La marée noire touche les bayous de Louisiane et menace la Floride

Par latribune.fr  |   |  628  mots
La marée noire a atteint la Louisiane et ses bayous. "Je pense que l'impact sur l'environnement de ce désastre sera très, très modeste", estime pourtant le directeur général de BP. La nappe de pétrole se dirige aussi vers la Floride et menace la troisième barrière de corail du monde.

"Je pense que l'impact sur l'environnement de ce désastre sera très, très modeste". Voila le genre de déclaration qui ne devrait pas calmer la polémique. Elle est l'oeuvre de Tony Hayward, directeur général de BP, la compagnie pétrolière britannique exploitant la plateforme Deepwater, qui a sombré le 22 avril dernier suite à une explosion et qui déverse chaque jour près d'un million de litres de pétrole, voire beaucoup plus selon de nombreux experts.

Du brut lourd provenant de la marée noire dans le golfe du Mexique a même atteint les bayous de Louisiane, a annoncé mercredi le gouverneur de cet Etat, Bobby Jindal. "Le jour que nous redoutions tous est arrivé", a dit Jindal à l'issue d'une inspection en bateau de l'extrémité sud de l'estuaire du Mississippi. "Ce n'était pas des boulettes d'hydrocarbure (...) C'est du brut lourd dans nos marais", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Venice, en Louisiane. "C'est déjà là, mais nous savons qu'il en arrive davantage".

Les autorités avaient auparavant signalé la présence de "débris de pétrole" sous la forme de boulettes de brut ou d'une pellicule irisée atteignant des sections étendues de la côte en Louisiane, dans le Mississippi et en Alabama. Jindal a souligné que les bayous de Louisiane constituaient "la nursery du golfe" où se développent la faune et la flore et qui protègent la côte contre l'érosion. Il a lancé un appel au corps de Génie de l'armée pour qu'il accorde un permis de construction de 128 km de digues de sable afin de protéger la côte de Louisiane de dégâts supplémentaires. Ce projet, d'un coût de 350 millions de dollars, a été reporté en dépit des efforts déployés par l'Etat et par les autorités du comté de Plaquemines pour répondre aux exigences de l'armée, a-t-il dit.

Des équipes sont prêtes à entreprendre la construction du réseau de digues dès que la permission sera accordée, a-t-il ajouté. "Tout ce que cette couche de pétrole a recouvert mourra. Il n'est pas possible de la nettoyer (...) J'en ai la nausée", a confié le gouverneur.

Jusqu'à maintenant, seules quelques galettes de pétrole avaient touché les côtes américaines, notamment parce que les autorités avaient décidé d'augmenter le débit du fleuve Mississippi en détournant des dizaines de canaux afin de repousser le pétrole des rivages. Mais la marée noire qui se propage dans le Golfe du Mexique a été happée par un puissant courant marin, qui la dirige vers la Floride. Plus précisément vers l'archipel des Keys, zone touristique qui abrite surtout la troisième barrière de corail du monde.

Au large, BP cherche toujours à colmater la fuite. La compagnie britannique a ainsi entrepris l'installation d'un tube relié à un pétrolier qui lui permet actuellement de récupérer plus de 2.000 barils par jour. Cela représente environ 40% des 800.000 litres qui s'échappent quotidiennement des puits endommagés. Mais plusieurs experts jugent cette estimation sous-évaluée et parlent d'une quantité cinq à vingt fois plus importante.

De fait, d'énormes nappes de pétrole ont été découvertes ce week-end en profondeur par des scientifiques de plusieurs universités américaines. Ces nappes sont épaisses d'une centaine de mètres et s'étendent sur 16 km de long et sur 5 km de large. Elles ont provoqué une baisse de 30% de la quantité d'oxygène dans la zone, menaçant de tuer la majorité de la faune marine dans "les deux mois", indiquait une scientifique interrogée par le New York Times.