Hydrogène : « La filière française va enfin décoller »

Par Olivier Barrellier / Cleantech Republic  |   |  610  mots
Station service hydrogène 700 bars (Logic H2) ouverte au Danemark en juin 2011
Après avoir reçu officiellement le rapport parlementaire « L’hydrogène : vecteur de la transition énergétique ? », Arnaud Montebourg a déclaré, le 20 janvier dernier, sa flamme à cette « molécule extraordinaire ». Interview de Pascal Mauberger, Président de l’Association Française pour l’Hydrogène et les Piles à Combustible (AFHYPAC) et Président du directoire de McPhy Energy.

Cleantech Republic : Que pensez-vous des préconisations du rapport parlementaire ?

Pascal Mauberger : Elles nous conviennent tout à fait, et sont d'ailleurs tout à fait conforme aux messages que nous avions envoyés aux parlementaires lors de leurs travaux. Les cinq grandes propositions sont synergiques et nécessaires à la création d'un véritable écosystème. L'évolution de la réglementation vers plus de souplesse, de simplicité, et surtout vers l'harmonisation européenne, est néanmoins un préalable à toutes les autres. Notre association y travaille d'ailleurs depuis plusieurs années : les technologies et l'expérience acquise par les industriels permettent désormais de considérer l'hydrogène comme n'importe quel carburant. Nous sommes donc à la fois satisfait par le rapport et optimistes pour le décollage de l'hydrogène en France.

Pourtant le rapport annonce « dix ans de retard » pour la filière…

Il faut préciser cette affirmation pour la nuancer. Certes le marché français est à la traine, mais c'est loin d'être irréversible : l'Allemagne ne dispose pour l'instant que d'une quinzaine de stations-services hydrogène ! En revanche, plusieurs entreprises françaises sont des championnes du sujet, et déjà très actives hors de nos frontières (ndlr : Air Liquide, McPhy, Symbio FCell…). On trouve également des labos de R&D de premier plan dans l'hexagone. Enfin, « qui peut le plus, peut le moins » : les industriels français du secteur ont dû œuvrer à l'étranger pour se développer, ils sont donc opérationnels à 100%, expérimentés, et dans les starting-blocks pour créer une filière nationale. Je suis donc très confiant : nous allons rattraper le retard pour peu que l'environnement politico-réglementaire soit favorable.

Vous êtes donc également satisfait de la prise de position d'Arnaud Montebourg ?

Bien sûr. Ses déclarations du 20 janvier sont pour nous un événement fondateur : c'était le message politique fort nécessaire au lancement. Le ministre a bien compris les enjeux de l'hydrogène : une énergie locale, créatrice d'emploi et de valeur (ndlr : le ministère annonce plusieurs milliard d'euros par an d'ici 10 à 15 ans), bonne pour la balance commerciale - on exporte de la technologie et des services, tout en limitant l'importation d'hydrocarbures -, et même « bon marché ».

Qu'attendez-vous de sa « feuille de route » ?

Un phasage cohérent. Et comme je le disais, d'abord simplifier la réglementation. Ensuite amorcer la pompe de la mobilité par un plan de déploiement et la commande publique pour des flottes de véhicules, tout en soulageant les risques d'implantation des stations-services hydrogène par une fiscalité attractive pour l'usager final. Enfin, la mise en œuvre rapide du plan « autonomie et puissance des batteries » (ndlr : l'un des 34 plans imaginés par le ministère du redressement productif), qui devrait booster l'usage des piles à combustible (PAC) à hydrogène, et même, nous l'espérons sincèrement, l'intérêt des constructeurs automobiles français pour cette technologie.

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Le rapport parlementaire en bref…

Préconisations principales :

  • Prise de position forte du gouvernement en faveur de l'hydrogène
  • Programmation et financement (notamment partenariats public/privé)
  • Création d'un « Comité national d'orientation de la filière hydrogène »
  • Levée des freins réglementaire, notamment sur le transport et le stockage
  • Mise en place d'une fiscalité dérogatoire
  • Incitations à l'achat de véhicules à hydrogène, notamment pour les flottes
  • Sollicitation et soutien des territoires autour de la filière
  • Développement de la coopération internationale, notamment avec l'Allemagne.