Le tarif réglementé du gaz va disparaître : neuf questions pour tout comprendre

Conformément à la loi Energie Climat de 2019, les offres aux tarifs réglementés de vente de gaz (TRVG) vont disparaître le 1er juillet prochain. Au total, quelque 2,6 millions de clients sont concernés, dont 2,3 millions ayant souscrit à une offre chez Engie. La Tribune fait le point, en neuf questions, sur les évolutions induites par cette disparition et ses potentielles conséquences.
Juliette Raynal
Le tarif réglementé de vente du gaz (TRVG) est issu du monopole d'Etat sur la commercialisation du gaz.
Le tarif réglementé de vente du gaz (TRVG) est issu du monopole d'Etat sur la commercialisation du gaz. (Crédits : Reuters)

1 - De quoi s'agit-il ?

Le tarif réglementé de vente du gaz (TRVG) est issu du monopole d'Etat sur la commercialisation du gaz. Elle est essentiellement distribuée par Engie, mais aussi par des entreprises locales de distribution (Gaz de Bordeaux, Gaz de Strasbourg...).Il s'agit d'une offre dont le prix est encadré par les pouvoirs publics français. Si son prix est fixé par le gouvernement, après avis de la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE), cela ne signifie pas, pour autant, que celui-ci est fixe. Il s'agit, en effet, d'une offre indexée. « Ce qui signifie que le prix du kilowattheure peut varier tous les mois », a précisé Florence Fouquet, directrice des clients particuliers chez Engie, lors d'un point presse ce mercredi. Son montant se voit ainsi actualisé tous les mois afin de refléter les prix sur le marché de gros du gaz, selon une formule de la CRE censée reproduire les coûts d'approvisionnement des fournisseurs. Ainsi, le TRVG ne préserve pas, en lui-même, les consommateurs de la volatilité des cours.

Cette offre n'existera plus à partir du 1er juillet prochain. Sa disparition à venir est orchestrée par la loi Énergie Climat promulguée en 2019. Laquelle reprend une décision du Conseil d'Etat, qui l'a jugé contraire au droit européen. Bruxelles défend, en effet, la concurrence entre les fournisseurs de gaz sans que l'un d'eux ne profite d'un avantage historique dans l'optique de multiplier les offres attractives pour les consommateurs.

2 - Qui est concerné par la suppression de ce tarif réglementé ?

Aujourd'hui, chez Engie, quelque 2,3 millions de particuliers sont clients de cette offre. Environ 300.000 autres en bénéficient via d'autres fournisseurs locaux. Plus aucune petite entreprise, qu'il s'agisse de PME ou de TPE, n'en jouit. « Il y a encore quelques copropriétés, mais elles sont très peu nombreuses », a affirmé Florence Fouquet. Environ 8.000 bénéficieraient encore de ce dispositif. Ces 2,3 millions de clients particuliers représentent donc 20% du marché du gaz en France qui regroupe environ 11 millions de Français. « La grande majorité des Français a déjà basculé sur une offre de marché que ce soit chez Engie ou chez les concurrents », commente la directrice. Selon elle, les clients au TRVG sont des personnes plus âgées par rapport aux clients ayant déjà souscrit à des offres de marché.

3 - Quels choix s'offrent à eux ?

Deux options s'offrent aux 2,3 millions de clients d'Engie concernés. Ils peuvent dès aujourd'hui, et jusqu'au 30 juin, souscrire à une autre offre de marché, proposée par Engie ou par un autre concurrent. Dans ces offres de marché, les prix sont fixés librement par les fournisseurs, sans intervention des pouvoirs publics. Les offres de marché peuvent proposer un prix fixe ou un prix indexé.

Seconde option : décider de conserver l'offre TRVG jusqu'au 1er juillet. Dans ce cas-là, ils basculeront automatiquement sur une offre d'Engie baptisée "offre passerelle". Il s'agit d'une offre à durée indéterminée résiliable à tout moment sans frais, assure le fournisseur de gaz, qui vante un « dispositif très souple ». Cette offre a récemment été présentée par courrier aux clients, conformément aux obligations légales d'Engie.

Pour alerter les particuliers concernés de ces changements à venir, Engie leur a également adressé cinq courriers réglementaires (et donc peu compréhensibles) comme l'exige la loi de 2019. Pour compléter ce dispositif, l'énergéticien a créé un site internet dédié et mis en place un numéro de téléphone spécifique (le 09 77 428 429) permettant d'échanger avec des conseillers formés spécifiquement à ces questions.

4- La fin de cette offre peut-elle entraîner des coupures de gaz ?

Engie assure que non. Si un particulier n'a pas choisi une autre offre de marché avant le 1er juillet prochain, il basculera automatiquement sur l'offre « passerelle ». Ce « qui permettra d'éviter tout risque de coupure de gaz et d'avoir, à nouveau, un contrat au 1er juillet », fait valoir Florence Fouquet.

5 - Comment est calculé le prix de l'offre « passerelle » ?

Le prix de cette offre est constitué de deux composantes : un prix d'abonnement fixe, mais pas identique pour tous (il varie d'un client à un autre selon sa consommation annuelle prévisionnelle) et le prix du kilowattheure qui, lui, est indexé.

L'indice retenu est un tarif de référence que publie désormais la CRE sur son site. Comme le TRVG, ce nouvel indice de référence évoluera tous les mois. Sa formule mathématique, légèrement différente de celle du TRVG, intègre une composante trimestrielle afin de lisser l'évolution des prix enregistrée sur les marchés de gros.

6 - Les particuliers passant à l'offre « passerelle » vont-ils payer plus cher que l'offre TRVG ?

C'est la grande inconnue de ce basculement sachant que l'indice de référence évolue tous les mois et que celui du mois de juillet ne sera connu qu'à la mi-juin. « On ne connaît pas encore le prix qui va s'appliquer », répond ainsi Florence Fouquet. Afin de se faire une idée, les clients au TRVG d'Engie peuvent toutefois visualiser le prix hypothétique de cette offre selon le niveau de l'indice de référence en vigueur pour le mois d'avril. De même pour les mois de mai et juin, lorsque l'indice sera actualisé. « Aujourd'hui, l'indice de référence est légèrement au-dessus du TRVG, précise Florence Fouquet, mais pour le mois de mai on s'attend à passer en-dessous ».

A cette inconnue concernant l'indice du mois de juillet, s'ajoute un certain flou. Les hypothèses d'évolution sont, en effet, peu lisibles étant donné que le prix du kilowattheure varie aussi selon la consommation annuelle prévisionnelle du foyer et de la commune de livraison. Un flou entretenu par Engie qui n'a pas souhaité se prononcer sur des exemples concrets d'évolution de prix selon des profils de consommation de type.

7- Quels vont être les effets sur les offres de marché ?

Au-delà de l'offre « passerelle », les associations de consommateurs redoutent que la suppression du TRVG ait des conséquences sur l'ensemble des offres de marché qui avaient pour habitude de s'y référer. « Ce n'est pas pareil d'avoir 25% des ménages au TRV, ce qui oblige la plupart des fournisseurs à s'y référer pour être attractif, et un indice de référence noyé au fin fond du site de la CRE ! » s'inquiétait, en janvier dernier, François Carlier, délégué général de CLCV. Quelques jours plus tard, l'association de consommateurs avait même adressé un courrier aux sénateurs et députés leur demandant le report de cette suppression. « On s'apprête à enlever un filet de sécurité malgré un marché devenu toxique ! » s'indignait François Carlier.

8 - Quid du bouclier tarifaire ?

La loi de finances 2023 prévoit la possibilité pour le gouvernement de prolonger par décret jusqu'au 31 décembre 2023 le bouclier tarifaire actuellement en vigueur qui s'arrête au 30 juin 2023. Celui-ci pourrait donc être, de nouveau, déclenché en cas de flambée des prix sur les marchés de gros. « Tous les Français [consommateurs de gaz, ndlr], quelle que soit leur offre ou leur fournisseur, seront protégés », résume Florence Fouquet.

Qu'adviendra-t-il en 2024 ? La question reste en suspens. Néanmoins, « les clients qui sont averses aux évolutions de prix pourront choisir une offre de marché à prix fixe », précise Florence Fouquet. Dans les offres de marché à prix fixe, le prix du kilowattheure ne change pas sur une période de un, deux, ou trois ans selon le contrat. Cette option permet de se protéger de la volatilité des prix, mais elle ne garantit pas un prix raisonnable...

9 - Quelles conséquences pour Engie ?

L'énergéticien risque-t-il une hémorragie de clients d'ici le 1er juillet ? Un tel scénario aurait-il de lourdes conséquences financières ? Engie affirme ne pas avoir réalisé de projections sur le nombre possible de départs chez des fournisseurs concurrents. Un impact financier « énorme » est toutefois écarté. Par ailleurs, la suppression du TRVG se traduira en interne par la suppression de la direction dédiée à cette offre. Elle employait, en 2019, 800 personnes. Toutes ont été redéployées sur d'autres services, assure-t-on.

Juliette Raynal

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Commentaires 10
à écrit le 21/04/2023 à 14:18
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On se moque de qui, moi mon gaz à augmenté de 400% pour mon chauffage central. Et mon décompte se fait 1x par an. Et là vous passez en plus de la tva de 5.5 à 20% et pour le mgh de 20 à 32% de tva....on se moque de qui???? Suis dans une copropri...

à écrit le 20/04/2023 à 16:50
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Nous allons avoir tellement chaud, dans les années avenir, que nous n'aurons plus besoin de chauffage. Dixit le GIEC.

à écrit le 20/04/2023 à 12:58
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Bon effort de synthèse; mais il est dit partout et depuis quelques semaines que le prix de la passerelle serait 3% au dessus des TRVG actuels. Bon cela dit, tous ces prix peuvent maintenant changer tous les mois. Si les factures continuent d'être édi...

à écrit le 20/04/2023 à 10:23
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Pour compléter les questions qui se posent sur cette transition, il y aurait à évoquer également la modification du taux de la TVA qui s'applique : sur l'abonnement la TVA passe de 5.5% à 20%, et sur le kWh de 20% à 32%. Visiblement Engie ne souhait...

le 20/04/2023 à 12:09
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Vous avez vu cela où, des hausses de TVA de telle ampleur? Peut-être des hausses de la TICGN, comme il en a été question avec la taxe carbone et ....avant les Gilets jaunes? De toute façon, ENGIE est fondée à ne pas répondre sur ce point, les taxes, ...

à écrit le 20/04/2023 à 10:04
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Pourquoi ne pas réguler le beau temps dans notre beau pays, le seul où le communisme a réussi, n'en déplaise à Poutine?

à écrit le 20/04/2023 à 10:03
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Pourquoi ne pas réguler le beau temps dans notre beau pays, le seul où le communisme a réussi, n'en déplaise à Poutine?

à écrit le 20/04/2023 à 8:46
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Voilà pourquoi je garde ma chaudière au fuel de 2019… bien moins cher que le gaz .. avec mon voisin on a comparé : moi maison 100m2 2800 € de fuel / an pour chauffage et eau chaude lui maison 90m2 plus récente + normes gaz pour chauffage 3300€ …...

le 20/04/2023 à 10:28
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Moi pavillon 100 m2 tout électrique avec PAC chez Engie : 1.500 € par an Ça me paraît cher votre fioul

le 20/04/2023 à 12:15
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Et moi, pavillon de 190 m2 chauffé au gaz : 1200 euros (chaudière à condensation de 2021 dans les Yvelines).

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