Electricité : EDF veut couper le courant à ses concurrents

Par latribune.fr  |   |  583  mots
"Il est impératif qu'EDF se prépare à maîtriser la situation pour assurer la continuité de l'approvisionnement", écrit la ministre.
À l'approche de l'hiver, et alors que de nombreux réacteurs sont en travaux, le groupe demande à l'Etat la suspension temporaire de l'accord permettant aux autres opérateurs d'acheter de l'électricité. Auparavant, Ségolène Royal avait mis en garde EDF sur le risque de pénurie.

Confronté à la fermeture pour des contrôles d'une partie de son parc nucléaire, EDF a demandé vendredi à l'Etat de suspendre temporairement le mécanisme d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

Ce dispositif, introduit par la loi NOME sur l'énergie de 2010, permet aux opérateurs alternatifs qui le souhaitent d'acheter des volumes d'électricité à EDF dans le but de favoriser le développement d'offres concurrentes à celles de l'opérateur historique.

Des arrêts de réacteurs non programmés pour des raisons de sécurité

Sur les 58 réacteurs exploités par EDF en France, 20 étaient hors service mercredi, selon RTE, le gestionnaire du réseau électrique à haute tension. La plupart sont arrêtés pour maintenance classique, comme c'est habituellement le cas avant l'hiver. Pour sept d'entre eux, ces arrêts planifiés ont été mis à profit pour inspecter leurs générateurs de vapeur.

Ces composants clés sont suspectés de présenter une concentration excessive en carbone de leur acier, susceptible de les affaiblir. À la demande de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), cinq réacteurs supplémentaires seront arrêtés au cours des prochaines semaines pour examen, sans forcément attendre leur maintenance. Au total, 18 réacteurs sont potentiellement concernés par cette anomalie, dont six ont déjà redémarré après inspection.

"Compte tenu de ces circonstances, de leur répercussion sur le marché de gros de l'électricité et des effets spéculatifs qui en résultent", EDF demande ainsi à l'Etat de prendre "toutes les mesures nécessaires, dans le cadre du mécanisme d'Accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH), incluant, le cas échéant, la suspension temporaire du dispositif".

Royal s'inquiète

La ministre de l'Environnement Ségolène Royal avait auparavant écrit à EDF pour lui enjoindre d'"assurer la continuité de l'approvisionnement" en électricité du pays, en dépit de l'arrêt prochain de plus d'un tiers du parc nucléaire, dans une lettre citée vendredi par Le Parisien.

"Il est impératif qu'EDF se prépare à maîtriser la situation pour assurer la continuité de l'approvisionnement", écrit la ministre dans son courrier adressé au Pdg d'EDF, Jean-Bernard Lévy et daté du 10 octobre.

"La sécurité d'approvisionnement du territoire français en électricité doit être assurée. EDF, premier producteur d'électricité en France, est dépositaire d'une forte responsabilité dans la garantie de cet approvisionnement", insiste-t-elle.

Va-t-on manquer d'électricité cet hiver en France ?

L'Hexagone est hautement "thermosensible": la popularité du chauffage électrique fait qu'une baisse d'un degré de la température hivernale représente une consommation additionnelle de courant de l'ordre de 2.400 mégawatts (MW), l'équivalent d'une agglomération comme Marseille.

"Les arrêts sont réalisés aujourd'hui, justement pour avoir le maximum de réacteurs possibles au coeur de l'hiver", veut rassurer EDF, dont les réacteurs stoppés ont déjà entraîné une hausse des prix sur le marché européen de l'électricité.

Pour RTE, il est toutefois "trop tôt" pour se prononcer. Le gestionnaire met la dernière main à son étude prévisionnelle sur les capacités du pays à faire face à ses besoins pour l'hiver, qu'il présentera début novembre.

"Les prévisions relatives à l'équilibre offre-demande d'électricité présentées jusqu'ici par EDF ne prennent pas en compte ce risque d'indisponibilité accrue du parc nucléaire", s'inquiète Ségolène Royal dans sa lettre.

 (Avec AFP)