Renault Latitude : Haut de gamme français ? Non, plutôt une brave grande berline !

Par latribune.fr  |   |  1240  mots
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La limousine tricolore fabriquée en Corée apparaît comme une honnête familiale. Mais elle n'est pas assez raffinée techniquement et esthétiquement pour rivaliser avec les Audi ou Volvo.

Elle aura fait couler beaucoup d'encre. Attendue, non sans sarcasmes, pour remplacer la très osée Vel Satis, cette grande Renault en prend l'exact contre-pied. Autant la première était originale jusqu'à la caricature, autant la Latitude est sage, voire banale. Alors, cette limousine est-elle le haut de gamme français qu'on attendait ? Clairement, non ! Il s'agit d'une vaste familiale classique à quatre portes, pas désagréable du tout mais essentiellement dessinée... pour l'Asie. Logique : elle est produite à Pusan dans la filiale coréenne du groupe au losange, Renault-Samsung. Malgré sa grande taille, elle rivalise plutôt avec les Peugeot 508 ou Volkswagen Passat de la catégorie moyenne supérieure qu'avec les très huppées BMW 5 ou Audi A6. Elle n'est pas assez raffinée, techniquement ou esthétiquement, pour se battre avec les belles allemandes, ou suédoise type Volvo S80.

Banale mais plaisante

Le cocktail n'est pas déplaisant. Les lignes sont équilibrées et l'intérieur présente bien, avec des assemblages soigneusement réalisés comme sur une... coréenne ou une japonaise. Seulement, voilà : à force de neutralité, la Latitude n'a aucune personnalité, à l'image des Nissan Maxima ou Toyota Camry nippones jadis importées en Europe occidentale. A l'intérieur, c'est pareil. Bien présenté, avec des assemblages rigoureux, l'habitacle recèle des plastiques ordinaires... comme sur la plupart des berlines coréano-nippones. La planche de bord inédite offre même des matériaux un peu moins cossus que... sur une Laguna. Le comble ! Les placages en faux bois piano ne sont pas non plus très valorisants. Rien à voir avec une allemande de haut de gamme. Evidemment, le prix n'est pas le même. Mais, la Latitude n'a pas à rougir pour autant face aux familiales des constructeurs généralistes (Peugeot, Opel, Ford...). Déplorons au passage que la firme au losange ait conservé la colonne de direction trop basse de la Laguna. Du coup, le haut des cadrans est caché par la jante du volant. Pour peu que l'on règle le siège conducteur en hauteur. On ne voit pas les chiffres des vitesses. Pas malin. Bref, tout ça est globalement honnête, mais sans éclat. Avec quelques erreurs ergonomiques. Le GPS est aussi complexe.

Insonorisation un rien négligée

L'ex-Régie a également un peu négligé l'insonorisation. Les coréens étant habitués au bitume lisse de leur routes, ils n'entendent pas les crissements de mobilier intérieur sur chaussée dégradée. Le problème, c'est que, sur nos départementales bosselées, ça crisse un chouïa. Rien de grave, mais pour un... haut de gamme, c'est embêtant ! Les bruits de roulement sont aussi présents. Mais, nous n'avons heureusement pas retrouvé les fâcheuses résonances en provenance des passages de roues que nous avions relevées sur une version V6 dCI essayée il y a quelques mois.

Habitabilité moyenne

L'habitabilité est meilleure qu'à bord d'une Laguna - ce n'était pas difficile -, avec un grand coffre... a priori. Mais les places arrière pourraient réserver davantage d'espace pour les grands gabarits. Et le coffre pâtit de recoins peu fonctionnels, qui en limitent le volume utile. En outre, les tôles apparentes dans ledit coffre sont peu admissibles à ce niveau de gamme. A noter en revanche quelques bons points, comme l'accoudoir central avant coulissant ou le siège conducteur électrique, qui recule de lui-même quand on coupe le moteur, pour assurer une meilleure descente et remontée à bord.

Conduite placide

La conduite ne réserve pas de mauvaise surprise. Ni de très bonne non plus, d'ailleurs. Le train avant de la Laguna combiné à un arrière emprunté à Nissan donne des prestations satisfaisantes. Avec une souplesse de suspensions à la coréenne. Mais, Renault a malencontreusement monté des pneus « sport » avec de grandes jantes et des enveloppes larges et à flancs très bas. Histoire de faire « mode ». Du coup, le résultat est contradictoire, manquant d'homogénéité. La voiture n'est toujours pas très précise à conduire, mais elle n'est pas non plus confortable sur les inégalités de la chaussée. Avec ses suspensions assez lâches, la Latitude trépide en tous sens sur les pavés ou les routes abîmées. Conseillons à Renault de revenir à des jantes et des pneus plus raisonnables qui, au moins, préserveront le confort, alors même que la voiture n'a rien de sportif.

Moteur sympa, boîte auto beaucoup moins

Après la puissante version six cylindres de 240 chevaux essayée précédemment, qui émet une sonorité grave agréable et distille des performances séduisantes, voici la version plus modeste à quatre cylindres et 175 chevaux. Ce moteur, beaucoup moins noble, suffit à sa tâche et nous le recommandons, vu la différence de prix substantielle (4.800 euros). Ce que nous aimons moins, c'est la transmission automatique ! Renault est en retard sur ce plan. Sans position « S », cette boîte est certes très douce, mais elle manque de réactivité. Il faut freiner fort avant un virage pour qu'elle rétrograde. On est vite deux à trois rapports trop haut. Cette transmission insuffisamment intelligente obère le plaisir de conduite. Sur route sinueuse et à plus forte raison montagneuse, il faut recourir à un maniement manuel. Bof ! L'efficacité et l'agrément n'ont rien à voir avec ceux d'une boîte à double embrayage Volkswagen ou Ford. La transmission automatique classique de BMW ou PSA est aussi plus plaisante. Les consommations ne se révèlent pas non plus très économiques (9,6 litres aux cents en moyenne). Infiniti, marque de luxe de l'allié Nissan, offre une position « S » sur cette transmission. Alors, c'est donc possible ?

Cher pour une Renault

Le prix de base (33.000 euros en version dCi 150 Business) est compétitif. Mais, notre modèle en finition de pointe Initiale avec cuir, réglages électriques en tous sens, sièges chauffants (et confortables), caméra de recul, GPS, phares tournants et des gadgets futiles comme le diffuseur de parfum ou les sièges massants ( !) vaut 40.700 euros. Avec 750 euros de malus en prime. C'est franchement cher pour une Renault. Et on ne voit pas très bien au final à qui elle s'adresse. Les notables et pouvoirs publics contraints de rouler français hésitent devant une voiture dont tout le monde finit par savoir qu'elle est « made in Korea ». Et les amateurs de belles autos luxueuses préféreront payer plus cher pour une allemande ou une Volvo, plus flatteuses et abouties. Pour ceux qui se laisseraient toutefois séduire par cette voiture sage, sans aspérités, un conseil : vu la décote, achetez une... belle voiture d'occasion pour pas trop cher ! Précisons que la qualité-fiabilité des voitures produites par la filiale Renault-Samsung jouit d'une solide réputation. Et le réseau après-vente du losange en France est également renommé.

Alain-Gabriel Verdevoye

Modèle d'essai : Renault Latitude dCI 175 Initiale : 40.700 euros (+750 euros de malus)

Puissance du moteur : 175 chevaux (diesel)

Dimensions : 4,90 mètres (long) x 1,83 (large) x 1,48 (large)

Qualités : moteur agréable, prestations routières correctes, équipement fourni, sièges confortables, présentation honnête

Défauts : Lignes et intérieur quelconques, comportement mollasson, monte pneumatique trop ferme, boîte auto peu réactive, détails d'ergonomie

Concurrentes : Opel Insignia 2,0 CTDi Cosmo Pack bva : 34.950 euros ; Peugeot 508 HDi 163 Féline bva : 36.850 euros; Volvo S80 D3 Summmum Geartronic : 42.850 euros

Note : 12,5 sur 20