Total continuerait de défendre ses intérêts en Russie, malgré les sanctions

La compagnie pétrolière française a demandé au gouvernement français de défendre les relations industrielles avec les partenaires russes dans le cadre des décisions internationales sur la crise ukrainienne, selon Wall street Journal. En outre, la direction continuerait de se montrer fidèle vis-à-vis du patron de la compagnie pétrolière Novatek, pourtant sanctionné.
En 2011, Total a notamment investi quatre milliards de dollars afin d'acquérir une participation de 12,8% dans Novatek, le plus grand producteur indépendant de pétrole et de gaz naturel russe. (Photo: Reuters)

Face à la crise ukrainienne et aux sanctions adoptées par la communauté internationale contre Moscou, Total prend son temps et maintient sa stratégie en Russie, dans l'espoir que les tensions s'amenuisent, analyse The Wall Street Journal dans un article paru jeudi.

Des affaires franco-russes "cruciales"

Selon le quotidien économique américain, qui cite des sources proches du dossier, la société pétrolière aurait entrepris un lobbying sur l'exécutif français:

" afin qu'il fasse passer le message que les affaires entre la Russie et la France sont cruciales" et que "les décisions politiques devraient être pragmatiques et prendre en compte les intérêts des sociétés françaises".

A l'occasion d'une visite au Mexique à la mi-avril, le PDG de Total, Christophe de Margerie, aurait fait part au président François Hollande de sa préoccupation quant au risque que la ligne dure adoptée par la France vis-à-vis de Moscou compromette les relations et les revenus de Total en Russie.

Un "gateau" appétissant pour les compagnies pétrolières

Un cadre anonyme de Total a expliqué au WSJ:

"On est dans une espèce de partie de poker. Ne soyons pas hypocrites. Toutes les grosses compagnies pétrolières veulent avoir leur part de gateau en Russie parce que toutes ont besoin de mettre leurs mains sur de nouvelles ressources, de nouveaux gisements et - pour le moment- la Russie est le plus gros gateau accessible".

En 2011, Total a notamment investi quatre milliards de dollars afin d'acquérir une participation de 12,8% dans Novatek, le plus grand producteur indépendant de pétrole et de gaz naturel russe. Depuis, cette participation est passée à 17% et devrait atteindre 19,6% avant la fin de 2014, explique le WSJ.

Un projet à Iamal, un autre à Termokarstovoye

Ensemble, Total et Novatek ont investi 27 milliards de dollars sur un projet de liquéfaction de gaz naturel à Lamal, dans l'Arctique russe, qui devrait entamer sa production en 2017. Les réserves du gisement sont estimées à 907 milliards de mètres cubes. Les deux sociétés espèrent produire 16,5 millions de tonnes de gaz liquiéfié par an.

Total and Novatek développent aussi un autre gisement de gaz en Russie, à Termokarstovoye. Sa production démarrera en 2015, avec une capacité de 65.000 barils d'équivalent pétrole par jour.

Fidélité à Gennadi Timchenko

En juillet 2013, cette collaboration entre les deux sociétés a même valu au principal actionnaire de Novatek (via son groupe d'investissement privé Volga Group), Guennadi Timchenko, président du Conseil économique de la Chambre de commerce et d'industrie franco-russe, l'attribution de la Légion d'honneur. L'ennui pour Total est que l'homme d'affaires russe est aujourd'hui parmi ceux visés par les sanctions américaines.

La société française ne compte toutefois pas trahir son allié, selon le WSJ. Le journal américain rapporte que quand l'homme d'affaires russe a annulé sa participation à une réunion d'industriels à Paris, à la mi-avril, le PDG de Total aurait initialement envisagé de se retirer aussi, par solidarité. Lorsque finalement il s'est exprimé, il aurait fait comprendre à l'audience qu'il parlait au nom de son partenaire.

Le précédent birmane

Christophe de Margerie compterait par ailleurs encore se rendre à un important colloque d'affaires qui se tiendra au mois de mai à Saint-Petersbourg, duquel pourtant d'autres dirigeants occidentaux se sont déjà retirés, selon le WSJ.

Total a par ailleurs d'autres négociations en cours avec des sociétés russes, telles Lukoil et Gazprom, et a déjà adopté une stratégie similaire au milieu d'autres crises internationales, rappelle le Wall Street Journal. En 1992, la société a notamment refusé de quitter la Birmanie, malgré les sanctions prononcées alors contre la junte militaire.

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Commentaire 1
à écrit le 16/05/2014 à 10:20
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Bon article, vraiment, et qui pose bien les questions: nous sommes dans une partie de poker menteur avec les Américains (comme il est dit dans l'article, beaucoup des personnes russes visées par les sanctions américaines sont des amis de la France......

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