Nucléaire : le paysage français en voie de recomposition

Par latribune.fr  |   |  595  mots
Le conglomérat allemand Siemens va mettre fin à son partenariat avec Areva en cédant les 34% dont il dispose dans la filiale de réacteurs Areva NP. Cette annonce fait le jeu d'Alstom, qui lorgne toujours sur le géant français du nucléaire. Mais Total est en embuscade pour s'immiscer sur le marché.

Coup de théâtre dans le secteur nucléaire, Siemens va divorcer d'Areva. Présent au capital de la filiale de réacteur Areva NP, le conglomérat allemand a décidé de vendre sa participation de 34%, faute de pouvoir l'augmenter. Siemens, qui ne cache pas ses ambitions dans le nucléaire, était encore "satisfait de sa bonne relation avec Areva" en septembre, selon les déclarations de son président Peter Löscher aux "Echos" à l'époque.

Alors que s'est-il passé? Siemens souhaitait accroître sa part de capital dans Areva NP, l'activité de production de réacteurs nucléaires, selon son directeur France Philippe Carli, afin de mieux maîtriser le développement du groupe. Mais il semble que Paris ait fait la sourde oreille et la situation serait devenue intenable pour le groupe allemand. En effet, selon le quotidien, Areva dispose d'une option d'achat sur la participation de Siemens et selon les modalités de leur partenariat, le Français peut unilatéralement décider de l'exercer tous les ans, au 30 janvier. Il semble donc que Siemens a décidé de se retirer de l'alliance, plutôt que d'investir des milliards sans garantie de peser sur la stratégie du groupe.

C'est la fin d'une belle réussite du couple franco-allemand qui s'annonce. Certes, une clause du pacte interdit désormais à Siemens de concurrencer Areva dans le secteur nucléaire pendant huit ans, mais la chancelière Angel Merkel aurait déjà tenté de voir si cette clause était renégociable, d'après "Les Echos".

Une chose est sûre, Areva va avoir besoin d'un nouveau partenaire pour financer son développement. Mais avant, le français va racheter la participation de Siemens dans Areva NP pour environ 2 milliards d'euros.

Alstom et Total sur les rangs

Le départ de Siemens donne donc une nouvelle opportunité à Alstom d'entrer au capital d'Areva, ce qu'il souhaite depuis longtemps. Mais Anne Lauvergeon, la présidente du groupe nucléaire, aurait aussi étudié la possibilité d'une union avec le champion français du parapétrolier Technip, sans succès, mais elle pencherait surtout en faveur d'un rapprochement avec le groupe pétrolier Total, très intéressé par le nucléaire ces derniers temps.

Total s'intéresse de plus en plus à l'après pétrole. Pour cette raison, le géant français s'est associé à GDF Suez dans le projet de construction du nouveau réacteur nucléaire de troisième génération (EPR). Le premier prototype est actuellement en cours de construction à Flamanville (Manche), sous la responsabilité du mastodonte EDF. Mais l'alliance GDF Suez/Total aimerait bien lui souffler le second.

Si EDF entend conserver son monopole sur le nucléaire civile, ses concurrents ont des arguments notables, comme le faisait remarquer "Le Figaro" dans son édition de vendredi. Fort de sa filiale belge Electrabel, l'opérateur historique du nucléaire en Belgique, GDF Suez estime qu'il n'a pas de problème de compétences et encore moins de sécurité dans le domaine. Et si le développement de Total dans cette source d'énergie doit nécessairement passer par une phase d'apprentissage, le groupe pétrolier dispose d'une surface financière importante, qui lui permet de mener à bien des projets industriels d'envergure.

La bataille entre les différents groupes énergétiques français s'annonce serrée sur le sujet du nucléaire, à tel point que le "Figaro" n'exclut pas que l'Etat annonce le lancement de deux réacteurs EPR supplémentaires, pour ne pas avoir à départager EDF de GDF Suez/Total.