156 millions d'euros pour les projets internationaux de Solairedirect

156 millions d'euros pour développer ses projets en France, en Inde et en Afrique du Sud. C'est l'annonce spectaculaire diffusée, mi-juin, par le spécialiste français du photovoltaïque Solairedirect. Thierry Lepercq - son PDG et fondateur - voit dans cette actualité la démonstration de la compétitivité du solaire français sur la scène internationale. Entretien.
Copyright : Solairedirect - Afrique du Sud

Cleantech Republic : Votre « levée de fonds» est constituée de capital et de dette bancaire, répartis entre plusieurs acteurs internationaux, et affectée à des projets précis. Comment peut-on qualifier ce financement ?

Thierry Lepercq : Aujourd?hui, les grands investisseurs, typiquement les fonds de pension ou les compagnies d?assurance, recherchent le mouton à cinq pattes : pas trop risqué, doté de rendements prévisibles et à long terme, sécurisé par des actifs, pas trop loin de chez-eux, et si possible reproductible pour répondre à leur besoins réguliers d?investissement. Le photovoltaïque répond parfaitement à ce cahier des charges pour peu que l?on fasse preuve d?un peu de créativité financière. Ce type de financement hybride est donc en quelque sorte une nouvelle classe d?actifs. C?est d?ailleurs une évolution possible, sinon probable pour Solairedirect, de devenir gestionnaire de fonds dédiés au photovoltaïque. Avec plusieurs centaines de mégawatts installés, un tel portefeuille de parcs solaires aurait une valeur stratégique et des performances financières considérables.

Quels sont les rendements promis à vos investisseurs ?

Les TRI (ndlr : taux de rentabilité interne) attendus diffèrent selon les pays. En France, les projets financés à 100% en capital donneront 6%, et ceux utilisant du « leverage » par dette bancaire plutôt 8 à 9%. Les projets indiens et sud-africains offriront des rendements respectifs de 13 à 14% et 15 à 17%. Attention, il faut y ajouter la valorisation des actifs, et notamment les emplacements de nos parcs, qui seront rares dans quelques dizaines d?années car ils allient un fort ensoleillement et une bonne connexion au réseau. C?est d?ailleurs pourquoi nous sommes particulièrement attentifs à la maîtrise du foncier dans nos projets, soit en achetant les terres, soit en signant des baux de 40 ans.

Vous avez monté ces projets sur des tarifs de vente proches de 100 ? par MWh. On est encore loin des prix de marché SPOT, inférieurs à 50 ?/MWh. Vous considérez pourtant vous approcher de la parité réseau. Expliquez-nous.

En Inde ou en Afrique du Sud, les prix de gros sont en hausse, et dépassent déjà 70 à 80 ?/MWh? En Europe, nous assistons malheureusement à l?effondrement du système électrique : la consommation a chuté de 5,4% en un an et nous sommes en surcapacité structurelle, aggravée par l?injection prioritaire des EnR dont la puissance installée a quasiment décuplé en 10 ans. En l?état, le marché SPOT ne permet à aucun acteur d?investir dans de nouvelles capacités de production. Autrement dit, à 50 ? du MWh, tout le monde perd de l?argent, et certains énergéticiens préfèrent même fermer des centrales. Au final, nous estimons qu?autour de 100 ?/MWh, nous sommes compétitifs avec l?éolien terrestre et le gaz. Enfin, merci de rappeler que les prix de l?électricité photovoltaïque ont été divisés par 3 en quelques années ! Cette diminution cache des efforts et des progrès considérables pour les producteurs que nous sommes.

Justement, quelle est la recette de Solairedirect pour s?imposer malgré la crise ?

C?est effectivement une recette car tous les ingrédients sont importants. Elle repose d?abord sur les hommes : nos collaborateurs sont tous de très haut niveau, et les 7 associés fondateurs de 2006 sont encore là. Je pense qu?il faut une certaine stabilité pour réussir dans ce métier. Ensuite, nous sommes une entreprise duale : à la fois très pointue dans chacun de ses domaines, et très transversale. Nous appliquons le fameux « Think global, act local » : le développement, la construction, l?exploitation et le financement de nos parcs solaires sont « industrialisés », c?est à dire que nous prenons en main toute la chaîne photovoltaïque, depuis la cellule jusqu?à la vente de l?électricité produite. L?ingénierie - technologique, financière ou commerciale - est relativement centralisée, mais nous impliquons systématiquement l?écosystème local de nos parcs, par exemple en créant une usine de production de panneaux. Cet ancrage local est fondamental car il correspond à la bonne granularité des parcs solaires, que je qualifie de taille « municipale ».

Effectivement, vos projets couvrent une plage de puissance de 5 à 20 MW. On voit pourtant se monter de grands parcs de plus de 100 MW...

Ces grandes puissances sont à notre avis trop élevées. Elle posent des problèmes de raccordement au réseau et de stabilité : quid lorsqu?un nuage passe au dessus ? Le réseau perd subitement 100 MW ! De plus, les économies d?échelles entre 10 MW et 100 MW sont assez faibles. A l?inverse, et pour en avoir installé quelques milliers, nous savons désormais que les installations en toitures sont trop petites pour être rentables.

La puissance idéale serait donc « moyenne »?

Oui, et d?ailleurs elle fait consensus car elle offre une certaine souplesse vis à vis du réseau, ne pose pas de problèmes de voisinage, et s?insère légitimement dans les projets d?aménagement du territoire des élus locaux, qui y voient avec raison une activité pérenne et utile à la collectivité. Cette approche est d?ailleurs autant valable dans les régions Françaises que dans un état Indien ou une commune Sud-Africaine.

* Nota : l?évolution du chiffre d?affaires en 2012 s?explique par la forte baisse des prix, alors même que les volumes on été en hausse. La baisse corrélative de ses coûts a permis à le maintien de la rentabilité et Solairedirect prévoit un doublement de son chiffre d?affaires et de ses résultats pour l?exercice 2013.

SolaireDirect en bref?

  • Activité : opérateur intégré de production d?électricité solaire
  • Effectifs : 250 personnes sur 4 continents
  • Puissance installée au 30 juin 2013 : 260 MW
  • Chiffre d?affaires 2012 : 126 M?* (résultat net 10 M?)
    Dernière levée de fonds : 156 M? (dont 60 M? en capital et 96 M? en dette bancaire) Projets financés : 9 en France, 1 en Inde, 2 en Afrique du Sud

Cleantech Republic

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Commentaire 1
à écrit le 05/08/2013 à 10:05
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"Les TRI (ndlr : taux de rentabilité interne) attendus diffèrent selon les pays. En France, les projets financés à 100% en capital donneront 6%, et ceux utilisant du « leverage » par dette bancaire plutôt 8 à 9%. Les projets indiens et sud-africains ...

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