Total, concentré sur deux mégaprojets de gaz, reste à l'écart du pétrole russe

Par Marie-Caroline Lopez  |   |  432  mots
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Engagée dans des projets gaz ambitieux, la major française n'a pas encore trouvé les « opportunités » désirées dans le pétrole.

Officiellement, Total reste actif sur le dossier russe. « Bien sûr que nous discutons avec Rosneft, comme nous dialoguons avec toutes les compagnies bien implantées, disposant d'actifs intéressants. Nous discutions avec Rosneft avant son accord avec BP, nous avons discuté après et nous allons continuer », déclare Mike Borrell, directeur Europe continentale et Asie centrale à l'exploration & production chez Total.

En interne, le discours est plus nuancé. « Ce deal avec Rosneft dans l'Arctique n'était pas une priorité pour Total, qui a d'ailleurs à peine regardé le dossier », affirme une source proche. La major française n'est pourtant pas insensible au vaste potentiel, encore largement inexploré, de l'Arctique, mais elle reste prudente. Les prévisions de Total sur les réserves de cette zone sont d'ailleurs inférieures à celles de l'agence américaine US Geological Survey, qui les estime à 22 % des ressources mondiales de gaz et de pétrole encore à découvrir et techniquement récupérables.

Le manque d'empressement de Total s'explique également par le coût futur de ce pétrole. Enfoui sous une couche de glace présente dix mois sur douze, très loin des zones de consommation, ce brut sera très cher à extraire. « Ces réserves d'hydrocarbures figurent parmi les plus difficiles et les plus coûteuses à développer », souligne un analyste parisien.

Sans compter que Total est déjà engagé dans deux mégaprojets de gaz en Russie avec le géant Gazprom et le producteur indépendant Novatek. Total détient aux côtés du premier 25 % du projet d'exploitation du gisement géant de Shtokman, en mer de Barents, dont le budget est estimé entre 20 et 40 milliards de dollars. La décision finale d'investissement, attendue depuis trois ans, est désormais prévue pour la fin 2011. La major française a par ailleurs déboursé 4 milliards de dollars en mars dernier pour acheter 12 % de Novatek et s'est engagée à entrer à hauteur de 20 % dans son projet d'exploitation de gaz de la péninsule de Yamal, dont le coût est évalué entre 20 et 35 milliards de dollars.

« On en a déjà beaucoup dans l'assiette », résume-t-on chez le pétrolier français. Soucieux d'équilibrer son risque, Total estime son portefeuille russe déjà bien garni. Le pétrolier français n'a d'ailleurs pas toujours été en retrait par rapport au pétrole russe puisqu'il avait signé en 1995 le premier « purchase sharing agreement » (accord de partage de production) onshore du pays pour le gisement de Kharyaga qu'il exploite depuis 1999 à 60 km au nord du cercle polaire, associé aux russes Zarubezhneft et Nenets Oil Company.