurement, il s'agit d'une Fluence rallongée de treize centimètres pour loger les batteries. Etiré, ce dérivé quatre portes de Mégane est plutôt plus harmonieux que la Fluence essence. La ligne est ainsi affinée. Mais la longueur est portée à 4,75 mètres. Ce qui en fait une voiture encombrante en ville. L'habitabilité est préservée (mais la garde au toit très limitée à l'arrière) et la finition se révèle fort correcte. Matériaux et assemblages ne sont pas critiquables. Renault a vraiment progressé. Seule réserve, de taille : un coffre largement amputé malgré l'allongement. Pour une familiale, il devient très réduit. Mauvais point.

Conduite en douceur

La conduite surprend tout de suite par... le silence. Evidemment, il n'y a aucun bruit de moteur, juste un sifflement, lancinant d'ailleurs et pas très agréable. Mais autrement plus discret que le vrombissement d'un moteur thermique. La voiture accélère bien, suavement, sans à-coups. Du coup, la conduite est détendue. A noter : un formidable frein moteur à la décélération. Si on l'utilise judicieusement, le recours au freinage s'en trouve réduit. Parfait. Les relances ne sont pas exceptionnelles. Il n'y a que l'équivalent de 95 chevaux et le véhicule est lourd. Au-dessus de 70-80 kilomètres à l'heure, il faut d'ailleurs nettement accélérer. Sinon, on reste à ces vitesses ! Mais, en-dessous, tout se passe sans presque qu'on s'en rende compte. La voiture s'insère normalement dans le trafic. Très « zen ». Le silence attire des signes de sympathie de la part des passants. Certes, l'absence de nuisances sonores côté moteur et de vibrations rend du coup beaucoup plus audibles les divers bruits de roulement. Ce n'est donc pas le silence absolu. Mais le nombre de décibels émis est très, très inférieur à celui d'un diesel...

Train avant un peu léger

La tenue de route est sécurisante pour les vitesses atteintes. Mais les 280 kilos de batteries, placés à l'arrière, pèsent sur le train arrière. Du coup, l'avant apparaît bien léger. Il procure une sensation de flottement dans les virages et en cas de trop forte accélération. Dans ces conditions, ledit train avant n'est guère précis. Mais, la Fluence Z.E. n'étant nullement une voiture de sport, ce n'est pas trop grave. Le confort est aussi un peu altéré par le poids. Les réactions sont plus sèches que sur une Mégane normale. Pas dramatique, toutefois.

Prix intéressant

Le prix est également une bonne surprise : 20.900 euros en version de base Expression, 21.900 en finition Dynamique. Des tarifs compétitifs, même s'ils prennent en compte la déduction de 5.000 euros généreusement accordée par l'Etat français aux voitures électriques... tant que les ventes sont confidentielles ! Après... Rien à voir avec les 35.000 euros réclamés pour une « mini » Peugeot Ion ! Oui, mais voilà : il faut ajouter un loyer mensuel de 82 euros pour les batteries, avec une assistance incluse pour 10.000 kilomètres par an, sur 36 mois. Soit 3.000 euros en trois ans. C'est de toutes manières beaucoup moins cher qu'une Nissan Leaf ! Renault affirme que le véhicule est compétitif, face à un diesel, si on fait 13.000 kilomètres par an. Le coût de l'électricité est en effet 5 à 10 fois moins élevé que celui de l'essence ou du gazole, selon les pays. La firme assure également que les coûts de maintenance sont de 20% inférieurs à ceux d'un modèle à gazole. Et, logiquement, une voiture électrique doit être en principe plus fiable. A condition qu'elle soit parfaitement au point. Mais, les constructeurs n'ont évidemment pas la même expérience dans le "zéro émission" que dans les véhicules thermiques, produits depuis plus de cent ans.

Autonomie limitée à 100 kilomètres

Tout ça serait très flatteur, si... Eh oui, notre enthousiasme retombe, au vu de l'autonomie ! En roulant normalement, sans dépasser le 90 à l'heure, sur des routes planes, sans climatisation, phares ou essuie-glaces, l'autonomie est limitée à... 100 kilomètres environ. Etant donné les difficultés de recharge, on commencera d'ailleurs à s'angoisser sitôt que la jauge descend au quart. Soit, donc, une autonomie réelle de 80 kilomètres à peine ! Et il faut... huit heures pour recharger ! Alors, là, on déchante complètement. La routière Fluence est donc cantonnée à une... utilisation urbaine. Paradoxe pour un modèle aussi gros ! Pour faire les 13.000 kilomètres par an afin que l'équation économique soit comptétitive, ça va être dur ! Alors ? En fait, la Fluence, produite en Turquie, n'est pas vraiment destinée à la France, mais à des petits pays à courtes distances comme Israël ou le Danemark. Pour un Français, cette Fluence « super-écologique qui ne pollue pas » ne sert donc pas à grand-chose ! Nous attendons avec impatience le quadricyle Twizy ou la petite Zoé, qui seront, eux, bien mieux adaptés à la vie citadine. L'utilitaire Kangoo (voir encadré) est également plus judicieux. Mais, malheureusement, cette Fluence, si séduisante et aboutie soit-elle techniquement, ne peut être recommandable à un particulier. Sauf à avoir une prise dans son garage, faire des petits trajets réguliers et disposer d'un deuxième véhicule... Dommage.

Modèle d'essai : Renault Fluence Z.E. Dynamique : 26.900 euros (-5.000 euros de bonus, + 82 euros de location des batteries par mois)

Puissance du moteur : 95 chevaux (équivalent, électrique)

Dimensions : 4,75 mètres (long) x 1,81 (large) x 1,46 (haut)

Qualités : silence, absence de vibrations, douceur générale, conduite détendue, pas de pollution

Défauts : AUTONOMIE RESTREINTE, train avant trop léger, suspensions durcies, coffre limité

Concurrente : Nissan Leaf : 35.990 euros (-5.000 euros de bonus)

Note : 15 sur 20 (agrément d'utilisation)
5 sur 20 (fonctionnalité au quotidien pour un particulier)

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Essai auto Renault Kangoo Z.E. : Intéressant pour des flottes

Avec des batteries soigneusement disséminées sous le plancher, le Kangoo jouit de la même surface de chargement que son équivalent à moteur diesel. Mieux que sur la Fluence, au coffre amputé! La conduite est également agréable, toujours très détendue et... silencieuse. Notre modèle d'essai, un châssis court de 4,21 mètres de long, ne souffrait pas des mêmes défauts que la Fluence. Ce véhicule se révèle plus équilibré et jouit d'une meilleure tenue de route, comparable au modèle thermique.

Le petit moteur équivalant à 60 chevaux est suffisamment vif pour un utilitaire. Et, ici, l'autonomie est moins anxiogène. Car le Kangoo s'adresse à des flottes sur des itinéraires réguliers. Lesdites entreprises peuvent diposer chez elles de prises pour recharger. Et, en-dehors des heures de travail, le temps de recharge n'est pas un problème. 

Dans le cadre d'une telle utilisation, ce véhicule apparaît vraiment révolutionnaire et utile. Pour La Poste, l'EDF... C'est l''idéal. Pas de bruit, pas de pollution. Bravo. Il en coûtera 15.000 euros hors taxes, bonus de 5.000 euros déduit, pour la petit Kangoo. En version allongée, comptez 16.200.  Il sera nécessaire, en outre, d'acquitter un loyer mensuel pour les batteries de 75 euros hors taxes sur 48 mois, assistance incluse.

A.-G.V.

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