Optimisation fiscale : General Electric assigné en justice par ses salariés

Par latribune.fr  |   |  543  mots
"Nous partons du principe que la participation permet aux salariés de bénéficier des fruits de l'expansion de l'entreprise", note Me Zerah. Or "le fruit de l'activité économique de Belfort est dispatché vers d'autres filiales". (Crédits : Jim Young)
Les représentants de salariés de l'entité turbines à gaz de General Electric à Belfort attaquent en justice le géant américain pour "fraude au droit à la participation des salariés". Le Comité social et économique (CSE) estime à environ un milliard d'euros le montant des profits localisés dans les paradis fiscaux au détriment de l'entité de Belfort ces dernières années.

Les salariés de General Electric ont-ils été floués par la stratégie fiscale de leur entreprise ? C'est la question que se posent le syndicat Sud Industrie et le Comité social et économique (CSE) de l'entité turbines à gaz de General Electric à Belfort (sous le nom GE EPF). Pour trouver des éléments de réponse, les représentants des salariés ont assigné en justice GE pour "fraude au droit à la participation des salariés".

Au coeur de l'investigation, les salariés souhaitent lever le voile sur les pratiques supposées d'optimisation fiscale du géant américain. Ils estiment que l'entité de Belfort a minoré son résultat fiscal par le biais de transfert de richesses vers des filiales en Suisse ou vers l'Etat américain du Delaware, où la fiscalité est plus avantageuse. Ils réclament ainsi un rattrapage de participation sur la période 2015-2020.

Un milliard d'euros d'activité dans les paradis fiscaux ?

Cette plainte, déposée le 30 décembre 2021, fait suite à la réception d'un rapport diffusé le 5 novembre dernier et rédigé à la suite du droit d'alerte économique qu'a fait valoir le comité. Le CSE estime à environ un milliard d'euros le montant des profits localisés dans les paradis fiscaux au détriment de GE EPF ces dernières années.

Résultat de ces pratiques, selon les organisations : l'entreprise n'a pas versé de participation aux salariés ces dernières années. Selon Philippe Petitcolin, secrétaire du CSE et membre de la CFE-CGC, les employés touchaient avant 2015 (et le rachat d'Alstom par GE) une participation annuelle correspondant à environ deux mois de salaire. Depuis ils ne touchent plus rien. "Ce que fabrique Belfort ne bénéficie pas" aux salariés de l'entreprise, dénonce l'avocat des salariés, Me Zerah.

"Nous partons du principe que la participation permet aux salariés de bénéficier des fruits de l'expansion de l'entreprise", note Me Zerah. Or "le fruit de l'activité économique de Belfort est dispatché vers d'autres filiales".

Des soupçons depuis plusieurs années

General Electric répond de son côté que "les transactions inter-sociétés de GE sont conformes à toutes les règles et réglementations internationales et nationales en vigueur". "Elles sont bien documentées et régulièrement auditées par divers organismes, y compris les commissaires aux comptes et les autorités fiscales, en France et dans le monde entier", ajoute l'entreprise.

D'ici trois mois, General Electric va présenter ses réponses à l'assignation, détaille Me Zerah. Les plaignants pourront également y répondre. L'avocat envisage la tenue d'un procès dans cette affaire "d'ici 12 à 18 mois".

En 2019, le secrétaire national du Parti communiste Fabien Roussel, et actuel candidat à l'élection présidentielle française, avait saisi le parquet national financier à l'encontre du géant américain General Electric, accusé d'optimisation et fraude fiscales, alors qu'il projetait à l'époque la suppression de mille emplois à Belfort.

Fin mai 2019, General Electric avait annoncé un plan social portant sur la suppression de 1.050 emplois dont 800 dans la branche turbines à gaz et 250 au sein des "services supports", sur des sites du Territoire de Belfort.

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(avec AFP)