Pétrole : les Saoudiens accusent Biden de jouer avec ses réserves stratégiques pour manipuler les cours

Par latribune.fr  |   |  558  mots
Le président américain Joe Biden a annoncé mercredi 19 octobre un plan visant notamment à vendre une partie des stocks d'urgence du pays d'ici la fin de l'année, pour tenter d'atténuer les prix élevés de l'essence. Un message direct aux Américains avant les élections de mi-mandat du 8 novembre. (Crédits : Reuters)
Les tensions s'exacerbent entre les deux alliés historiques qui sont aussi deux puissances pétrolières mais n'ayant pas le même agenda (cf les élections de mi-mandat le 8 novembre pour Biden). La décision en octobre de l'Opep+ de réduire sa production pour maintenir haut les cours du pétrole et renforcer la Russie n'a pas plu à Joe Biden. Mais la contre-attaque que leur a concocté l'Américain, en mettant sur le marché le pétrole de ses réserves stratégiques n'est guère plus au goût des Saoudiens, qui fustigent le comportement "immature" de leurs alliés.

Chacune des deux puissances pétrolières accusant l'autre de la goutte de pétrole qui fait déborder le vase, la tension entre les deux alliés historiques que sont les États-Unis et l'Arabis Saoudite pourrait rapidement toucher au paroxysme.

En octobre, la décision de l'Opep+ de baisser les quotas de production avait déclenché la colère du président Joe Biden contre son homologue saoudien, le prince hériter Mohammed ben Salmane (MBS), cette baisse signifiant un maintien de prix hauts pour le baril de pétrole dont la Russie allait profiter directement alors que tout le camp occidental s'efforce d'enrayer la machine de guerre de Poutine à l'œuvre sur le territoire ukrainien depuis le 24 février.

Biden met sur le marché le pétrole de ses réserves stratégiques

Or, réponse du berger à la bergère, deux semaines plus tard, Joe Biden annonçait le mercredi 19 octobre qu'il allait puiser 15 millions de barils de pétrole supplémentaires dans les réserves stratégiques des États-Unis, dans le cadre d'un programme qui prévoit d'en libérer 180 millions au total, afin de faire face à la flambée des prix liée à l'invasion russe de l'Ukraine.

L'objectif du président des États-Unis est d'adresser un signal fort aux électeurs américains en faisant baisser les prix des carburants avant les élections de mi-mandat du 8 novembre.

Ce mardi, c'est donc le ministre saoudien de l'Énergie qui se mettait à son tour en colère, dénonçant le déblocage de réserves pétrolières d'urgence (dites aussi "réserves stratégiques") qui vise selon lui à "manipuler les marchés", au moment où Ryad et son partenaire américain s'écharpent sur les prix de l'or noir.

L'Arabie Saoudite appelle les États-Unis à faire preuve de "maturité"

« Les gens épuisent leurs stocks d'urgence, les ont épuisés, les ont utilisés comme un mécanisme destiné à manipuler les marchés alors que leur objectif de base était d'atténuer la pénurie d'approvisionnement », a déclaré le ministre saoudien de l'Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane, mais sans désigner nommément les Etats-Unis.

Le ministre saoudien de l'Énergie, d'ajouter :

« Cependant, il est de mon devoir de faire comprendre au monde que la perte du stock d'urgence pourrait devenir douloureuse dans les mois à venir », a-t-il souligné lors d'une conférence économique à Ryad.

L'Arabie saoudite a décidé de faire preuve de « maturité » dans la querelle qui l'oppose aux États-Unis au sujet de l'approvisionnement en pétrole, a déclaré mardi le ministre de l'Énergie du royaume, le prince Abdulaziz bin Salman :

« Je pense qu'en tant qu'Arabie saoudite, nous avons décidé d'être les plus matures et de laisser la poussière retomber [let the dice fall]. »

Après avoir connu une flambée spectaculaire au début de la guerre, dépassant le seuil symbolique des 100 dollars le baril, les prix du pétrole baissent ces derniers mois même s'ils restent élevés.

Les relations entre les deux alliés traditionnels avaient déjà été mises à mal par la position de l'administration de Joe Biden sur le meurtre en 2018 du journaliste saoudien Jamal Khashoggi et la guerre au Yémen, ainsi que par les liens croissants de Riyad avec la Chine et la Russie.

(avec AFP et Reuters)