Les médicaments sans ordonnance, axe majeur de plusieurs big pharmas

Pfizer envisage de vendre son activité de médicaments sans ordonnance, ce qui suscite l'intérêt de plusieurs big pharmas. Malgré une valeur ajoutée moins importante que les médicaments dits innovants, l'automédication reste un axe important pour plusieurs sociétés pharmaceutiques.
Jean-Yves Paillé
Pfizer envisage de céder son activité de médicaments sans ordonnances, qui comprend notamment l'ibuprofène Advil.

A l'heure des investissements massifs en oncologie et de la ruée vers la médecine personnalisée, Pfizer souhaite, à l'instar de Merck KGaA, recentrer ses activités. Il prévoit de mettre en vente son activité de médicaments sans ordonnance (OTC) en novembre. Celle-ci génère 3,4 milliards de dollars par an de chiffre d'affaires grâce aux ventes d'anti-douleurs, de compléments alimentaires et de médicaments contre les problèmes gastro-intestinaux, entre autres.

Une vente potentielle à 20 milliards de dollars

Une multitude de sociétés seraient intéressées par un rachat de cette activité, rapporte Reuters. La preuve que les ventes de médicaments sans ordonnance restent un enjeu majeur dans le secteur. Parmi les prétendants au rachat, on retrouve Reckitt Benckiser, Procter & Gamble (P&G) et trois big pharmas : Johnson & Johnson, Sanofi et GSK. Tant et si bien que cette vente pourrait rapporter jusqu'à 20 milliards de dollars au géant pharmaceutique américain, grâce à des candidats prêts à faire monter les enchères, estime Reuters.

GSK est la première société à avoir montré officiellement un vif intérêt pour l'activité "santé grand public" de Pfizer. Les OTC représentent une de ses priorités, même si le laboratoire britannique dit miser avant tout sur des traitements innovants à forte valeur ajoutée. La société a créé une coentreprise de médicaments sans ordonnances avec Novartis en 2015. Le chiffre d'affaires de cette joint-venture atteint 7,2 milliards de livres sterling (plus de 8 milliards d'euros) en 2016., et connait une croissance de 9%. Emma Walmsley, qui dirigeait cette activité, est devenue la patronne de GSK, fin mars 2017,  signe de l'importance stratégique de cette activité pour le laboratoire britannique.

Sanofi, dans son plan quinquennal présenté en novembre 2015, a, lui, fait des médicaments sans ordonnance un de ses axes prioritaires, évoquant un "domaine à fort potentiel de croissance". Il a cédé cette année-là son activité "santé animale" (malgré une solide croissance de 6,7% en 2014) pour 11,4 milliards d'euros à l'allemand Boehringer Ingelheim, et racheté à ce dernier son activité "santé grand public" pour 6,7 milliards d'euros.

Un secteur à la croissance solide

Malgré la pression sur les prix, le marché des médicaments en vente libre ne connait pas la crise. Le cabinet IMS Health estime la croissance annuelle des OTC à 5%, à 111 milliards de dollars, ce qui représente autour de 20% du marché pharmaceutique mondial. Le chiffre d'affaires des médicaments sans ordonnance devrait croître de plus de 6% chaque année jusqu'en 2020, indique un rapport de Research and Markets.

Cette dynamique est portée par les pays émergents, dans lesquels la croissance des ventes de médicaments grands publics est plus forte que celle des traitements prescrits. Egalement, comme l'explique le rapport de Research and Markets, l'automédication est amenée à croître dans les pays développés. Elle devrait être dopée par le vieillissement de la population et les déremboursements destinés à alléger certaines dépenses des systèmes de santé accroît le nombre de médicaments sans prescription sur le marché. En France par exemple, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS 2018) prévoit 180 millions d'euros d'économies pour l'Assurance-maladie, suite à des réévaluations de la Haute autorité de santé, a annoncé la ministre de la Santé Agnès Buzyn , fin septembre.

Lobbying de l'industrie pour l'automédication

Tous les déremboursements de médicaments n'effraient pas les laboratoires. Ces derniers font même campagne pour l'automédication au niveau européen, et notamment en France avec une organisation appelée l'Afipa. Celle-ci milite pour que 173 molécules associées à 66 indications passent en vente libre, et ne soient donc pas couvertes par l'Assurance maladie. Dominique Giulini, patron de l'Afipa et également président France et Afrique francophone de GSK santé grand public assurait à La Tribune ne pas craindre une baisse de la consommation de ces médicaments. Les chiffres lui donnent raison : en 2016, l'automédication a dopé la croissance des pharmacies françaises, expliquait une étude d'Open Health.

Avec 15,4% des volumes de médicaments vendus, la pratique reste encore peu diffusée en France par rapport à des pays comme l'Allemagne ou le Royaume-Uni. Elle connait néanmoins une croissance des ventes en valeur de 3,9%, à 7,016 milliards d'euros dans l'Hexagone, selon l'Afipa, alors que l'ensemble du marché du médicament a crû de 3% sur la même période, d'après le Leem.

Jean-Yves Paillé

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