Les étranges déboires de BP en Russie

Les déboires se succèdent en Russie pour le pétrolier britannique, qui négocie la vente de sa filiale à parité avec le consortium russe Alfa Access-Renova (AAR), TNK-BP. Après avoir reçu une amende de 3,1 milliards de dollars par un tribunal russe, BP vient d'être privé d'un milliard de dividendes. Un moyen de pression pour une sortie rapide de BP qui devrait trouver un accord avec le groupe public Rosneft.
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Le pétrolier britannique BP, qui a publié mardi de très mauvais résultats au deuxième trimestre avec une perte nette de 1,39 milliard de dollars, accumule ces derniers mois les mauvaises nouvelles. Alors qu'il n'a pas encore conclu un règlement à l'amiable avec les autorités américaines sur la gigantesque marée noire dans le golfe du Mexique qu'il a provoqué, le groupe vient d'être privé d'un milliard de dollars de dividendes qu'il réclamait sur les bénéfices de sa filiale TNK-BP, qu'il possède à parité avec ses coactionnaires russes regroupés sous le holding Alfa Access-Renova (AAR). Pourtant, les deux actionnaires de TNK-BP ont reçu plus de 34 milliards de dollars de dividendes depuis la formation de la société en 2003.

Les quatre milliardaires avec lesquels BP a déjà eu de nombreux litiges au cours des quinze dernières années, ont jugés le versement supplémentaire de dividendes inopportun, avançant "une situation incertaine sur les marchés" et des "problèmes de gouvernance d'entreprise au sein de TNK-BP". Vendredi, BP s'est vu en outre infliger une amende faramineuse de 3,1 milliards de dollars par un tribunal d'arbitrage sibérien, en faveur d'un actionnaire minoritaire de TNK-BP.

Moyens de pression sur BP

 

Ces déboires interviennent alors que BP annonce mener des négociations pour la vente de ses 50 % de TNK-BP. Deux prétendants sont en lice : le pétrolier étatique Rosneft (qui semble résolu à racheter 100 % du groupe) et... AAR, qui prétend uniquement à un paquet de 25 %. Les nouveaux problèmes de BP en Russie sont largement interprétés par les observateurs comme un moyen de pression sur le pétrolier britannique en vue d'un désengagement rapide et d'une réduction de ses prétentions financières sur la transaction.

 

Les relations entre AAR, BP et Rosneft ont tourné au conflit l'an dernier lorsque les premiers ont torpillé par l'intermédiaire de la justice britannique une vaste alliance entre BP et Rosneft pour l'exploration de pétrole en zone Arctique. AAR estimait que TNK-BP avait un droit prioritaire pour participer au projet arctique. "Il est certainement intéressant pour BP de sortir complètement maintenant de TNK-BP, grâce à Rosneft, ce qui lui ouvrirait en outre la route vers l'Arctique", estime Vitali Krioukov, analyste au fonds IFD Kapital.

Rosneft pourrait détenir 5 % de la production mondiale de brut

 

Rosneft semble le mieux placé pour s'offrir les parts de TNK-BP. D'autant que les observateurs ne doutent pas que BP préfèrera vendre sa part au pétrolier public, qui pourrait réinviter le britannique dans l'exploration arctique. Rosneft dispose de davantage de ressources financières et il serait certainement dangereux pour AAR de contester avec trop de ténacité des ressources pétrolières à un groupe d'Etat dirigé par l'influent Igor Setchine, pourfendeur de Ioukos et proche du président Vladimir Poutine. AAR semble d'ailleurs résigné à jouer le rôle de figurant dans la transaction. Un des actionnaires d'AAR a d'ailleurs récemment déclaré que la parité avec Rosneft "nous convient".

 

Les estimations de la part vendue par BP oscillent entre 20 et 30 milliards de dollars. Hier, à l'occasion d'une conférence par téléphone, le PDG de BP, Robert Dudley, s'est refusé à révéler ce que sa compagnie allait faire de la somme, car la "vente n'est pas encore certaine". Si Rosneft finalise la transaction avec BP, ses réserves de pétrole vont passer de 14,3 milliards de barils aujourd'hui à 17 ou 18 milliards de barils, confortant sa position de leader mondial parmi les groupes pétroliers. Rosneft contrôlerait 40 % de la production domestique russe et....  5 % de la production mondiale de brut. La renationalisation pétrolière, initiée par Vladimir Poutine en 2003, se poursuit à bon train.

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Commentaires 5
à écrit le 01/08/2012 à 11:23
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Les media et politiques britanniques semblent moins sensibles au sort de leur plus grande entreprise industrielle que du sort d'oligarques exilés "persécutés" auquel cas ils ne lachent rien en matière d'extradition et ne manquent pas une occasion de ...

à écrit le 01/08/2012 à 11:10
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Il me semble vous avoir averti des conséquences de la campagne de désinformation lancée par les médias anglais et français lors des campagnes électorales russes. Total sera certainement la prochaine victime. Monsieur Poutine va jouer avec nos imbécil...

le 01/08/2012 à 11:33
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Je plussoie ;)

le 01/08/2012 à 12:12
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+1 aussi

le 28/08/2012 à 12:34
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JCM132 +1

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