Air France-KLM : les dossiers chauds du nouveau PDG Alexandre de Juniac

A la tête d'Air France depuis novembre 2011, Alexandre de Juniac a pris ce lundi 1er juillet les commandes d'Air France-KLM à la place de Jean-Cyril Spinetta. Frédéric Gagey, jusqu'ici directeur financier de la compagnie tricolore lui succède à la présidence d'Air France. Redresser le court et moyen-courrier et le cargo, deux sujets explosifs sur le plan social, mais aussi trancher sur une acquisition ou pas d'Alitalia constituent les trois gros dossiers majeurs à résoudre à court terme.
Copyright Reuters

A la tête d?Air France depuis novembre 2011, Alexandre de Juniac a pris, ce lundi 1er juillet, les commandes d?Air France-KLM à la place de Jean-Cyril Spinetta. Frédéric Gagey, jusqu?ici directeur financier de la compagnie tricolore, lui succède à la présidence d?Air France. Avec Camiel Eurlings, le jeune président du conseil du directoire de KLM (40 ans), ils forment le trio qui a la lourde charge de redresser Air France-KLM. A la rentrée, le groupe va durcir son plan de restructuration. Les dossiers chauds sont nombreux. Trois ont retenu notre attention.

Le moyen-courrier, une bombe sociale

Le plus compliqué reste le redressement du réseau court et moyen-courrier d?Air France qui plombe les comptes du groupe depuis plusieurs années. En 2012, la perte d?exploitation d'Air France sur cette partie du réseau s'est élevée à 700 millions d?euros, 100 millions de plus qu?en 2011. Plus précisément, l'urgence est redresser la barre sur le réseau court-courrier dit de point-à-point de la compagnie française (par opposition aux vols en correspondance) face aux compagnies à bas coûts comme Easyjet, Vueling ou Ryanair. Malgré les mesures du plan Transform 2015,  la situation du moyen-courrier ne s?améliore pas (elle ne se détériore pas non plus) et va encore peser sur les comptes du deuxième trimestre, dit-on en interne.

La solution ? Elle est simple sur le papier. « Tout le monde sait que le sens de l?histoire est de transférer tout ou partie du réseau court et moyen-courrier d?Air France à Transavia, (la filiale à bas coûts, ndlr) et, par conséquent de réduire les coûts des escales françaises, plus élevés que ceux de nos concurrents, et de manière générale les coûts à l?heure de vol (ce qui implique aussi des baisses de coûts du côté des navigants, ndlr)», explique un très bon connaisseur de l'entreprise. « Le plus compliqué est de trouver le cheminement pour y arriver », ajoute-t-il. L?équation tourne en effet au casse-tête. « Si l?on veut se battre contre les low-cost, le minimum est de faire comme elles », fait observer un syndicaliste d?Air France.

Or, basculer tout ou partie d?une activité (en clair les vols de point-à-point, c?est à dire les vols au départ d?Orly et des aéroports régionaux) vers un fonctionnement « low-cost » en ayant recours à plus de sous-traitance est explosif sur le plan social. Notamment dans les escales en régions où les coûts d?Air France sont supérieurs à ceux de la concurrence (personnels de pistes, qui traitent le chargement des avions et ceux au contact du client en charge de l?enregistrement et de l?embarquement).

Des sureffectifs chez le personnel des aéroports

Car leur surcoût par rapport à la concurrence est un problème de sureffectifs, de productivité moindre que les concurrents pour des salaires plus élevés. « L?élément clé, c?est la grille horaire du personnel, elle n?est pas adaptée à la charge de travail. Il faut qu?elle s?adapte au programme de vols et non l?inverse », résume un observateur.

Pour le personnel dit "commercial" au contact du client dans les aérogares, le sureffectif augmente au fur et à mesure que s'accroît chez les passagers l?utilisation des nouvelles technologies, notamment celles permettant de s?enregistrer soi-même. Résultat : sur les 4.300 personnes travaillant dans ces escales en régions, il y aurait un sureffectif d?environ 25%, au moins, dit-on en interne, soit entre 1.000 et 1.500 personnes grosso modo. « Malgré les mesures d?économies, le traitement en escale est encore trop cher », poursuit-on.

L'hypothèse peu probable d'un plan de départs volontaires

En juin Les Echos évoquaient le lancement d'un PDV concernant 1000 personnes. Les deux plans de départs volontaires (PDV) lancés en 2009 et 2012 n?ont pas rencontré de vif succès au sein des personnels des aéroports de province, en particulier dans le sud de la France. « Ce sont des zones très touchées par le chômage. Les gens ne partent même avec un gros chèque », constate un observateur. Pas sûr donc que l?hypothèse d?un nouveau PDV change la donne.

Que faire alors ? C?est un peu l?inconnu. « A part proposer un plan salaires contre emplois, je ne vois pas comment Alexandre de Juniac peut faire », explique un bon connaisseur de l?entreprise. Car procéder à des départs contraints provoquerait des forts remous sociaux et l?ire des élus locaux et de l?Etat, actionnaire à 15,7% d?Air France-KLM.

Négocier avec les pilotes

En outre, l?élargissement du périmètre de Transavia aux dépens d?Air France ne sera pas non plus une partie de plaisir avec les pilotes d?Air France. Difficile, en effet, de voir les pilotes épargnés par un nouveau tour de vis si le personnel au sol se voit demander beaucoup. En clair, en cas de transfert de l?activité court-courrier de point-à-point d?Air France vers Transavia, les pilotes d?Air France auront du mal être transférés chez Transavia en conservant leurs contrats Air France. Ils devront probablement appliquer les contrats de travail en vigueur chez Transavia.

Et ces derniers devront être modifiés car, à l'époque de la création de Transavia France en 2006, ils ont été négociés par le syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) pour dissuader la direction de transférer des vols d?Air France vers Transavia. En gros, appliquer à Air France les règles de la filiale low-cost (dont les vols sont plus longs que ceux d'Air France, plus courts) ne permet pas d'obtenir la même performance en termes de coût au siège kilomètre offert, de 4,8 centimes aujourd'hui chez Transavia, contre 11,5 centimes chez Air France. Si Alexandre de Juniac veut aller plus loin avec Transavia, il devra négocier avec le SNPL. Jamais facile.

Le cargo, un dossier essentiellement chez KLM?

L?autre grand sujet d?Air France-KLM, c?est le cargo. Là, le dossier concerne davantage KLM qu?Air France. La compagnie hollandaise possède encore 14 appareils tout cargo répartis au sein de KLM et de Martinair, quand Air France n?en compte plus que 5, après avoir réduit ses capacités tout cargo ces dernières années pour se concentrer sur le remplissage des soutes des avions passagers. Au final, il y a donc deux compagnies au sein du groupe avec trois types d?avions tout cargo. Certains plaident pour que l?activité tout cargo soit identifiée soit à Paris, soit à Amsterdam, avec une flotte dédiée et des pilotes d?Air France et de KLM affectés à cette entité. Un scénario qui risque de provoquer des risques sociaux au sein de la compagnie qui perdrait son activité tout cargo, à Amsterdam notamment.

Le casse-tête Alitalia

Enfin, sur la scène internationale, le dossier Alitalia va occuper les réflexions d?Alexandre de Juniac cet été. La compagnie italienne va prochainement annoncer un nouveau plan de restructuration et va avoir besoin d?aide. Ce plan permettra au conseil d?administration d?Air France-KLM de se de prendre une position, à la rentrée ou à l?automne, sur l?avenir de son partenariat avec la compagnie italienne, dans laquelle le groupe français détient 25% du capital. Car la question d?une augmentation de capital d?Alitalia va se poser et Air France-KLM devra se prononcer sur une prise de contrôle de la compagnie italienne ou du suivi de cette augmentation du capital à hauteur de sa participation.

En raison de la situation de la compagnie italienne, de sa dette importante (1 milliard d?euros), des difficultés du marché italien, mais aussi de la situation d?Air France-KLM (qui n'a pas besoin de s'éparpiller), les sceptiques sont très nombreux dans le camp français. Car le risque d?exécution est important. Jean-Cyril Spinetta était l?un des rares à soutenir une acquisition d?Alitalia, le meilleur moyen, selon lui, pour préserver les positions du groupe sur le quatrième marché européen. En juin, il a d?ailleurs commandité une étude interne complète pour qu?Air France-KLM ait toutes les cartes en mains le jour où il faudra se prononcer. L?idée d?une offre conjointe avec un cavalier blanc est également possible. Deux noms ont été cités dans la presse. La compagnie d?Abu Dhabi Etihad Airways qui a bel et bien été approchée de manière officieuse, et Aeroflot, un scénario qui n?est pas jugé crédible en interne chez Air France.  
 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 36
à écrit le 27/07/2013 à 16:14
Signaler
Il faut que Air France garde cette image de qualité... chic etc mais faut qu'il le montre au voyageurs.. surtout sur les repas personnalisé selon la destination... Etant un indien ! je ne comprend pas pk ! il ont arreté la route CDG MAA (chennai) !...

à écrit le 04/07/2013 à 20:14
Signaler
mon dieu!! que de tergiversations! c'est simple pourtant: Alitalia est ingérable et c'est un AF puissance 10, donc ils n' ont qu' a se dem&rder et on les oublie. Une fois qu'ils auront disparus, qui nous empèche d'attaquer FCO et Milan de façon aggré...

à écrit le 03/07/2013 à 20:39
Signaler
licencié en 2007 , ça m'a permis de liquider mes actions à 36 euros . Y a toujours du plus dans le négatif.

à écrit le 03/07/2013 à 20:38
Signaler
Viré d'AF en 2007 , ça m'a permis de vendre mes actions 36 euros . Qd on voit le cours aujourd'hui, je vais mettre un cierge à celui qui m'a viré.

à écrit le 03/07/2013 à 19:02
Signaler
Air France? Je ne voyagerai plus jamais sur cette compagnie! Service client indigent, refus de me rembourser mes vols après annulation de la part de la compagnie alors qu'une loi européenne l'y oblige... bref, une compagnie qui finira par disparaître...

le 04/07/2013 à 16:15
Signaler
ça fait longtemps d'Air france ne fait plus cette ligne ...

à écrit le 03/07/2013 à 14:59
Signaler
Le 26 juin, un commandant de bord a fait un caprice. Sur son plateau de repas , il n?y a pas son yaourt ! Rendez-vous compte, il a été privé de dessert. Du coup il a boudé. Et quand un pilote d?Air France boude, cela coûte cher. Avec 44 minutes de r...

le 05/07/2013 à 6:56
Signaler
N'y voyez pas un caprice, chez un personnel AF ça s'appelle une évidence, celle de sucer sa boîte jusqu'au dernier centime et advienne que pourra du moment qu'on ait pu en profiter allègrement.

à écrit le 03/07/2013 à 12:46
Signaler
Soit les syndicats acceptent des efforts pour sauver leur entreprise. Soit l'entreprise coule et des milliers d'emplois seront supprimés. Vaut-il mieux gagner moins et travailler plus ou se retrouver au Pole emploi?

le 04/07/2013 à 6:39
Signaler
Malheureusement, "bon sens" sont deux mots inconnus des syndicalistes français !

le 04/07/2013 à 10:12
Signaler
Votre haine aveugle vous conduit à faire des procès d'intention et vous parlez sans savoir. Une majorité de syndicats d'Air France ont signé l'accord Transform 2015 puis l'accord sur te temps de travail au début de cette année. Renseignez vous

le 05/07/2013 à 6:53
Signaler
Ce ne sont donc pas les syndicats et les syndiqués qui prennent en hottage leur monde à chaque début de vacances? Qui sont donc ces rois de la grève si ce ne sont pas des syndicats, éclairez moi. Je ne voudrais pas salir des personnes qui sont blanc...

à écrit le 03/07/2013 à 10:56
Signaler
http://www.youtube.com/watch?v=qtm23R4CZt0

le 03/07/2013 à 12:07
Signaler
Mais arrêtez de sans cesse faire référence à ce reportage bidon faisant ds le journalistme sensationnel, basé sur des témoignages plus que douteux !!!

le 03/07/2013 à 12:35
Signaler
C'est sûr que ce type de reportage ne plaît ni à Air France ni au gouvernement car il faut se mettre en question. Malheureusement sans cela la compagnie va continuer à coûter très cher aux contribuables pour un résultat nul.

le 03/07/2013 à 13:32
Signaler
Rassurez vous, "en face": Air France a été privatisée en... '93. Depuis, l'argent que le principal actionnaire avait mis dans l'entreprise a été largement couvert par les dividendes. D'ailleurs, "Bruxelles" n'accepterait pas de subventions étatiques....

le 03/07/2013 à 14:18
Signaler
Revoyez vos classiques, Air France ne coûte rien au contribuable. Dire n'importe quoi pour se faire remarquer c'est facile. Par contre Ryanair qui reçoit des aides des chambres de commerce applique une règle simple pas d'aides pas de dessertes, d'ail...

le 03/07/2013 à 14:37
Signaler
non privatisée en 2004 au moment de fusion avec KLM et la dilution des parts de l'Etat, à 44%. Quant à Bruxelles, vous me faites rire, combien d'aides a reçu Alitalia en dépit de la devise one time last time? Et LOT aujourd'hui?

le 03/07/2013 à 16:37
Signaler
Vous nous faites rire on parle d'Air France où vous avez des infos classées secret défense.

le 03/07/2013 à 17:07
Signaler
Hé non; en '93, la "compagnie nationale" a quitté le giron "public" de l'Etat français; pour rejoindre le droit privé en se muant en Société. Pour laquelle il n'est pas interdit que le majorité soit "à capitaux publics"; mais qui relève du droit comm...

le 03/07/2013 à 19:27
Signaler
Vous délirez tous. Entre une possibilité et le passage à l'acte y a une différence de taille que vous ne voyez pas visiblement. C'est pas la même chose quand on 100% du capital aux mains de l'Etat même si l'on se mue en société comme vous dites, et u...

le 03/07/2013 à 20:43
Signaler
Si délire il y a, c'est sans doute du à votre emploi du terme contribuable. Lors de la "privatisation" de '93, l'Etat n'avait déjà plus 100%. Et sa part s'est bien sûr retrouvée diluée lorsque le groupe Air France KLM a été constitué. Néanmoins, si v...

le 03/07/2013 à 22:32
Signaler
le mieux, ce serait de le faire depuis l'origine d'AF. Jusqu'à l'arrivée de Spinetta, l'Etat a toujours aidé AF (par divers organismes, comme le FDES), et ce ne sont pas les dividendes jusqu'en 2009 qui compenseront tout cela. Pour en revenir à vot...

le 03/07/2013 à 23:35
Signaler
C'est bien; vous commencez à comprendre... la différence entre entreprise publique, et entreprise de droit privé. La référence à Blanc, c'est un peu dommage, lorsqu'on connait un peu le personnage... et la manière qu'il a eue de disparaître des radar...

le 04/07/2013 à 0:10
Signaler
Je crois qu'avec vous, on à faire à champion du monde qui ne perçoit pas le deuxième degré. Style un fameux dîner. Allez, vaut mieux continuer à en rire. Le franchouillard vous salue.

à écrit le 03/07/2013 à 10:46
Signaler
Qui a dit que le low cost dans le paysage français ça ne marcherai pas? Qui a construit un réseau en radiales sur Orly et Roissy laissant le point à point aux low cost? Pourquoi les contraintes internes dans le groupe Air France empêchent de position...

à écrit le 03/07/2013 à 9:59
Signaler
Il a la tête de son bilan : bien tristounet .

à écrit le 03/07/2013 à 9:41
Signaler
Comme d'habitude ça va négocier, des mesures vont être prises mais insuffisantes parce qu'elles auraient dû être décidées bien avant. Toujours en retard, toujours plus de dettes. Combien de temps est-ce que ça tiendra?

le 03/07/2013 à 10:20
Signaler
@Pierre: très bonne analyse.Cela me rappel le gouvernement français...(aussi actionneur de AF et toujours en retard sur tout..)

à écrit le 03/07/2013 à 9:09
Signaler
Analyse très lucide de la situation.

à écrit le 03/07/2013 à 8:03
Signaler
Depuis des annees la classe bien pensante francaise (politiciens, medias, dirigeants d'AF) n'a pas cessé d'essayer de casser le model economique des "Low cost". Aujourd'hui, apres tant d'annees ils viennent a peine de realiser qu'AF doit devenir low ...

le 03/07/2013 à 9:52
Signaler
Enfin soyons sérieux 2 minutes tout le monde connaît le modèle économique de Ryanair qui est proprement scandaleux ! Chantage au CCI, subventions publiques versées, contrat de travail de droit Irlandais, conditions d'emplois qui ferai pâlir d'envie u...

le 03/07/2013 à 10:16
Signaler
Je serais curieux de savoir si Ryanair serait aussi "lucrative" si on supprimait d'un seul coup toutes les subventions dont elle bénéficie...

le 04/07/2013 à 19:51
Signaler
La est sans doute le problème les compagnies low cost bénéficiant de subventions et de législations sociales dégradées. Faut-il un nivellement par le bas des salaires et conditions d'exploitation pour être efficace ou bien augmenter les salaires à Ai...

le 06/07/2013 à 12:14
Signaler
Ryannair: 500 M? de bénéfice, avec 800 M? d'aide. C'est en réalité la compagnie la plus mal gérée du secteur.

le 07/07/2013 à 6:43
Signaler
Des sources officielles? Ou on doit juste se fier à vos dires?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.