Rachat d'ITA Airways (ex Alitalia) : Air France-KLM l'emporte sur Lufthansa

Le ministère de l'Economie italien a annoncé mercredi avoir retenu l'offre du fonds d'investissement américain Certares, associé à Air France-KLM et Delta Air Lines, pour le rachat de la compagnie publique ITA Airways en vue de l'ouverture de négociations exclusives.
Léo Barnier
Air France-KLM, aux côtés de Certares et Delta Air Lines, est désormais en pôle pour la prise de contrôle d'ITA Airways.
Air France-KLM, aux côtés de Certares et Delta Air Lines, est désormais en pôle pour la prise de contrôle d'ITA Airways. (Crédits : REMO CASILLI)

Air France-KLM serait-il enfin en passe de réussir en Italie ? Le ministère de l'Economie et des Finances italien vient d'annoncer ce 31 août l'ouverture de négociations exclusives avec le consortium formé par Certares Management, Delta Air Lines et Air France-KLM pour l'acquisition d'une partie du capital et la prise de contrôle de la compagnie aérienne étatique ITA Airways, qui a pris la succession d'Alitalia voici un an.

Le groupe français et ses alliés américain prennent ainsi le pas sur le groupe allemand Lufthansa associé à l'armateur italo-suisse MSC, pourtant longtemps favoris. Le gouvernement italien a jugé que leur offre était « plus conforme aux objectifs fixés par le décret du Premier ministre ». Adopté en février, celui-ci actait la privatisation d'ITA Airways dont les capitaux sont pour l'instant entièrement publics.

Dans sa communication, le ministère de l'Economie et des Finances prévient tout de même qu'à « l'issue des négociations exclusives, des accords contraignants ne seront signés que si leur contenu est pleinement satisfaisant pour l'actionnaire public ». La durée de cette période de négociations ou les montants proposés n'ont pas été communiqués.

L'Etat italien reste au capital

Selon le quotidien Il Messaggero, tel que rapporté par l'AFP, le fonds Certares, spécialisé dans le tourisme, a proposé le rachat de près de 56% d'ITA pour environ 600 millions d'euros. L'Etat italien conserverait ainsi une part de 44% et disposerait de deux sièges sur les cinq que comptera le futur conseil d'administration de la compagnie.

La répartition entre les trois partenaires n'est pas connue pour l'instant. Seule certitude, la marge de manœuvre d'Air France-KLM est pour l'instant limitée par la Commission européenne dans l'attente du remboursement de 75 % des aides d'Etat reçues pendant la crise. Le groupe n'est plus très loin de ce seuil depuis sa recapitalisation ainsi que l'investissement de 500 millions apporté par le fonds Apollo Global Management dans une filiale opérationnelle d'Air France. Mais en attendant, il ne peut pas acquérir plus de 10% dans une entreprise du secteur.

Une solution évoquée par un connaisseur d'Air France-KLM pourrait être un pacte avec Certares et Delta Air Lines, lui permettant de pousser plus en avant sa participation dans un deuxième temps, une fois les contraintes européennes levées.

Incertitude politique

Autre incertitude, le gouvernement italien pourrait changer de tête à l'issue des élections législatives qui se tiendront le 25 septembre. En tête pour le moment des intentions de vote, Giorgia Meloni, présidente du parti d'extrême droite Fratelli Italia, avait d'ailleurs sommé le Premier ministre démissionnaire Mario Draghi de ne pas hâter une décision.

A l'inverse, Carsten Spohr, le PDG de Lufthansa avait envoyé une lettre cet été à Mario Draghi pour lui demander d'aller vite et prévenir « que (sa) patience n'est pas illimitée ». Après avoir formulé une offre fin janvier, le groupe allemand et son allié MSC n'avaient pas réussi à obtenir une période de négociations exclusives de 90 jours de la part de l'Etat italien, décidé à laisser d'abord jouer la concurrence.

Reuters indiquait alors que Lufthansa souhaitait acquérir 20 % du capital de la compagnie publique italienne, tandis que son partenaire visait 60 %. L'AFP parle de son côté, d'une offre évaluée autour de 1,4 milliard d'euros en janvier, ramenée à 850 millions d'euros en raison de la détérioration du marché aérien attendue après l'été.

Cela fait une quinzaine d'années que cet affrontement pour s'imposer en Italie dure entre Lufthansa et Air France-KLM , après de nombreuses passes d'armes faites du temps d'Alitalia. Pourtant, ITA Airways n'est encore qu'un ersatz de l'emblématique compagnie italienne. Malgré une multiplication d'annonces, sa flotte est encore limitée avec moins d'une soixantaine d'appareils, dont huit long-courriers A330 et A350. Le plus gros de l'effort est encore à venir pour atteindre 78 appareils d'ici la fin de l'année et 105 d'ici fin 2025. Pour cet été, son programme comprend 64 destinations, dont 23 domestiques, 34 régionales et 7 intercontinentales. C'est 20 de plus qu'il y quelques mois, mais la compagnie est encore loin des cadors du secteur.

En revanche, s'allier à ITA Airways est sans doute le meilleur moyen de s'implanter fortement sur le puissant marché italien. Avant crise, il s'agissait du 5e marché européen avec plus de 150 millions de passagers, qui occupait même la 4e place en ne comptabilisant que le trafic international. Le nord du pays desservi par l'aéroport de Milan, sur lequel ITA Airways a réussi à conserver l'essentiel des créneaux horaires d'Alitalia, constitue un important bassin de trafic affaires, avec une forte rentabilité.

Le réseau hérité d'Alitalia offre d'importantes synergies avec celui de Lufthansa et d'Air France, avec une forte implantation à Milan et son important trafic affaires ainsi qu'à Rome et son formidable potentiel touristique. Formidable atout sur le papier, cette dichotomie a pourtant été l'une des principales faiblesses d'Alitalia.

Léo Barnier

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Commentaires 8
à écrit le 09/09/2022 à 13:39
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Valait il mieux être tout petit chez Skyteam ou nain chez Star alliance que les allemands dirigent d'une main de fer? ça marche aussi pour les JV respectives. Le gouvernement Italien a quand même la mémoire courte, ce n'est pas la 1er fois qu'on fa...

à écrit le 01/09/2022 à 15:43
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Cette décision peut paraître étonnante mais il faut sans doute la mettre en perspective avec la performance d’AF cet été . Les résultats ne sont bien évidemment pas encore fixés ni publiés pour le troisième trimestre mais il y a fort à parier qu’ils ...

à écrit le 31/08/2022 à 21:41
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Bonjour, la bonne question est de savoir combien cela vas coûter à la France... Ensuite allons nous avoir le courage de faire les réformes structurelles pour que cette entreprise puissent devenir viable économiquement... Voilà les bonne question...

à écrit le 31/08/2022 à 20:57
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iTa ex alitalia perdait 150 millions par an . apres la faillite et la restructuration de combien est le déficit structurel de cette compagnie? alitalia avait ke même problème structurel que airfrance. salaire trop élevé et heure de travail trop faibl...

à écrit le 31/08/2022 à 19:31
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Si on additionne deux malades (AF et Alitalia) cela va faire un athlète surpuissant. Je me demande juste, qui va payer les dégâts..., certainement pas les américains.

le 01/09/2022 à 15:29
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Peut être parce qu’Air France est ( un peu ) moins malade que ses consœurs LH et BA ? Regardez les résultats du T1 et du T2 …. Si AF a réalisé par le passé de moins bons résultats financiers c’est en grande partie du fait de la surtaxation spécifiq...

à écrit le 31/08/2022 à 13:00
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Le néo-libéralisme fou ! Air France avait déjà eu une forte participation dans Alitalia... pourquoi aujourd'hui racheter cette compagnie qui est ingérable ?!

à écrit le 31/08/2022 à 12:38
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ITA à peine crée déjà rachetée ?! Et avec l'aval du PM ?! Dans quel monde vit-on ??

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