Un chef d'entreprise dans la spirale de l'usure

Bâti autour de l'usure, un mot qui peut apparaître com-me désuet, com- me balzacien, et pourquoi pas obsolète, le film de Ricky Tognazzi en montre l'obsédante et meurtrière actualité. D'autres mots (crise, récession, chômage) sont si souvent répétés qu'ils prennent des allures virtuelles dans les journaux télévisés. Quelquefois, et de plus en plus souvent, ils se télescopent, se mêlent, se révélant ce qu'ils sont : des agents dévastateurs. Dans l'histoire de Francesco (Vincent Lindon), chef d'une entreprise de travaux publics, les mots sont italiens et, par là, rassurants. N'y a-t-il pas entre eux et nous une frontière ? C'est en Italie que le bâtiment va mal, en Italie encore que les banquiers stoppent les crédits, et c'est toujours en Italie que, harcelé par les dettes, enfermé dans un silence fait de honte et d'amour protecteur pour sa femme, Miriam (Sabrina Ferilli), que Francesco se tourne vers Sergio (Luca Zingaretti), l'ami prêt à l'aider, ressurgi comme par hasard. Derrière Sergio se profilent les ramasseurs de fonds, les exécuteurs, les charognards du désarroi. Sergio veut tout : l'argent, les biens, la femme. Le Jour du chien est un polar vertigineux. La spirale dans laquelle s'engouffre Francesco (Vincent Lindon, plus que parfait), solitaire, silencieux, muré, est orchestrée, planifiée, minutée, ordonnée par un Sergio implacable, guettant la phase finale. A l'origine de ce film, une idée du juge Tauristano, déjà collaborateur du réalisateur sur l'Escorte, un film sur la Mafia, et une enquête du réalisateur sur les actes judiciaires d'où il ressort que l'usure, en Italie, porte sur 12.000 milliards de lires, que 800.000 personnes la pratique et 65 % des commerçants la subissent. « Des chiffres nets et inhumains », dit Ricky Tognazzi. Les causes en sont la récession, la fermeture du crédit bancaire, mais surtout l'usure est un moyen de recycler les capitaux et de s'approprier lentement et inexorablement les entreprises privées et les commerces. Vous avez dit en Italie ? Ouf ! Sophie CHEMINEAU
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.