L'éolien français tourne de moins en moins rond

Par Dominique Pialot  |   |  416  mots
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La filière attend avec inquiétude la décision du Conseil d'Etat concernant l'arrêté tarifaire pour l'électricité produite par les éoliennes à terre. Si le Conseil d'Etat suit la position du rapporteur public de l'annuler, comme demandé par la fédération « Vent de colère », tous les projets seraient gelés pendant un an.

A quelques jours des premiers résultats de l'appel d'offres pour l'éolien en mer (annoncés par Jean-Louis Borloo pour le 6 avril), dont on commence à douter qu'il permette d'atteindre les 6.000 MW promis par le gouvernement, voilà qu'un nouveau coup est porté à l'éolien à terre.  " Vent de colère ", qui fédère près de 900 associations anti-éoliennes et avait déjà réussi à faire annuler pour vice de forme l'arrêté tarifaire du 10 juillet 2006, vient de lancer une tentative similaire avec le tarif actuellement en vigueur.

L'arrêté tarifaire du 17 novembre 2008, qui remplace celui de 2006, l'a fixé à 82 euros le mégawatheure. Suite à l'initiative de " Vent de colère ", devant le Conseil d'Etat le 12 mars dernier, le rapporteur public a préconisé  son annulation. En cause, l'absence de notification de ce tarif à la Commission européenne au titre d'aide d'Etat. Le gouvernement a estimé que cette déclaration, "qui serait une première" pour le Syndicat des énergies renouvelables (SER), n'était pas nécessaire. Mais l'inquiétude est grande au sein de la filière.

Si le Conseil d'Etat suivait la position du rapporteur public, il faudrait soumettre à Bruxelles un nouvel arrêté, ce qui pourrait prendre un an. Et dans l'intervalle, les projets seraient gelés. Pour le SER, cela menacerait la majorité des quelque 10.000 emplois que compte aujourd'hui le secteur, et entraînerait la faillite d'un tiers des acteurs de la filière, soit une soixantaine d'entreprises. Celle-ci est déjà fragilisée par les nouvelles exigences issues du Grenelle 2, qui accroissent la lourdeur réglementaire des dossiers, notamment l'inscription au régime des installations classées pour l'environnement (ICPE).

Une filière déjà fragilisée

La mise en redressement judiciaire du fabricant de mâts d'éoliennes Céole, implanté en Côte d'Or, illustre cette situation de fragilité. Plus globalement, le SER prédit qu'une telle annulation ne permettrait d'installer que 4 à 500 MW en 2012 au lieu des 1.000 prévus. Or ces installations se sont déjà en 2011 avérées inférieures aux prévisions et à la tendance à suivre pour atteindre les objectifs du Grenelle (19.000 MW en 2020, dont 12.000 restent aujourd'hui à installer...). Le délai d'installation d'une ferme éolienne en France est d'ores et déjà deux fois plus long que chez la plupart de nos voisins européens. Le verdict attendu dans les prochaines semaines, mais le mal est fait : les effets de la position affichée par le rapporteur public se font déjà sentir auprès des investisseurs.