Voitures électriques : Biden passe à la vitesse supérieure pour "dépasser la Chine"

Par latribune.fr  |   |  843  mots
Joe Biden veut qu'en 2030, la moitié des voitures vendues aux Etats-Unis soient sans émissions, c'est-à-dire électriques, hybrides rechargeables ou à hydrogène, selon le document rendu public par la Maison Blanche. Il doit signer un décret en ce sens ce jeudi. (Crédits : Reuters)
Pour rattraper le retard sur la Chine et les Européens, le président des Etats-Unis dévoile ce jeudi un plan de soutien au secteur automobile qui fixe comme ambition qu'au moins la moitié des véhicules qui seront vendus en 2030 soit sans émissions. Constructeurs, syndicats et associations environnementales saluent l'initiative en attendant les modalités concrètes. Reste aussi à convaincre les automobilistes américains.

En dévoilant jeudi son plan pour accélérer l'évolution du parc automobile aux Etats-Unis vers les modèles électriques, Joe Biden entend répondre à la fois aux considérations environnementales ce qui va se traduire par une législation plus restrictive mais aussi répondre à la concurrence accrue des constructeurs européens et chinois. Dans ce domaine aussi, le président américain opère une tournant à 180 degrés par rapport à son prédécesseur, Donald Trump, qui faisait fi des considérations environnementales et de la lutte contre le réchauffement climatique.

L'initiative a d'ailleurs été saluée comme un "signal important" par les organisations environnementales même si certaines attendent de de connaître les modalités de sa mise en œuvre pour y adhérer.

"Faire face à la crise climatique"

Concrètement, Joe Biden veut qu'en 2030, la moitié des voitures vendues aux Etats-Unis soient sans émissions, c'est-à-dire électriques, hybrides rechargeables ou à hydrogène, selon le document rendu public par la Maison Blanche. Il doit signer un décret en ce sens ce jeudi.

Le président entend "mettre l'Amérique en position de mener l'avenir de la voiture électrique, de dépasser la Chine" qui investit, produit et vend déjà à marche forcée, "et de faire face à la crise climatique." Les ventes de voitures électriques représentaient 3% des ventes totales dans le pays en mai et juin.

Les trois grands constructeurs américains, Ford, GM et Stellantis (qui a intégré la marque historique Chrysler) affirment dans un communiqué publié conjointement leur "ambition commune d'arriver en 2030 à 40 à 50%" de véhicules de ce type vendus chaque année aux Etats-Unis. De leur côté, les constructeurs BMW, Honda, Volkswagen, et Volvo, souvent considérés comme plus avancés en matière électrique que les grands noms de Detroit, berceau de l'industrie automobile américaine, "applaudissent" l'initiative, dans un communiqué commun.

 Le président américain, toujours soucieux de promettre "des emplois bien payés et syndiqués", a aussi rallié à sa cause le puissant syndicat UAW. "Les membres de l'UAW sont prêts à construire ces voitures, ces camions électriques et les batteries qui vont avec. Nos membres sont l'arme secrète de l'Amérique pour gagner cette course mondiale", s'enthousiasme son président Ray Curry, lui aussi cité dans la communication de la Maison Blanche.

Biden oublie Tesla

Si ce chiffre de 50% ne va pas bien au-delà de ce que nombre de constructeurs envisagent déjà, la marche est néanmoins haute pour les Etats-Unis, même si le pays est le berceau de Tesla, incontestablement la grande vedette mondiale de la voiture électrique. Déjà entièrement dédié aux véhicules verts, le groupe d'Elon Musk n'a d'ailleurs pas été mentionné par la Maison Blanche.

Mais les constructeurs traditionnels comme les automobilistes américains ont tardé à se convertir, par rapport à leurs homologues chinois ou aux européens. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), en 2020, les véhicules électriques ne représentaient aux Etats-Unis que 2% des ventes de voitures neuves - contre 10% en Europe. Même en retard, GM, Ford et Stellantis ont toutefois déjà mis l'accent ces derniers mois sur l'électrique, promettant des versions vertes de modèles populaires comme le pick-up F150 de Ford.

La prochaine étape est désormais de construire un réseau solide de bornes de recharge, dont le financement dépend en grande partie du plan d'infrastructures en discussion au Parlement d'un montant de 7,5 milliards de dollars, estime Jessica Caldwell du cabinet Edmunds. Et "le plus grand obstacle" est sans doute de convaincre les Américains de passer à l'électrique, ajoute-t-elle.

De son côté, l'organisation environnementale Sierra Club, qui voit dans l'initiative du président "un signal important", aurait préféré un objectif à 60% de véhicules électriques vendus en 2030.

Durcissement de la réglementation sur les carburants

Autre décision importante, Joe Biden, qui, pour détailler ces mesures, organise ce jeudi un événement sur les pelouses de la Maison Blanche, entend aussi durcir à nouveau la réglementation sur la consommation de carburant. La réglementation actuelle sur les émissions, qui date de mars 2020, demande aux fabricants d'améliorer de 1,5% par an la performance énergétique de leurs modèles, c'est-à-dire la distance parcourue avec une unité de carburant, entre les années 2021 et 2026 - contre 5% exigés par l'administration Obama. Dans l'immédiat, l'administration Biden n'a pas dévoilé le nouvel objectif chiffré.

C'est un point qui inquiète l'ONG environnementale NRDC, qui tout en saluant l'initiative remarque qu'elle est moins ambitieuse que sous Obama. Au vu de l'urgence climatique, ce qui importe, selon l'organisation, est de voir les promesses annoncées se transformer rapidement en normes concrètes et contraignantes.

Il en va de même pour le groupe d'experts Union of Concerned Scientists, qui craint que l'annonce ne soit "discrètement minée par des échappatoires, des crédits et des allocations - des cadeaux inutiles aux constructeurs automobiles qui pourraient rendre les normes plus faibles et moins efficaces".