Si Alain Juppé avait du coeur, il devrait, ces jours-ci, reconnaître que tout, dans l'héritage « calamiteux » de son prédécesseur à Matignon, nétait pas si mauvais. Cet homme que ses amis chiraquiens disaient volontiers timoré, a eu, une fois au moins, le courage de trancher dans le vif. Les socialistes qui l'avaient précédé Rue de Varenne s'étaient contentés, eux, de hurler à la désinformation, voire à la manipulation politique. Mais c'est Edou- ard qui s'est débarrassé du Cerc. Cet insupportable Centre d'études des revenus et des coûts avait eu, on s'en sou- vient, l'outrecuidance de vouloir démontrer qu'au cours du règne mitterrandien, les inégalités s'étaient creusées en France. Et que, surtout depuis 1988, le dogme réputé salvateur du franc fort rendait les riches plus riches, et les pauvres plus pauvres. Le tout, impertinence suprême, basé sur des chiffres et des statistiques irréfutables. Aussi, à peine installé dans ses meubles de cohabitant stylé, Balladur n'avait donc pas hésité une seconde à casser le vieux thermomètre. Mais attention, pas pour dissimuler la réalité. Pour le remplacer par un instrument plus moderne et plus adapté à la situation : le très aimable CSERC, Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts. Chargé, lui aussi, de surveiller les clignotants économiques et sociaux. Mais heureusement délesté de cet inutile pouvoir d'investigation autonome qui alourdissait dangereusement ses frais de fonctionnement. Dorénavant, le CSERC compile les documents et les enquêtes réalisés par d'autres, les découpe, les recolle, et les commente. Le moins possible. Un travail formidable, dont le premier exemplaire vient de paraître, donnant raison, post mortem, à Balladur, et pour l'heure, un souci de moins à Juppé. Une fracture sociale, disiez-vous ? Comme c'est bizarre. Rien, vraiment, ne vient conforter cette hypothèse. Foi de CSERC. KATHLEEN EVIN

latribune.fr

26 Sept 2008, 0:10

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