Vieux réflexe

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Des membres du parti des Verts manifestent devant le parlement européen contre l'exploitation du gaz de schiste. Copyright Reuters

Outre Manche, le gouvernement de David Cameron s?encombre moins de précautions écologiques que celui de François Hollande sur la question du gaz de schiste. Car si l'activité était suspendue dans le nord du pays depuis plus d?un an, c?était d'abord en raison des risques liés à la forte probabilité de tremblements de terre.

L?activité minière ou l'exploitation de l'or noir n?est pas bien vue en Occident. Aux Etats-Unis, par exemple, pas une seule nouvelle raffinerie pétrolière n?a été construite depuis des décennies, on les a plutôt bâties en Jamaïque, dans les Caraïbes. Les autorités y sont en effet moins pointilleuses, écologiquement parlant.

Il est vrai que les dégâts causés par l?environnement sont réels, et personne ne souhaite voir son paysage saccagé par des engins mécaniques et une activité plutôt salissante. C?est le fameux réflexe « nimby », « Not in my back yard », en français « Pas dans mon jardin ».

Aussi lorsque les gouvernements autorisent ce type d'exploitation, ils la justifient par deux arguments : l?indépendance énergétique et la création d?emplois. Des arguments à relativiser. En effet, dans une économie globalisée, on peut considérer que l?approvisionnement en énergie n?est pas un problème, et il s?avère plus rentable d?acheter du gaz naturel, du charbon ou du pétrole sur le marché international à des producteurs qui font les investissements nécessaires, de l?extraction jusqu?à la livraison pour fournir ces produits.

Quant à la création d?emplois, les financements exigés par ses projets nécessitent de telles aides publiques que leur rentabilité est loin d?être évidente, et conduit souvent au bout d'un certain temps à constater que les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous.

En fait, les Etats - et les opinions publiques - restent tellement prisonniers d?une réflexion nationale en ces matières qu?ils créent sans s'en apercevoir une distorsion dans le fonctionnement de leur économie, qui est, pour le pire comme pour le meilleur, intégrée aujourd'hui à la mondialisation. Ils prennent la partie pour le tout.

En effet, il y a encore une quarantaine d?années, chaque pays se devait d?avoir la main haute sur son secteur national d?énergie, d?acier ou encore financier. Ainsi, à l?époque, un Etat  se focalisait davantage sur le niveau de son stock de charbon pour fournir les citoyens et les entreprises plus que sur son prix. Cette époque est révolue.

Aujourd'hui, tout pays peut trouver du charbon sur le marché international. Des importations dont les volumes et les prix peuvent être sécurisés à travers des contrats de long terme ou sur les marchés par des produits dérivés.

La France, elle, doit gérer aujourd'hui un parc nucléaire construit dans les dernières décennies dans ce cadre national. Une gestion qui reste sous l'oeil attentif et critique des écologistes. Comparons la filière nucléaire à celle pétrolière, aujourd'hui intégralement privée, qui fonctionne depuis des décennies sans jamais avoir de pénurie de produits raffinés, et qui est même un grand fournisseur de taxes pour l'Etat.

Quant à la sidérurgie française, elle a coulé dans les années 1980. Faut-il rappeler qu?Arcelor avant l?OPA de Mittal Steel n?était pas une entreprise française mais l'agglomération de plusieurs sidérurgies nationales consolidées à coup de milliards de francs, et dont le siège se trouvait au Luxembourg.

Aussi, vouloir à tout prix sauver les hauts fourneaux de Florange aujourd?hui, pour produire de l?acier brut, relève davantage d?une logique politique qu?économique dont le coût pourrait s'avérer au final coûteux.

Il en est de même en finance. On rappellera le naufrage du Crédit Lyonnais qui fut un gouffre pour les finances publiques. Et la crise européenne aura révélé dans quel état calamiteux se trouvait une partie du système bancaire dans l'UE, trop proche des autorités, surtout locales, comme le montre le cas espagnol et ses « cajas ».

Aussi, l?approbation par les chefs d?Etat et de gouvernements européens du principe d?une supervision bancaire des établissements de la zone euro, l'union bancaire, va dans le bon sens. L'harmonisation des régles qui régissent le système bancaire européen va enlever aux autorités ce penchant à vouloir avoir son propre bras armé financier.

On remarquera toutefois que l?Allemagne a réussi à exclure ses banques régionales, le sujet étant très politiquement délicat pour une chancelière qui souhaite se faire réélire en 2013. Encore le vieux réflexe national.

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Commentaires 2
à écrit le 14/12/2012 à 8:46
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Bien sure que Florange est politique, l'etat se bat (enfin si on veut) pour sauver 1000 emplois et oublie des filiere entiere de 100.000 emplois

à écrit le 14/12/2012 à 8:46
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Bien sure que Florange est politique, l'etat se bat (enfin si on veut) pour sauver 1000 emplois et oublie des filiere entiere de 100.000 emplois

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