Les univers d'investissement évoluent vers plus de mélanges

Les distinctions classiques entre grandes gammes de fonds (monétaires, obligataires ou actions) ont-elles encore un sens ? Dans un grand nombre de sociétés de gestion, on assiste de plus en plus à une refonte des univers d'investissement, pour obtenir plus de liberté et plus de mélanges entre les différents types de gestion. "Je daterais le mouvement de 1998, quand les gérants de taux classiques ont été confrontés à la convergence européenne", explique par exemple Bernard Descreux, directeur de la gestion de Sogeposte, ajoutant que "ces derniers ont alors commencé à inclure du crédit, voire des convertibles dans leurs portefeuilles, pour dynamiser et retrouver une diversification perdue".Plus généralement, l'hybridation progressive des univers d'investissement a trouvé un certain écho à partir des années 2000, une période marquée par deux phénomènes : le tassement des rendements et la recherche de performance absolue. La notion de benchmark (ou indice de référence), traditionnellement associée à la dénomination même du fonds, s'est retrouvée sévèrement critiquée. "On peut parler d'un trauma de la performance absolue. Loin des rigidités du benchmark, on a vu apparaître des fonds plus réactifs, et moins centrés sur une classe d'actifs unique", confirme Thierry Callault, président du directoire d'Ofivalmo Palmarès. Il s'est ainsi agi pour les gérants de partir à la recherche d'angles différents d'investissement.L'éclatement des benchmarks a récemment franchi un nouveau cap avec l'émergence de fonds s'autorisant des allers-retours entre les univers de taux et celui des actions. C'est le cas par exemple de produits monétaires, comme le fonds Réactis Sérénité d'Ixis Private Capital Management, qui cherche à dynamiser un rendement sans risque mais faible par l'ajout d'actions à fort dividende. "Le phénomène est tel que l'impact s'est fait ressentir sur les valorisations de certaines valeurs cotées", explique notamment un trader parisien spécialisé sur les marchés d'actions.Plus engagée encore dans cette voie, la plate-forme Cortal Consors propose à ses clients le fonds Energie 2, un OPCVM dont l'ambition est de tirer profit du meilleur potentiel de performance entre les actions et les obligations d'une même entreprise. Ici, la distinction classique entre ces deux classes d'actifs est obsolète. "Tout se passe comme si le type d'investissement devenait une préoccupation secondaire, au profit des objectifs et des contraintes du client", précise Eric Tazé-Bernard, directeur de la multigestion d'Invesco.Pour parvenir à dégager de la performance absolue, les gérants peuvent avoir recours à un grand nombre de types d'actifs (obligations, actions, devises), en allant même jusqu'à chercher des opportunités sur les marchés émergents. Le contrat entre l'investisseur et la société de gestion ne porte alors plus sur une classe d'actifs définie, mais plutôt sur un couple rendement-risque déterminé.Sophistication. S'il correspond à une sophistication des techniques de gestion, l'éclatement des univers d'investissement répond également à une demande très basique de la clientèle de particuliers. "On rejoint peu à peu une approche patrimoniale de l'investissement, centrée sur les besoins génériques des clients", précise Olivier Johanet, directeur général de la Française des Placements, qui ajoute : "Avec une gamme de fonds benchmarkés sur des types d'actifs prédéfinis, il revenait à l'investisseur particulier d'assumer le travail d'allocation. Un système de gestion centré au contraire sur les attentes des clients apparaît plus raisonnable."Ce qui peut s'appliquer aux particuliers ne s'applique toutefois pas à l'ensemble du marché de la gestion d'actifs. Même les ardents défenseurs de fonds hybrides reconnaissent qu'il n'est pas facile pour un investisseur institutionnel d'y souscrire. Sans classification claire, certains fonds ne rentrent pas dans les lignes types des portefeuilles. Plus grave, le manque de lisibilité peut se traduire par un flou en matière de contrôle des risques et de reporting, une barrière pour nombre d'institutionnels. Comment un investisseur peut-il par exemple savoir qu'il n'empile pas sans le savoir plusieurs expositions sur un même marché ? Les univers d'investissement ne pourront sans doute continuer d'être revisités qu'au prix d'une plus grande transparence.Tarek IssaouiIXIS PCM, une spécialiste de l'allocationCréée en 2001, IXIS Private Capital Management a abordé le marché de la gestion de fortune avec un double objectif de compétence : allocation d'actifs et multigestion. Un positionnement que le président de la société, Christophe Brulé, explique par la nécessité de repenser la construction de portefeuille. "Les fonds purs continueront d'exister, prédit Christophe Brulé, mais ils seront avant tout destinés aux professionnels de l'allocation, qui sauront y puiser l'expertise de tel ou tel gérant spécialisé. Notre rôle est plutôt de servir d'interface entre l'investisseur et la très vaste offre de fonds."
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