Mais que trame Proglio dans le nucléaire avec les Chinois ?

Rien, si l'on en croit EDF, très embarrassé par la publication dans le Nouvel Obs et le Canard Enchaîné d'informations sur les «négociations secrètes de Proglio» avec des électriciens chinois. Pourtant, le PDG d'EDF poursuit ses négociations envers et contre tous.
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Le service de presse d'EDF n'a pas épargné ses efforts ces derniers jours pour tuer dans l'?uf le risque de polémique. Et a parfaitement réussi. Aucun journal, ou presque, n'a repris les dernières «révélations» de l'Obs et du Canard Enchaîné sur les «négociations secrètes» d'Henri Proglio autour du nucléaire avec des électriciens chinois. Le Nouvel Obs du 27 septembre a publié des extraits d'un projet d'accord bipartite entre EDF et son partenaire CGNPC, alors que l'Elysée a intimé l'ordre à EDF d'inclure Areva dans ses négociations avec les Chinois.

EDF "souhaite mettre l'Etat devant le fait accompli"

Le Canard du 3 octobre publie la suite: une note de l'APE (l'Agence des participations de l'Etat), la tutelle d'EDF à Bercy, intitulée «alerte relative à un projet d'accord de coopération entre EDF et CGNPC». «Il est plus que regrettable qu'EDF souhaite à nouveau mettre l'Etat devant le fait accompli alors que les dirigeants de l'entreprise sont conscients que la signature de ce projet d'accord ne peut se faire sans l'autorisation de l'Etat», écrit le numéro deux de l'APE dans l'extrait de la note reproduite.
Les deux articles brossent le tableau d'un Proglio prêt à livrer contrats et secrets du parc nucléaire français aux Chinois, dans l'espoir de s'allier les seuls électriciens du monde qui continuent à construire des réacteurs. Quitte, au passage, à léser les intérêts du constructeur nucléaire hexagonal, Areva.

Un "vieux" projet, selon EDF
Pour EDF, il n'y a pas d'affaire! Ou du moins, il n'y en a plus. «Ce projet d'accord a été présenté au conseil d'administration du 11 avril 2012 mais a été retoqué. C'est donc terminé! Il n'y a plus de sujet», affirme une porte-parole. C'est, presqu'au mot près, ce qu'avait affirmé l'électricien en janvier dernier lorsque le même Nouvel Obs avait publié un «projet d'accord» -déjà!- entre EDF et le même CGNPC, datant lui de 2010. «Ce texte n'a pas été signé. C'était juste un projet. Il est maintenant enterré».

Une affaire en cours, selon un administrateur d'EDF
EDF reconnaît néanmoins aujourd'hui que le texte de 23 pages dévoilé fin septembre par l'Obs est bel et bien «la suite» du précédent, qui n'était, lui, qu'un «protocole d'accord» de 5 pages. Loin d'être enterré, ce protocole a donc été travaillé et approfondi pour donner le texte de 23 pages! Et il y a de grandes chances pour que cela soit aussi le cas pour le projet d'accord soi-disant «retoqué» par le conseil d'EDF en avril. «Ce texte n'a absolument pas été retoqué le 11 avril pour la simple raison qu'il n'était pas soumis à décision. Il nous a été présenté dans le cadre d'un point d'information», affirme un administrateur à La Tribune.

"Pas discussion sur le réacteur franco-chinois sans Areva !"

Mais sur quoi portent donc ces fameux accords qui se discutent depuis 2010? Le développement d'un réacteur de 1.000 MW franco-chinois? «Pas du tout! Toutes les discussions autour du futur 1.000 MW se déroulent avec Areva, conformément aux directives du conseil de politique nucléaire», affirme EDF. Assertion confirmée par Areva par un très discret «tweet». «Contrairement à ce qu'affirme le @canard_enchaine , #EDF et #AREVA travaillent en étroite coopération sur un nouveau réacteur 1000 MW», gazouillait le constructeur nucléaire le 3 octobre.

A terme, des équipements chinois dans les centrales françaises
Alors quoi? EDF voudrait s'émanciper d'Areva pour passer aux Chinois des contrats de maintenance, d'ingénierie et de fourniture d'équipements pour le parc de 58 réacteurs français? «Cela ne concerne pas le marché français, qui de toute façon est soumis au code des marchés publics», affirme EDF, sans vouloir pour autant préciser ce que ces négociations concernent. Pourtant Henri Proglio et Hervé Machenaud, le directeur exécutif groupe en charge de la production et de l'ingénierie, ne font pas mystère de leur conviction qu'un jour, la Chine fournira des équipements majeurs aux centrales françaises. Conviction qu'ils gardent de plus en plus pour eux, au moment où Areva lutte pour conserver un plan de charge dans ses usines françaises.

Accompagner les Chinois à l'export
En fait, ces discussions semblent concerner principalement les marchés «tiers». Désireux d'exporter leur savoir faire et leur filière nucléaire, les Chinois ne peuvent cependant prétendre se présenter seuls aux appels d'offres internationaux. D'où leurs discussions avec EDF, premier exploitant nucléaire mondial, et qu'ils pratiquent de longue date puisque l'électricien français leur a fourni leurs premiers réacteurs à la fin des années 80.
Pour Henri Proglio, l'intérêt d'un tel accord est évident, comme il l'a encore expliqué devant ses actionnaires en mai dernier. «EDF, Areva et les autres industriels français maintiennent leurs compétences industrielles au meilleur niveau en participant aux nouveaux projets en Chine, qui compte la moitié des réacteurs en construction dans le monde». Le jeu en vaut la chandelle, estime-t-il, même s'il faut en échange aider les Chinois à pénétrer les marchés internationaux. EDF a déjà fait savoir qu'il envisageant de répondre avec CGNPC au futur appel d'offres en Afrique du Sud.

Des co-investisseurs pour construire des EPR en Grande Bretagne
Encore plus intéressant pour EDF, Henri Proglio tente en ce moment de convaincre ses partenaires chinois de l'aider à financer les nouveaux réacteurs qu'il s'est engagé à construire au Royaume-Uni. Il y a urgence. L'électricien français doit donner son feu vert officiel à la construction de deux premiers EPR outre-Manche d'ici à la fin de l'année. Mais ils coûtent au moins 6 milliards d'euros pièce. Et son actuel associé, le britannique Centrica (qui détient 20% de l'ex-British Energy aux côtés d'EDF) ne cache pas ses réticences. Une question demeure. Si le but de ces discussions n'est pas honteux, pourquoi EDF en fait-il un tel mystère?

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Commentaires 9
à écrit le 10/12/2012 à 12:12
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Comment no comment, that is the question Pas assez d info pour commenter, tout ce que je sais c est que playmobil garde precieusement ses moules donc sa propriete intellectuel en lieu sur. Et il ne s agit pas ici de playmobil!

à écrit le 26/11/2012 à 11:05
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QUOI il est encore la celui la: le PS devait le viré quand il sont arriver au pouvoir ce bon a rien il attende QUOI parole et parole est:

à écrit le 10/10/2012 à 14:26
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Encore une jolie démonstration de jeu collectif de la fameuse équipe de France du nucléaire d'EDF sous tutelle pourtant de la Fédération Étatique ... Et le made in France, le patriotisme industriel là dedans ... Du boulot pour notre cher Ministre du ...

à écrit le 10/10/2012 à 10:51
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Le nucléaire filière d'avenir : avenir en dictature chinoise, super ! Le nucléaire c'est propre, démocratique, transparent, sans risques, sans déchets, sans mines à ciel ouvert exploitées dans un pays qui est 188ème sur l'indice de développement huma...

à écrit le 09/10/2012 à 13:23
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je reviens d'un voyage en Chine et je reviens sur la mise en service de l'EPR Chinaois de TAISHAN en chantier 2 ans après Flamanille et en service en 2013 soit 3 ans avant l'EPR de Flamanville. La Chine a un besoin énorme d'énergie nucléaire. Les nou...

à écrit le 09/10/2012 à 12:36
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Je suis viscéralement favorable au nucléaire et pas spécialement parce que les crétins de couleur verte y sont opposés. Ceci étant le comportement de PROGLIO peut sembler suspect mais je ne crois pas qu'il travaille dans un secret total, les hautes a...

le 26/11/2012 à 15:50
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L'énergie nucléaire est une énergie dépassée,trop de coûts, trop de contraintes. La seule vraie solution est la réduction de la consommation énergétique. A commencer par l'isolation des bâtiments. Des dizaines de milliers d'emplois à la clé, non-délo...

à écrit le 09/10/2012 à 11:36
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C'est de la trahison. Virez donc ce monsieur S'il était chinois, il ne ferait pas le quart de ce qu'il fait à la tete d'EDF et la sanction serait plus brutale que la perte d'un poste de PDG La chine est un pays protectionniste comme beaucoup des pays...

à écrit le 09/10/2012 à 8:10
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Il serait peut être temps de prendre des mesures contre ceux qui veulent encore faire du nucléaire "low cost" avec les Chinois malgré Fukushima.

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