Etats-Unis : la grande distribution des prix continue

Les cleantechs américaines attendent la manne : l'immense loterie industrielle dotée de près de 40 milliards de dollars de subventions, organisée par le gouvernement Obama. Des centaines, voire des milliers d'entreprises américaines de tous les secteurs de l'environnement vont en profiter, des fabricants de batteries électriques à ceux de compteurs intelligents, de matériaux d'isolation ou de biocarburants, ainsi que les universités et centres de recherche, les collectivités et les Etats pour financer leurs subventions locales.

Par cet effort sans précédent, Obama veut faire des Etats-Unis un leader mondial de l?industrie verte et créer des millions d?emplois verts ? et au passage redonne à l?Etat fédéral un poids inédit comme moteur de ce nouveau secteur économique.

Ces fonds sont distribués par le DOE (Department of Energy) dans le cadre du plan de relance du gouvernement Obama, l?ARRA (American Recovery and Reinvestment Act), doté au total de 800 milliards de dollars.

L?ARRA (dont une bonne partie a servi à renflouer les banques), comporte, selon le calcul de la banque HSBC, au total 130 milliards pour les secteurs liés à l?environnement : outre les subventions industrielles du DOE, une série d?autres aides ciblent les industries déjà implantées, notamment 60 milliards pour construire des centrales d?énergies renouvelables, 5,5 milliards pour rénover les édifices publics et 30% de crédits d?impôt pour les particuliers qui installent de l?éolien ou du solaire, sans oublier un bonus pour l?achat de voitures propres (l?ensemble des mesures vertes du Plan Obama sont détaillées ici).

Les aides du DOE soutiennent de préférence, de manière sélective, les industries naissantes, qui n?ont pas encore de solide modèle économique, ainsi que la recherche.

Le DOE est donc devenu le pilote de l?industrie des cleantech de demain aux Etats-Unis. Il lui aura fallu plusieurs mois pour lancer cette machine à cash, mais désormais, chaque semaine ou presque, il dévoile de nouvelles tranches de financement destinées à tel ou tel secteur, et les candidats petits et grands s?alignent pour tendre la main. De General Motors à la moindre start-up, tout le monde veut en profiter.

Les annonces de subventions tombent quasiment chaque jour, avec la liste des heureux élus. Dernière en date cette semaine, l?annonce de 300 millions d?euros de subventions pour financer des véhicules propres : un saupoudrage à 25 projets dans tout le pays ? flottes d?entreprises, de municipalités, d?écoles?? qui financeront l?achat de 9.000 véhicules propres (bus, voitures?) marchant aux carburants alternatifs ou, pour une très petite partie, à l?électricité, ainsi que l?installation de 542 stations de carburants propres ou quelques stations de recharge électrique. De quoi éviter, selon le DOE, la consommation de 152 millions de litres d?essence par an. Le principe cette fois est d?un tiers de financement par le DOE, 2/3 par les promoteurs du projet.

Des choix stratégiques

Impossible de récapituler la kyrielle de « petits » financement annoncés ? 100 millions par ci ou par là pour des projets d?énergie propre dans tel ou tel Etat, 300 millions pour des recherches scientifiques pointues, bref tout un inventaire ? ? mais ce saupoudrage ne doit pas masquer les grands choix qui se dessinent au vu des plus gros financements du DOE annoncés ces dernières semaines :

? 2,4 milliards viennent d?être alloués aux batteries et réseaux de stations de recharge pour voitures électriques. Au total 19 fabricants bénéficiaires, dont en tête Johnson Controls avec 299 millions, le nouveau fabricant A123 (249 Millions), LG Chem avec 151 M (pour fabriquer les batteries de la future Chevrolet Volt de General Motors), le français Saft, l?un des très rares groupes étrangers primés (Lire notre article La bonne affaire américaine de Saft), et General Motors avec au total 241 millions. En outre, 100 millions viendront aider ETEC et Nissan à tester le déploiement de 5.000 voitures électriques Nissan d?une autonomie de 160 km ainsi que 12.750 stations de recharge dans 11 villes, incluant Washington D.C., Phoenix, Seattle, San Diego et Tucson. (Annonce du 5 août)

? 3,9 milliards seront attribués aux projets de smartgrid, concrètement pour aider les multiples compagnies d?électricité américaines à installer des compteurs intelligents chez leurs clients, puisque Barack Obama veut faire installer aux Etats-Unis 40 millions de compteurs intelligents. Les attributions seront annoncées en octobre. Plus d?une vingtaine de compagnies d?électricité ont demandé des fonds ? elles avaient jusqu?au 6 août pour déposer leurs dossiers. Le détail de ce plan d?aide est ici (PDF). (Annonce du 23 juin)

? 2,4 milliards d?aides aux projets de captage et stockage du co2 dont 1,5 milliard aux projets industriels à grande échelle. (Annonce du 15 mai)

? 2,3 milliards ont été alloués aux fabricants d?équipements pour les énergies nouvelles (production de cellules solaires, éoliennes, piles à combustible, batteries électriques, système de stockage d?énergie, captage du CO2?) pour les nouveaux sites industriels ou les agrandissements de sites existants, d?ici fin 2010

? 3 milliards sont prévus pour l?instant pour les producteurs d?énergies renouvelables, sous forme de crédits d?impôt.

Hors DOE, le gouvernement américain a aussi décidé, en septembre 2008, d?offrir 25 milliards de prêts à faible taux aux constructeurs automobiles pour les aider à doper les voitures électriques, ce qui coûtera 7,5 milliards au budget fédéral. Après des mois de suspense, Barack Obama a annoncé les trois premiers gagnants en juin : le nouveau venu Tesla va recevoir un prêt aidé de 465 millions pour monter une usine de sa Model S et de batteries en Californie, Nissan recevra 1,6 milliard pour une usine de batteries et de voitures électriques dans le Tennessee et Ford a obtenu 5,9 milliards pour améliorer l?efficacité de ses voitures.

Et puis le gouvernement américain a aussi indiqué que les principes de 30% de crédits d?impôts pour les producteurs d?énergies renouvelables (installateurs de parcs éoliens, solaires?) représenteront 3 milliards de dollars d?ici fin 2010.

Un pilotage fin

Dans un pilotage bien plus fin, le Department of Energy lance aussi des appels à projets très pointus, qui orientent la recherche et le développement « verts » dans les directions souhaitées par son patron, le Prix Nobel Steven Chu, Secrétaire à l?Energie. Les candidats ont quelques mois pour déposer leur dossier mais l?attribution des aides peut prendre ensuite des mois.

Par exemple, la semaine dernière, le DOE a promis 52,5 millions de dollars à un système d?énergie solaire à concentration capable de stocker l?énergie le jour pour la restituer la nuit. Il a aussi sélectionné 28 « nouveaux » projets éoliens qui recevront au total 13,8 millions, pour ceux qui proposeront des pales plus performantes. Ou encore, 21,4 millions aux collectivités qui installeront un réseau d?énergies renouvelables à grande échelle, 6,3 millions seront donnés à des recherches sur les biocarburants tirés de toutes sortes de plantes, des peupliers à l?alfalfa ou au switchgrass, etc.

S?y retrouver dans ce dédale de programmes d?aides est terriblement ardu. C?est pourquoi certaines firmes comme Strategic Partnerships se sont spécialisées dans l?aide aux candidats aux subventions. Car les aides « vertes » du DOE sont encore très loin d?être épuisées : pour l?instant, seules environ 20% ont été distribuées. La manne continue. On peut la suivre en direct sur le site du DOE.

A titre de comparaison, la Chine reste leader des plans d?aides au secteur vert avec plus de 198 milliards d?investissements verts, toujours selon HSBC. C?est par ailleurs le pays dont les entreprises devraient le plus profiter des investissements verts dans le monde dans les prochains mois. La France va pour sa part mettre sur la table quelque 2 milliards d?euros, soit 8% de son plan de relance de 33 milliards de dollars présenté en 2008 (26 milliards d?euros).

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Enfin, après le mutisme chinois et américain sur les accords de Kyoto il a fallu attendre une crise mondiale pour réveiller nos géants. Demain, la planète se réveillera économiquement par ses "emplois verts"...Ouf ! Mais enceinte et -telle une fumeus...

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