Le marché de l'art reprend des couleurs

Traditionnellement, le marché de l'art calque son évolution sur celle de l'immobilier, ces deux activités étant elles-mêmes toujours à la traîne des indices boursiers. Une fois de plus, c'est ce qui se produit : le Dow Jones et le CAC 40 ont connu de très fortes progressions au premier semestre. Conséquence, les oeuvres d'art retrouvent une certaine cote, tout au moins les objets les plus représentatifs. D'une manière générale, en salle des ventes ou en galeries, le marché s'anime, avec, fait nouveau, des acheteurs parfois jeunes et très informés. Depuis la crise, le marché peut se diviser en quatre catégories bien distinctes. Première d'entre elles, la « qualité musée », constituée d'oeuvres exceptionnelles d'artistes universellement reconnus. Ici, les prix sont en très nette augmentation du simple fait de leur raréfaction. « En vingt ans, précise Hildegarde Monot, spécialiste de la Banque Paribas, nous n'avons vupasser que deux Rembrandt ou deux Goya. Des toiles à plus de 40 millions de francs qui ne reviennent jamais deux fois en vente publique ». Même rareté pour le mobilier : un rare minéralier estampillé B.V.R.B. est proposé autour de 10 millions de francs. Deuxième catégorie, les oeuvres de belle qualité de grands artistes illustrant les mouvements de leur temps, sans en être les initiateurs. Après un recul de 30 % cesdernières années, la tendance est à la division. D'une part on trouve des prix soutenus si l'oeuvre est marquante, par exemple ce « Cavalier arabe » du Douanier Rousseau adjugé le 20 juin à Paris 3.380.000 francs. D'autre part, s'il s'agit d'oeuvres plus bales, les prix décollent peu : une « Vue d'Alger » d'Henri Marquet, moins caractéristique que ses toiles sur Paris, n'a pas dépassé les 800.000 francs. A noter que les musées s'intéressent de plus à plus à cette catégorie, et donc, font monter les prix. Les oeuvres de bonne qualité signées d'artistes moins significatifs, suiveurs d'écoles et ayant beaucoup produit, constituent une troisième catégorie. Ici, la crise a laissé son empreinteavec des baisses fréquentes de 50 %. Le marché se redresse avec difficulté. C'est en particulier le cas des peintres des années 1950-1960 (Atlan, Mathieu), de l'argenterie (non stylée) ou de certaines voitures (Lamborghini). C'est aussi dans ce domaine que l'on peut espérer des plus-values : les dessins anciens, les post-impressionnistes, l'art asiatique, les faïences, l'argenterie de style ou la photographie, peu chers en France comparés au marché international, devraient connaître des prix à la hausse. L'influence des Anglo-Saxons. Enfin, les oeuvres courantes. Ici, place au collectionneur pasionné qui se moque, comme tout vrai amateur, du prix des choses. Il peut arriver que le marché s'emballe : c'est le cas des affiches 1900 notamment de Mucha et Cassandre, des reliquaires africains, du mobilier design, des montres Swatch, des kilims, des autographes, des dessins anciens, des ours en peluche, des vêtements griffés. L'inverse se produit également : les objets publicitaires américains, les lithos, les netsuskes japonais, le mobilier Charles X ou les tankas tibétains n'attirent plus la foule. Pour la peinture, comme toujours, c'est New York et Londres qui donnent le ton : on y confirme la reprise, mais les acheteurs sont sélectifs et prudents. Les Américains ont dépensé plus de 1,3 milliard de francs en quatre jours de vente de tableaux modernes. Même succès à Londres. Une gouache de Van Gogh de la période arlésienne y a recueilli 88 millions de francs. Il est vrai que, depuis trente ans, on n'avait pas vu une aquarelle d'une telle qualité. Une huile de Cézanne « Ferme en Normandie » a été achetée 31 millions de francs, un « petit » Renoir, « Conversation », a été acquis 11 millions et une « Composition » de Kandinsky a recueilli 8,5 millions de francs. Autres bons scores, les fauves et expressionnistes : une « Femme au grand chapeau » de Van Dongen a été adjugée près de 21 millions de francs, une « Scène de rue » de Kirchner a obtenu 19 millions de francs. A Drouot-Paris, à moins d'un an de la réforme de la profession, c'est le regroupement de commissaires priseurs Piasa, qui affiche des résultats de niveau international avec 100 millions de chiffre d'affaires en juin. En vedette, un pastel de Renoir de 1896 adjugé 5.850.000 millions. L'étude Briest arrive juste derrière avec 70 millions de francs. A signaler quelques belles enchères tricolores : « L'Espagnol » de Pablo Picasso (7.500.000 francs), « Grand paysage » de Balthus (3.800.000 francs), « le Fond de la tour » d'Yves Tanguy (2.300.000 francs), « les Pintades » de Chaïm Soutine (920.000 francs), « l'Hiver dans le Doubs » de Gustave Courbet (720.000 francs), « Page de Trouville » d'Eugène Boudin (776.000 francs). Le succès du mobilier. Autre secteur florissant, le mobilier. Tout ce qui porte estampille atteint des prix élevés : 3.700.000 francs un bureau plat par Montigny, époque Louis XVI, même prix et même époque pour un autre bureau plat signé Riesener (pour lequel les enchères avaient démarré à 300.000 francs !), 1.560.000 francs une bibliothèque de Leleu. La Haute Epoque et l'art nouveau-art déco trouvent également acheteurs (530.000 francs une méridienne par Ruhlmann). Même bonne surprise pour les objets d'art : une pendule Régence attribuée à A.C. Boulle a été achetée 2.800.000 francs et deux bustes en bronze de Charles Cressent ont obtenu 2.350.000 francs. Enchères millionnaires à nouveau pour les voitures de collection, Paris restant une des places fortes mondiales. Parmi les meilleurs prix, une Ferrari 225 Sport 1952 (6.700.000 francs), une Talbot T26 1948 (2.800.000 francs), une Maserati 4CLT 1948 (2.300.000 francs) et, pour l'anecdote, un casque porté par Ayrton Senna (300.000 francs). Si Genève occupe le premier rang pour les bijoux, Drouot enregistre quelques beaux résultats (1.585.000 francs pour un bracelet ruban en platine par Cartier ou 1.900.000 francs une bague du même joaillier assortie d'un diamant de 15,21 carats), tout comme pour la photographie, même si New York fait mieux : un tirage de Man Ray « Violon d'Ingres » a recueilli 380.000 francs à Paris. Des plus-values possibles. Le marché français reste important pour la peinture ancienne (4.500.00 francs une huile de Gerrit Berckheyde), les dessins et gouaches (1.580.000 francs un pastel de 1886 de Berthe Morisot), les arts premiers (1.800.000 francs une statue d'ancêtre Dogon, Mali), l'orientalisme (870.000 une toile de Dinet), l'art religieux (930.000 francs 53 pages d'un Coran IXe), la sculpture (550.000 francs une épreuve d'Auguste Rodin), les objets de vitrine (350.000 francs un porte-allumettes de Fabergé), la bibliophilie (700.000 francs une rare édition de Georges Bataille, 500.000 francs une édition originale de « le Rouge et le Noir »), les manuscrits et autographes (95.000 francs le récit par Napoléon de son installation à l'île d'Elbe), les montres (690.000 francs un gousset de Ditisheim), les livres illustrés (600.000 francs un recueil de plantes d'après Abraham Munting), les instruments de musique (345.000 francs un violon par Vuillaume), et marque des points pour la faïence (920.000 francs un biberon de Saint-Porchaire vers 1530, 700.000 francs un service en Sèvres par Leloi, 1819), l'archéologie (235.000 francs un sarcophage en marbre romain), l'art oriental (123.000 francs une porcelaine Qianlong), le vin (480.000 francs la caisse de douze mouton-rothschild 1945), les instruments de mesure (300.000 francs un compendium astronomique du XVIe), l'art populaire (35.500 francs une imposte en fer forgé), la bande dessinée (35.000 francs une édition originale du « Lotus bleu » d'Hergé), les objets de marine (105.000 francs une maquette Empire), les jouets anciens (80.500 francs un bébé Jumeau), etc. Autant de domaines où, à condition d'être sélectif, des plus-values sont à attendre. Ce qui n'est pas le cas de quelques secteurs en perte de vitesse : l'art publicitaire (sauf les affiches anciennes), les lithos, la numismatique courante, la philatélie, l'argenterie sans style, certaines peintures (écoles russes, haïtiens, petits maîtres, contemporains), quelques styles de mobilier (Charles X, régionalisme, copies) et tapis. Hubert Konrad et Jérôme Stern NB : Tous les prix français mentionnés ici ne comprennent pas la taxe, généralement, de 10,854 %.
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