« Les salaires sont inférieurs de 20 % à 30 % à ceux du privé »

Par latribune.fr  |   |  759  mots
Le constat dressé le 30 octobre dernier par la chambre régionale des comptes n'est pas passé inaperçu. Auscultée à la loupe, la gestion de la communauté urbaine de Strasbourg (CUS) entre 1987 et 1992 a abouti à des conclusions sévères qui font ressortir « de nombreuses irrégularités budgétaires et comptables ». La gestion des ressources humaines n'a pas été épargnée par les critiques, même si celles-ci restent marginales. Procédure d'avancement automatique accéléré sans pondération selon le mérite ou l'absentéisme ; absence de système de notation ; versement d'avantages complémentaires (bons d'essence, prise en charge à 50 % des cotisation à une mutuelle alors que le taux maximal ne peut dépasser 25 %) ; ou encore attribution d'une prime de Noël par l'intermédiaire d'une association subventionnée par la collectivité, « ce qui est, à l'évidence, constitutif d'une gestion de fait ». A la CUS, on estime que ces différents points sont avant tout le résultat de « sédimentations successives » d'avantages acquis au fil des ans afin d'améliorer les rémunérations des agents, mais pour la plupart « non répréhensibles ». Une analyse partagée par le rapporteur de la chambre régionale des comptes, Victor Bastien, qui réaffirme toutefois avec force sa mission : « Nous sommes là pour éviter toute dérive... » La CUS se trouve désormais prise entrla « nécessité de répondre aux critiques de la chambre » sans « sacrifier la cohésion sociale, la capacité de motivation et l'attractivité de la fonction publique communautaire », selon Catherine Trautmann. Depuis la publication du rapport, la présidente de la CUS s'est déjà entretenue avec les six organisations syndicales. « Nous comptons partir de cette observation extérieure à la "maison" pour déclencher des négociations, mais cela ne sera pas facile », complète Roland Ries, vice-président de la CUS. Versement maximal pour tous. Les remarques de la chambre attestent du manque évident de souplesse dans la politique de rémunération des collectivités territoriales. « A poste et âge équivalents, les cadres territoriaux perçoivent un salaire de 20 % à 30 % inférieur à ceux du secteur privé », estime Philippe Chotard, secrétaire général de la CUS. « Et nous ne disposons que de très peu d'outils pour récompenser les bons agents. Le mode d'évolution de carrière est presque toujours inscrit d'entrée. Il y a beaucoup trop peu de possibilités d'avancement interne. » Conséquence : les bons éléments sont peu avantagés (et sous-payés) alors que les moins bons bénéficient d'un niveau de rémunération garanti. Instauré à partir de décembre 1992, le régime indemnitaire de la CUS n'a pas apporté la souplesse attendue, puisque tous les fonctionnaires disposent du versement maximal (+ 38 % de la rémunération de base). « Nous avons simplement choisi de fixer le même plafond pour les filières technique et administrative afin de ne pas accroître les disparités »,souligne Bernadette Debrosses, DRH. Vieil acquis social antérieur à la loi de 1984, la « prime de Noël » - l'équivalent du treizième mois - vient compléter la rémunération glo- bale qui s'élève pour la filière technique à 194.000 francs net pour un administrateur début de carrière, 365.000 francs pour un directeur des services techniques de cinquante ans, et 398.000 francs pour un administrateur de fin de carrière... contre 320.000 francs pour un grade identique de la filière administrative. Bien qu'en cons- tante augmentation, le nombre de contractuels n'a pasuscité de commentaires négatifs de la chambre régionale des comptes. Leur nombre et leur rémunération font l'objet d'une délibération en conseil municipal, ce qui garantit une certaine transparence. « Nous atteignons une proportion raisonnable de 15 % à 20 % de contractuels », indique Philippe Chotard. « Nous n'avons recours à eux que lorsque nous y sommes contraints à cause de la nature du poste recherché ou parce que nous n'avons pas trouvé le bon profil parmi les candidats de la fonction publique. » La tentation du privé. La CUS n'éprouve aucune difficulté à obtenir des candidatures de contractuels de bon niveau. « Le problème réside davantage dans le recrutement de personnes surqualifiées qui pourraient un jour être tentées par le privé », estime Bernadette Debrosses. « Or, il n'existe pas de moyens d'anticiper cette fuite », déplore Philippe Chotard, qui conclut : « Heureusement, la question se pose moins pour les cadres titulaires qui restent attachés à leur statut et pour qui la rémunération n'est pas forcément l'élément de motivation fondamentale. » Jacques Trentesaux, à Strasbourg