Bio c'Bon était aussi un investissement pour des particuliers militants

Ils avaient investi entre 20.000 et 200.000 euros chacun dans le développement de Bio C'Bon, attirés par un "secteur porteur" et un rendement présenté comme très intéressant, mais l'enseigne spécialisée a été placée en redressement judiciaire et ces particuliers espèrent ne pas être oubliés par les éventuels repreneurs.
(Crédits : Reuters)

Il se prénomme Jean-Jacques, exerce une profession libérale, mais ne souhaite pas être identifié autrement. Il y a quatre ans, il a investi 20.000 euros dans un produit financier Bio c'Bon.

"On va vers un changement du mode d'alimentation, ça me semblait être une thématique d'investissement intéressante et pertinente, avec un vrai potentiel", explique-t-il, "toujours convaincu que le secteur est porteur". Le rendement avancé, de 7%, était également alléchant. Mais "les choses se sont compliquées depuis un an".

Bio c'Bon, qui n'a pas souhaité faire de commentaire à ce sujet mardi, avait dans une communication précédente fait remonter ses difficultés à une période "pleine de défis" fin 2019-début 2020: "mouvements sociaux qui ont significativement affecté les centres-villes où nos magasins sont majoritairement installés", "accroissement de la concurrence de la grande distribution", épidémie de coronavirus.

L'entreprise a été placée en redressement judiciaire début septembre, dans l'attente d'un éventuel repreneur. Or, avertit l'avocat Antoine Germain, les quelque 2.800 investisseurs particuliers qu'il a recensés et qui se regroupent au sein de l'Association de défense des investisseurs de Bio c'Bon (ADIBIO), ne veulent pas être "les dindons de la farce" lors du changement de mains de l'enseigne.

Évaluant à environ 114 millions d'euros le préjudice global, "avec les intérêts", l'avocat, qui s'était déjà exprimé lundi soir auprès du quotidien Le Figaro, explique encore que ces investisseurs souhaiteraient "que le repreneur intègre dans son offre de reprise leurs intérêts en leur proposant par exemple d'entrer au capital du véhicule d'acquisition de Bio c'Bon".

Plusieurs repreneurs potentiels

Parmi les noms des repreneurs évoqués ces dernières semaines figurent Carrefour et Casino, le spécialiste Biocoop ou encore le groupe familial Zouari, actionnaire de référence de l'enseigne de surgelés Picard.

"Quand on est candidat à la reprise d'une entreprise, on ne reprend pas le passif en principe", concède Antoine Germain. Mais il rappelle que le tribunal de commerce qui examinera les offres examinera "trois choses", la pérennité de l'entreprise, la préservation de l'emploi et enfin "l'apurement du passif".

La situation de Bio c'Bon n'est en tout cas pas commune. En 2018, le magazine spécialisé LSA avait détaillé un montage financier proposé par l'actionnaire fondateur du groupe, Marne & Finance, dont le président Thierry Chouraqui est aussi à la tête de Bio C'Bon, permettant à des particuliers d'investir dans les magasins ou les locaux commerciaux de Bio c'Bon.

Cela avait fait s'interroger certains conseillers en investissement financier: "quand plus de quatre de nos membres nous interrogent sur un montage et que nous ne parvenons pas à trouver une explication juridique claire et certaine quant au cadre et aux modalités de conseil ou intermédiation à appliquer, nous interrogeons la marque, échangeons publiquement avec elle et interrogeons l'Autorité des marchés financiers (AMF)", explique à l'AFP le président de l'Anacofi (association professionnelle des entreprises de courtage et conseil en banque, finance et assurance), David Charlet.

En réponse, l'AMF a dans un premier temps alerté les conseillers en investissements financiers sur "les risques encourus" à poursuivre la commercialisation de ces offres "sans s'être assurés que leurs clients sont suffisamment avertis" des risques, avant d'estimer dans un second temps qu'il n'y avait "pas lieu de notifier de griefs" et décidé de "ne pas ouvrir de procédure de sanction à l'encontre de Marne & Finance ou de ses dirigeants".

Cette décision "a mis fin aux débats", explique encore David Charlet.

"Ceci posé, il s'agit maintenant d'une situation dans laquelle une entreprise, jugée a priori solide avant la crise, est maintenant en grande difficulté. Or elle est la clef de voûte économique d'investissements divers réalisés par des épargnants, qui pour certains sont bien clients de nos membres. Donc il y aura forcément des conséquences".

Jean-Jacques, lui, reconnaît avoir "pris son risque" avec cet investissement. Mais il estime important de "rassembler les investisseurs privés pour faire en sorte que leurs intérêts soient défendus".

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Commentaires 5
à écrit le 16/09/2020 à 19:01
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C'est un bel investissement de 114 millions pour une bonne cause, le bio c'est bon, alors que souvent, ce n'est pas très bon parce trop naturel. C'est sûr que le concept va gagner avec quelques ajustements, investissements supplémentaires et la crois...

à écrit le 16/09/2020 à 18:36
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Quand on recherche des rendements importants, on regarde de très près et on s'entoure de conseil. Dans ce cas il y a eu une alerte de l'AMF et je n'appelle pas ces investisseurs des militants : investir éthique ça existe, mais investir militant bio n...

à écrit le 16/09/2020 à 16:03
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Quand on vous propose du 7 %, alors que la récession est présente partout, le taux banque zero, il n'y a que les amateurs qui se font pigeonner.

à écrit le 16/09/2020 à 8:48
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Des investisseurs courageux en effet, novateurs même sachant prendre des risques puisque l'hypocrisie du changement n'est que purement formel, la copulation politico-financière soutenant fortement le secteur agro-industriel il est bien évident que ma...

à écrit le 16/09/2020 à 7:20
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tiens, les militants de gauche decouvrent ce que c'est d'etre un actionnaire negrier qui se fait rincer quand la boite depose le bilan......... ils ne veulent pas etre le dindon de la farce, ils veulent etre militant, mais sans que ca ne leur coute ...

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