First Solar menace d'annuler son projet d'usine solaire en France

Par latribune.fr  |   |  717  mots
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Ce serait un coup dur pour l'industrie solaire française et pour la région bordelaise : le projet d'usine de cellules photovoltaïques à couches minces du leader américain First Solar, qui était prévue en partenariat avec EDF EN en Gironde pour un démarrage en 2012, "le" grand projet solaire de l'Hexagone applaudi par le gouvernement, risque de partir en fumée. Pour cause de valse des décisions sur le solaire et du récent gel des aides et des menaces de quotas des installations aidées.

En annonçant ses prévisions de résultats, hier, au cours d'une conférence téléphonique avec les journalistes, le PDG du groupe, Rob Gillette, a lâché qu'en raison des incertitudes sur le tarif de rachat de l'électricité solaire en France et d'autres nouvelles règles défavorables, le projet de construire l'usine pourrait être reporté ou même carrément annulé, et qu'une décision serait prise après discussions avec le gouvernement français.
En ce cas, les équipements commandés pour l'usine de Gironde seraient réinstallés dans d'autres usines en construction ou prévues.

Une usine très convoitée en France...
Selon le projet initial, l'usine doit en principe atteindre une capacité de plus de 100 MW en 2012 et créer, à terme, près de 400 emplois. First Solar doit en assurer l'exploitation mais l'intégralité de la production sera réservée à EDF EN, l'un des plus gros clients du groupe américain, pendant dix ans.
Le choix de son implantation avait donné lieu à une sévère compétition entre de nombreux territoires et c'est finalement Blanquefort, dans la banlieue de Bordeaux, qui l'avait emporté fin 2009. Le site doit recevoir des millions d'euros de subventions de la part de l'Etat et des collectivités. Mais la construction, qui devait démarrer au second semestre 2010, a pris du retard, ce qui a alimenté les rumeurs sur un possible renoncement de First Solar il y a quelques mois.
Mais aujourd'hui, c'est son PDG qui freine officiellement, même s'il ne ferme pas complètement la porte. "Nous espérons lever cette incertitude avec le gouvernement français dès que possible", a-t-il déclaré.
Restent plusieurs projets d'usines de panneaux solaires en France, dont celui de Bosch à Venissieux, de 150 MW, ou de Total en Moselle (capacité de production de 50 MW). La capacité de production totale de l'Hexagone dans la photovoltaïque est aujourd'hui modeste, d'environ 420 MW, avec, parmi les principaux industriels, Tenesol, Fonroche ou encore Photowatt.

... mais pas essentielle pour le groupe américain
L'usine française est loin d'être essentielle pour le groupe américain. Hors ce projet, First Solar comptera au total 11 nouvelles usines en 2011, puis 10 autres en 2012, ce qui doublera presque sa capacité de production.
First Solar prévoit notamment une usine au Vietnam, entre autres, à Ho Chi Minh City, qui démarrera mi-2012, une en Allemagne et un nouveau site aux Etats-Unis.

Prévisions relevées
First Solar a, par ailleurs, relevé ses prévisions de bénéfices pour 2011 et annoncé avoir encore vendu l'un des deux plus grands projets photovoltaïques du monde, la centrale d'Agua Caliente, en Arizona, à la compagnie d'électricité américaine NRG Energy, qui investira 800 millions de dollars dans la future centrale, avec d'autres investisseurs.
First Solar a multiplié les projets de grandes centrales pour assurer un débouché à ses panneaux solaires, qui sont parmi les moins chers du marché, et dont les coûts continuent à diminuer - tout comme ceux de ses concurrents qui fabriquent des cellules solaires classiques, en silicium. Mais M. Gillette s'est dit convaincu de garder un avantage de prix d'au moins 30% en 2011 par rapport aux panneaux classiques. Fin avril, il avait annoncé le rachat de NextLight, le n°2 américain dans le développement de projets, s'assurant ainsi une place de leader sur son marché domestique et un débouché pour ses panneaux.
First Solar attend désormais un bénéfice de 8,75 à 9,50 dollars par action pour des ventes en hausse de 46%, à environ 3,7 - 3,9 milliards de dollars (et 2 GW en volume), mieux que le bénéfice de 8,6 dollars par action et les ventes de 3,63 milliards attendus par les analystes.
Les ventes du groupe devraient se répartir entre les ventes de panneaux à hauteur de 2,8 à 2,9 milliards de dollars, plus 900 millions à 1 milliard en développement de centrales solaires.
Début décembre, son grand rival chinois Suntech Power Holdings a également relevé ses prévisions en tablant sur des ventes de 3,4-3,6 milliards de dollars et des ventes de 2,2 GW.
Des perspectives brillantes dues au boom du solaire de 2010, tiré notamment par l'Allemagne. Mais la baisse des tarifs aidés un peu partout en Europe (France, Espagne, Allemagne, Italie, République tchèque...) pourrait peser sur les prix et les marges des grands fabricants.