Denise Silber : "L'inconfort réel fait bouger ! "

Quelle est la réalité de la télémédecine en Europe ?- La télémédecine n'est pas utilisée à grande échelle en Europe continentale, où les séries d'expériences qu'on peut qualifier de "pilotes éternels" ne sont pas destinées à devenir une pratique courante. Ce cercle vicieux est généré par une résistance au changement et par une absence d'encadrement juridique et administratif : manque de clarté concernant le remboursement et les coûts, la codification des actes et des responsabilités, etc. Cela est dû à la fois à la séparation du monde de la médecine entre cliniciens d'un côté et spécialistes de la télémédecine ou de l'e-santé de l'autre, et à la résistance des métiers concernant le transfert de responsabilités : du spécialiste vers le généraliste, du médecin vers l'infirmier, etc. Il faudrait, comme je le soulignais lors des Journées interrégionales du Catel [réseau de compétences en télésanté, Ndlr], que les technologies de l'information, dont la télémédecine, soient complètement intégrées dans les spécialités.Certains pays européens sont cependant plus en avance que d'autres. Pourquoi ?- C'est l'inconfort réel qui fait bouger : le problème des distances ou le manque de spécialistes, par exemple ! C'est le cas notamment dans plusieurs pays scandinaves. La Norvège, le Danemark, la Suède, l'Estonie et la Lituanie ont ainsi lancé fin 2005 le réseau santé balte (Baltic Health Network), grand réseau sécurisé qui relie tous les mini-réseaux existants dans ces cinq pays. Les premiers projets portent sur la radiologie et l'ultrason, et ils sont tous deux réalisés de manière transfrontalière. C'est un pas important dans la démonstration de la valeur de la télémédecine.Que suggérez-vous pour que la télé- médecine progresse en France ?- Je préconise de commencer à créer des référentiels dans les créneaux où existe une pénurie de professionnels de la santé et dans ceux où le besoin de monitoring à distance est évident et le nombre de patients gérable. Premier exemple : pour palier le manque d'ophtalmologues, on peut faire pratiquer à distance l'examen de la rétine chez les diabétiques par un non-ophtalmologue et les envoyer ensuite à un centre spécialisé pour l'analyse. Deuxième exemple : instaurer un monitoring à distance régulier pour les femmes enceintes à risque d'hypertension artérielle. Et encore : la consommation d'oxygène et d'autres paramètres du traitement des patients atteints de broncho-pneumopathie chronique obstructive peuvent être suivis à distance... Des expérimentations et des applications existent localement en France pour ces trois exemples et elles ont démontré leur efficacité. Je propose donc de mettre en place pour chacun d'eux un plan national.Propos recueillis par Patricia Dreidemy
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