Ségur de la santé : ce texte est une "déception énorme" fustige le rapporteur du Sénat

Par Véronique Martinache, AFP  |   |  666  mots
L'avis, très sévère, du rapporteur LR Alain Milon est clairement soutenu par le groupe PS qui demande le renvoi du texte en commission, pointant "une proposition de loi sans fil conducteur", qui "n'est qu'une tentative, incomplète, d'assemblage de mesures mal articulées entre elles". (Crédits : Reuters)
Le texte issu de la concertation engagée cet été par le gouvernement pour sauver le système hospitalier arrive ce mercredi en première lecture au Sénat. Après avoir auditionné des représentants des différentes professions de santé et des usagers, le rapporteur LR Alain Milon affiche sans langue de bois son "insatisfaction totale" face à "un texte brouillon, qui aborde beaucoup de sujets très importants actuellement pour la santé, et qui en fait ne les traite pas"...

"Pas à la hauteur", "sans fil conducteur": c'est avec un regard très critique que le Sénat va entamer mercredi l'examen en première lecture d'une proposition de loi LREM portant plusieurs mesures promises dans le cadre du "Ségur de la santé", notamment sur l'organisation de l'hôpital.

Une "déception énorme et une insatisfaction totale"

"C'est un texte brouillon, qui aborde beaucoup de sujets très importants actuellement pour la santé, et qui en fait ne les traite pas", a déclaré à l'AFP le rapporteur LR Alain Milon.

"Il y a une déception énorme et une insatisfaction totale sur ce texte", ajoute le rapporteur qui a auditionné des représentants des différentes professions de santé et des usagers.

La gauche fustige la "vision budgétaire et managériale"

À gauche, le texte sera accueilli par deux motions de procédure. L'une demandant son rejet en bloc, portée par le groupe CRCE à majorité communiste, pour qui il s'inscrit "dans la continuité des lois réorganisant les établissements de santé au profit d'une vision budgétaire et managériale, au détriment de la qualité des soins et des conditions de travail des personnels".

Une autre motion portée par le groupe PS demande le renvoi du texte en commission, pointant "une proposition de loi sans fil conducteur", qui "n'est qu'une tentative, incomplète, d'assemblage de mesures mal articulées entre elles".

Adoptée en première lecture début décembre par les députés, la proposition de loi portée par Stéphanie Rist (LREM), qualifiée de "projet de loi gouvernemental déguisé" par le CRCE, a déjà connu un parcours laborieux à l'Assemblée nationale. Certaines de ses dispositions ont été vidées de leur contenu face aux critiques du monde de la santé et d'autres retoquées ou largement remaniées dans l'hémicycle.

Le texte est censé répondre, en partie du moins, aux promesses non financières du "Ségur", accords signés en juillet à l'issue d'une concertation lancée après la première vague de l'épidémie de Covid-19 qui avait mis au jour les grandes difficultés du quotidien des soignants.

Olivier Véran contesté par le rapporteur

À l'Assemblée, le ministre de la Santé Olivier Véran a salué "une pierre supplémentaire à l'édifice du Ségur".

"Le système de santé a besoin d'oxygène et le texte n'apporte que de l'azote", déplore de son côté, caustique, le rapporteur.

En commission, les sénateurs ont adopté un texte largement remanié et supprimé 10 articles sur 37. C'est notamment le cas de l'article 1er, qui proposait initialement la création d'une "profession médicale intermédiaire", mais a été "vidé de toute portée" par les députés. Il n'en restait qu'une demande de rapport.

Supprimé également l'article prévoyant l'intervention de bénévoles à titre individuel dans les établissements publics et privés de santé, en dehors du cadre associatif.

Les sénateurs ont encore supprimé la disposition visant à permettre au directeur d'hôpital de consulter le fichier national de déclaration à l'embauche, pour contrôler "le cumul irrégulier d'activités" des médecins, estimant qu'il présentait "une atteinte disproportionnée à la protection de la vie privée".

Tout en saluant les dispositions valorisant le rôle du chef de service et associant plus étroitement le personnel médical à la gestion de l'établissement, la commission a déploré d'"importantes lacunes", notamment l'absence de mesures relatives au personnel paramédical.

Les sénateurs ont ainsi adopté en commission un amendement tendant à garantir aux personnels paramédicaux une meilleure représentation.

Dans le contexte de crise sanitaire, l'exécutif s'était porté l'été dernier au chevet du système hospitalier avec le Ségur de la Santé, qui a abouti à une enveloppe de 8,2 milliards d'euros de revalorisation salariale ainsi que 15.000 embauches. A cela s'ajoute la reprise de la dette hospitalière à hauteur de 13 milliards d'euros.